« Le populisme, c’est un peu la politique du y’a qu’à, de la démagogie, de la réponse facile, simpliste, manichéenne qui essaye d’identifier un bouc-émissaire quelque part et de dire : ‘’Toute la faute vient de là. Si seulement, on pouvait l’écarter, tout irait bien’’», dixit Tzvetan Todorov, essayiste et historien des idées. Les communicants politiques du parti de l’Aigle semblent appliquer cette définition éclairante à la lettre, à l’occasion de la commémoration du 58e anniversaire de l’assassinat du héros de l’indépendance.
Bouc-émissaire désigné, la Belgique est le fer de lance du ‘’néocolonialisme ‘’, qui ne remonterait pas au 14 mars 2016, le jour où l’UE a décidé de suspendre son aide directe au gouvernement burundais. Les racines du mal affleureraient au crépuscule du colonialisme. « Juste au début du mouvement indépendantiste, la Belgique s’est attelée à l’étouffer notamment par l’assassinat des grandes figures de la lutte pour l’indépendance immédiate, […]. A partir de ce moment, elle a instauré le néocolonialisme […]», peut-on lire dans le communiqué du parti Cndd-Fdd, lors de la commémoration du 58e anniversaire de l’assassinat du héros de l’indépendance. Le sanglot de l’homme noir dont parle l’écrivain André Mabanckou nous rappelle la vacuité d’une telle entreprise.
La «complotite » aiguë place le parti au pouvoir dans une position schizophrénique. D’une part, le gouvernement qu’il dirige vient de nommer un ambassadeur en Belgique, après le rappel en 2016 de son prédécesseur. D’autre part, il mord la main de celui qui pourrait redevenir son premier bailleur de fonds bilatéral. « […] le constat que la Belgique n’a pas encore désarmé dans son plan de déstabilisation du Burundi […].»
Dans l’arsenal du populiste, l’arme des faits alternatifs, pierre angulaire dans la formation de l’opinion. « Le Parti CNDD-FDD se réjouit du retour massif des Burundais qui étaient réfugiés, […] » Jeudi 3 octobre, 590 réfugiés burundais rapatriés de Tanzanie sur les 2000 mille attendus par semaine à compter du 1er octobre. Mardi 8 octobre, le chiffre dégringole à 248. Mardi 15 octobre, 812 ont regagné le bercail.
La culture du dialogue caractérise les relations entre les partis politiques, un serpent de mer. « […], les réunions mensuelles des partis agréés ont fait éclore l’esprit démocratique […]. » Le Forum des partis politiques est une institution où l’entre-soi est un secret de polichinelle. Ses animateurs gravitent dans la galaxie DD.
Sur le front économie, la politique du y’a qu’à est au cœur du populisme. Une simplification de la réalité pour une simplification de la solution. « […], le Parti CNDD-FDD exhorte une fois de plus le Peuple burundais surtout les Bagumyabanga à redoubler d’efforts en luttant contre l’insécurité alimentaire et la pauvreté en accroissant la production […].» Un discours suranné qui escamote la question épineuse du faible investissement dans le secteur agricole. En cause : le manque de confiance dans l’avenir. A qui revient la responsabilité de créer ce socle de la liberté d’entreprendre ? Celui qui a les pouvoirs régaliens.
Le peuple se transforme en masse manipulable à mesure que ses strates sociales optent pour le mode veille de la réflexion critique.
Guibert Mbonimpa