Dimanche 24 novembre 2024

Société

Vestine Nahimana : « Le CNC n’a pas bloqué le site d’Iwacu, cherchez ailleurs »

23/04/2022 1
Vestine Nahimana : « Le CNC n’a pas bloqué le site d’Iwacu, cherchez ailleurs »
Vestine Nahimana : « Si c’est un organe étatique qui a bloqué le site web du Journal Iwacu, le CNC saura quoi faire »

Ce vendredi 22 avril, le Conseil national de la Communication (CNC) a tenu à dire haut et fort aux responsables du Journal Iwacu, qu’il n’est pas responsable de l’inaccessibilité du site www.iwacu-burundi.org au Burundi.

Pour rappel, c’est au lendemain de l’interdiction par le CNC du forum des lecteurs le 10 octobre 2017 que le site d’Iwacu est devenu depuis lors inaccessible au pays. Etrange coïncidence, …

La question a été posée à maintes reprises au CNC, mais cet organe de régulation des médias au Burundi n’a pas donné suite aux préoccupations clairement exposées par Iwacu.
Pourtant, le CNC promettait d’aller voir les ’’services techniques compétents’’ pour que le site d’Iwacu soit de nouveau accessible au Burundi.
« Dites à tous vos partenaires que le CNC n’y est pour rien, qu’il veut plutôt assainir la situation qu’il est prêt à contribuer dans le déblocage de cette impasse », a précisé le président du CNC, Mme Vestine Nahimana, visiblement sincère.

« Nous sommes outrés quand certains de nos interlocuteurs nous disent que c’est le CNC qui a bloqué le site web du groupe de Presse Iwacu. Nous sommes gênés quand nous sommes interrogés sur un sujet que mon équipe n’a pas traité », a regretté Mme Nahimana.

Le directeur du Journal Iwacu, Léandre Sikuyavuga a précisé qu’il ne peut s’adresser qu’au CNC, le seul interlocuteur des médias pour débloquer la situation. « Loin de nous toute idée de faire porter le chapeau au CNC, même si vous restez notre seul recours, notre ’’mur des Lamentations’’. Il revient au CNC de poser des questions pour savoir où se trouve le blocage. Iwacu s’en remet à vous », a plaidé M. Sikuyavuga.

La présidente du CNC a rétorqué que son organe n’est pas et n’a pas de service secret et travaille dans la transparence de la loi. Toutes ses décisions sont suivies de communiqués. « Si c’était le CNC, ce serait officiel avec un communiqué sanctionnant la décision. Mais de grâce qu’on ne dise pas que c’est le CNC qui a bloqué le site web d’Iwacu », a insisté Madame Nahimana.

Et de faire une promesse : « Nous allons nous saisir de la question, et essayer de savoir où se trouve le blocage, mais il faut qu’Iwacu fasse ses investigations auprès des fournisseurs d’accès à internet et d’autres régulateurs. Vous avez notre aval ».

Que disent les techniciens

Interrogé sur ce blocage, Laurence Dierickx, spécialiste du numérique et docteure en information et communication, à qui l’on doit le site du journal, explique que ce ne sont pas les autorités mais les fournisseurs d’accès à internet qui bloquent l’accès à l’adresse IP du site web concerné.

« Une adresse IP – pour Internet Protocol – est un numéro d’identification qui se trouve à la base du système d’acheminement des données sur le web. Par exemple, l’adresse IP de twitter.com est 104.244.42.193. Pratiquement, le fournisseur d’accès applique un filtrage DNS (Domain Naming System). Trouver l’adresse IP d’un site web n’a rien de sorcier, il existe quantité de sites qui fournissent gratuitement ce service, comme Check Host ou IP Info, par exemple. Le blocage d’une adresse IP ne se produit pas toujours pour des raisons de censure, il peut se justifier pour des raisons de sécurité ».

Selon cette spécialiste belge du numérique et docteure en information et communication( ULB), qui a effectué plusieurs missions de formation à Iwacu pour le développement du site internet du groupe de presse, « cette technique est notamment employée comme protection contre des attaques par force brute, une technique utilisée par des hackers mal intentionnés ».

Selon Mme Vestine Nahimana, s’il s’avère que c’est un organe étatique qui a bloqué le site web du Journal Iwacu, avec des preuves à l’appui, le CNC saura quoi faire. « On n’est pas là pour des crocs-en-jambe et autres blocages, ces temps sont révolus », a déclaré la présidente du CNC.
« Il y a une nouvelle dynamique d’ouverture avec les médias », a rechéri, Channel Sabimbona, secrétaire exécutif de cet organe de régulation des médias au Burundi.

Par le passé, les relations entre le Conseil national de la Communication (CNC) et Iwacu, un journal jaloux de son indépendance, ont été souvent conflictuels, surtout durant le mandat de Nestor Bankumukunzi qui avait pris en grippe le média.

L’ancien Président du CNC accusait Iwacu de diffuser des informations, des investigations et des analyses tendancieuses et sans respect du principe d’équilibre.

Iwacu a toujours démonté les accusations de Bankumunkunzi, rappelant que c’est un journal qui donne la parole à tout le monde, ce qui ne mettait pas fin aux harcèlements malgré tout.

Mme Vestine Nahimana semble vouloir tourner et ouvrir une nouvelle page entre le CNC et Iwacu. Son désir de voir accessible au Burundi le site internet du journal est tout à fait à son honneur. La rencontre s’est déroulée dans un esprit très constructif.


Antoine Kaburahe :« Espérons que c’est une nouvelle ère qui s’ouvre pour Iwacu »

Le fondateur du journal Iwacu, aujourd’hui membre du Conseil d’Administration de RSF, salue l’engagement de la nouvelle présidente du CNC pour le déblocage du site internet au Burundi. Il explique les raisons des relations très difficiles entre le CNC et Iwacu.

La nouvelle Présidente du CNC veut que le site web du journal Iwacu soit accessible. Votre réaction

Je remercie naturellement Mme Nahimana pour cette position très claire. Cela l’honore et elle signe bien son entrée dans cette fonction pas toujours facile.

Espérons que c’est une nouvelle ère qui s’ouvre pour Iwacu d’abord, mais aussi tous les autres médias. Pour Iwacu, j’ose espérer que c’est une page qui se tourne. Iwacu a tellement souffert pendant la précédente présidence.

Comment expliquez-vous  les relations difficiles entre le CNC et Iwacu ?

En réalité, Iwacu n’a jamais eu de problème avec le CNC, l’institution comme telle. Mais avec une personne : Nestor Bankumukunzi. On n’a connu plusieurs présidents du CNC dont certains étaient réputés « durs, et intransigeants », comme Karenga Ramadhani, mais les choses se passaient plutôt bien. C’est avec la présidence de Nestor Bankumukunzi que la situation a dégénéré. Iwacu a vécu un calvaire.

Justement, tout le monde s’ interrogeait  sur ce conflit  permanent  entre Iwacu et l’ ancien président du CNC. Votre commentaire?

L’ancien président du CNC nous nous connaissons très bien. Nous sommes de la même promotion à l’université et nous avons commencé le travail en même temps à la RTNB. Je ne vais pas m’étendre dessus, mais notre relation personnelle était exécrable, une inimitié profonde et ancienne. Dans les relations humaines, cela peut arriver. Mais le problème, c’est que lorsqu’il est arrivé dans une position de pouvoir il n’a pas pu dépasser cette hostilité et Iwacu a payé. Son aversion envers le journal était de notoriété publique. Rappelez-vous, quand il a été interrogé sur l’arrestation des quatre journalistes d’Iwacu, il a répondu « qu’il n’était pas au courant ! »  Jamais, rien même aucun mot de sympathie pendant plus d’une année d’emprisonnement de nos confrères.
D’ailleurs au sein même du CNC, en privé, des membres consternés me disaient qu’ils ne comprenaient pas un tel acharnement du président, les convocations quasi hebdomadaires, les lettres de menace…En fait, il a tout fait pour fermer Iwacu. Mais finalement et heureusement, tout le monde avait compris que ce n’était pas le travail d’Iwacu qui était en cause.

Vous êtes optimiste pour la suite ?

Oui. Je demande aux responsables d’Iwacu de garder et d’entretenir les bonnes relations avec le CNC. Mme Nahimana vient de poser un acte fort en déclarant qu’elle souhaite l’accès au site d’Iwacu au Burundi.

Du reste, ce blocage n’est pas efficace et ternit inutilement l’image du pays. Inefficace parce que, avec un VPN, on peut accéder au site. Vous savez aussi que grâce à RSF, il y a un site qui permet de lire Iwacu au Burundi.

Mais pourquoi imposer cette gymnastique aux Burundais ? Débloquer Iwacu serait un bon cadeau pour les Burundais à l’occasion des 14 ans d’Iwacu.

CNC

Forum des lecteurs d'Iwacu

1 réaction
  1. Shishikaye

    Iwacu nous dira certainement ce qu’il en est prochainement.
    Bon courage

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