Ceux qui battent leurs épouses ont aussi besoin d’une assistance que leurs victimes. Car cette violence masculine envers la femme s’explique par des raisons psychologiques, sociales et économiques… <doc3095|left>« Plusieurs femmes que ce soient celles des milieux ruraux ou urbains, sont ou ont été victimes de la violence de leurs maris », affirme Claire Kezakimana, assistance sociale à l’Association pour la défense des droits de la femme (ADDF). Selon elle, la violence des hommes envers leurs épouses peut s’expliquer par la dépendance à l’alcool mais aussi par des raisons économiques : « La plupart des victimes dépendent économiquement de leurs conjoints, mais cela ne veut pas dire que celles des milieux dits favorisés sont épargnées. » Ainsi, si une femme battue porte plainte, l’ADDF convoque le mari pour des séances de réconciliation. C’est à ce stade que certains prennent conscience de leur violence et acceptent de se faire suivre par un psychologue. Selon Jean Marie Sindayigaya, psychologue, battre son épouse est une manière de se décharger émotionnellement. Souvent, ce genre d’hommes raisonne de manière primaire : « On ne peut pas prétendre, à ce stade, corriger les erreurs qui n’ont pas pu être corrigées par les parents. » L’homme a pu s’identifier à un autre violent Dans d’autres situations, ce serait des gens chez qui prédominent l’impulsion destructrice et qui voudraient évacuer leur tension en tapant sur leurs épouses. Cette violence peut aussi s’expliquer par des raisons sociales : « La société burundaise est patriarcale. Ce qui fait que, parfois, la violence masculine envers les femmes est tolérée. » Est-ce que le fait d’avoir vu dans l’enfance leur père taper sur leur mère a une quelconque influence ? Le psychologue explique que cela est possible dans la mesure où l’enfant a pu s’identifier à la victime ou à son père. Jean-Marie Sindayigaya ajoute aussi qu’un manque d’arguments en cas d’infidélité, peut-être lié à une situation de honte, de culpabilité. Le mari voudrait sortir son angoisse en tapant sur sa femme. Pour le psychologue, il se peut aussi que la femme soit fautive : « L’homme manque de stratégies d’adaptation à la situation de méconduite de sa femme et va liquider l’angoisse par les coups. » Besoin d’assistance psychologique En fin de compte, une évaluation psychologique de l’homme violent est nécessaire pour identifier les facteurs à la base de ce comportement. Car il y en a qui peuvent le faire par perversion ou psychopathie : « Il a besoin d’être assisté psychologiquement afin de l’aider à canaliser autrement ses pulsions destructrices. » Comme ce sont les victimes qui viennent en premier, Jean Marie Sindayigaya suggère la consultation des thérapeutes familiaux. « Cette psychothérapie concernerait tous les membres de la famille nucléaire. Car avec le système d’interaction entre les sous-systèmes de la famille, même les enfants peuvent être affectés, d’une façon ou d’une autre, par les violences dont est victime un de leurs parents. » Témoignages « Quand j’ai découvert qu’il entretenait une relation extraconjugale, je lui en ai parlé. Evidement, il l’a nié », raconte D.F., une femme battue. Frustrée, à chaque fois que son mari rentrait, le soir, elle raconte avoir toujours eu l’impression qu’il avait passé la soirée avec la maîtresse et lui demandait sans cesse les endroits fréquentés. « Ça le mettait hors de lui. Un soir, il m’a giflé mais m’a demandé pardon. » D’après D.F., c’était le début des coups au quotidien : « C’était devenu une habitude de me battre lorsque je lui posais des questions sur son « deuxième bureau ». » G.D., une commerçante au marché de Jabe, est une femme battue. Pour elle, le malheur a commencé le jour où son mari lui a intimé l’ordre de quitter son travail et de rester à la maison : « Je ne pouvais pas accepter cela. » D’après elle, son mari est possessif et d’une jalousie maladive : « Il m’accusait d’entretenir des amants car il n’acceptait pas que je gagne plus d’argent. En plus, quand je le contredisais dans une discussion, il me rouait de coups. Me battre était devenu sa façon de me montrer qu’il restait le chef de ménage.»