Alors que le sort des quatre journalistes et de leur chauffeur doit se jouer aujourd’hui, la rédaction a reçu depuis Paris une lettre émouvante de Sylvaine et Jean Legastelois. Ces formateurs en journalisme sont venus plusieurs fois au Burundi pour former les journalistes d’Iwacu. Ils se souviennent et espèrent…
Chères Christine et Agnès, chers Térence, Egide et Adolphe
Je n’ai pas encore eu la chance de vous connaître, mais je voudrais vous dire aujourd’hui à quel point vous m’êtes proches, du fond de cette prison où l’on vous vous a jetés.
Proches parce que, ma femme Sylvaine et moi, sommes liés à Iwacu par tant de liens forts et anciens que toute atteinte à ceux qui font ce journal nous touche profondément.
Vous savoir emprisonnés nous révolte. Emprisonnés alors que vous faisiez votre travail de journalistes avec la rigueur qui a toujours fait d’Iwacu un exemple pour notre profession !
Mon épouse et moi nous sommes formateurs en journalisme. Nous avons vu naître votre journal, avec Antoine, nous avons recruté et formé la première équipe. Sylvaine et moi avons accompagné la croissance au cours de nombreux stages au Burundi mais aussi à Paris car nous avons eu le bonheur d’accueillir en France plusieurs membres de la rédaction venus en formation dans les médias à Paris., A telle enseigne que l’une des chambres de l’appartement a été baptisée « la chambre des Burundais » !
Au fil des ans, nous avons constaté avec admiration l’extraordinaire développement d’Iwacu, à l’origine petit bimensuel, devenu groupe multimédia employant une trentaine de personnes. Vous pouvez être fiers de faire partie d’une telle entreprise de presse : elle doit son développement et son rayonnement à la rigueur professionnelle de ceux qui l’animent.
Avant-hier, avec les amis d’Iwacu-Europe nous envisagions les actions possibles pour qu’ici, à Paris, votre sort soit encore plus connu, qu’on ne vous oublie pas. Parce qu’en faisant votre métier de journalistes vous défendez un droit fondamental ; parce qu’en travaillant à Iwacu vous permettez qu’une parole libre continue d’informer les burundais, d’éclairer leur jugement, hors de toute idéologie partisane.
De ce combat pour une presse libre vous payez aujourd’hui l’injuste prix fort.
J’imagine votre détresse, privés de la plus élémentaire des libertés, celle d’aller et venir, celle d’être avec les siens. Sachez au moins que vous n’êtes pas seuls et qu’au Burundi et bien au-delà, des amis, des confrères, se soucient de vous.
Aujourd’hui nous sommes dans l’incertitude, mais je veux croire que le droit finira par triompher et que nous aurons, un jour le bonheur d’accueillir tel ou telle d’entre vous dans la chambre des Burundais ! Car nous sommes de la famille d’Iwacu !
Jean Legastelois