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Vers une démocratie militarisée au Burundi ?

30/11/2012 Commentaires fermés sur Vers une démocratie militarisée au Burundi ?

La journée du combattant fêtée le 17 novembre par le parti au pouvoir suscite bien des questions. Alors que le gouvernement la banalise, le ministère de la Défense semble faire profil bas, tandis que l’opposition du pouvoir s’inquiète.

« Nous avons un ministère de la Défense nationale et des anciens combattants. Cela veut dire que le programme qui concerne les anciens combattants relève de la politique du gouvernement. J’en déduis qu’il ya confusion entre le pouvoir et le parti Cndd-Fdd pour nous amener dans un parti-Etat », soutient Léonce Ngendakumana, président du parti Frodebu et de l’ADC-Ikibiri. Pour le colonel Pascal Baratuza, porte parole du ministère de la Défense et des anciens combattants, le ministère n’a pas à s’ingérer dans les affaires internes des partis politiques. Concernant la dénomination de son ministère, il indique que c’est pour les discipliner, le cas échéant. De son côté, Edouard Nduwimana, ministre de l’Intérieur estime qu’il n’y a rien de mal à ce qu’un parti politique se rappelle de ses combattants. Cependant, pour M. Nduwimana, cela n’empêche pas qu’avec le processus de vérité et réconciliation, une journée dédiée à tous les combattants soit mise en place.

Une journée organisée par un parti à la place du gouvernement …

Malgré le ton apaisant du ministre de l’Intérieur, le FNL rejette la conception actuelle de la journée du combattant : « Le Cndd-Fdd doit savoir qu’il n’est pas au pouvoir pour ses membres seulement, mais pour tout le pays. Je demande en insistant que le parti au pouvoir ne le refasse jamais car, nos combattants ne se sont pas battus pour un parti, mais pour le pays », indique Jacques Bigirimana, secrétaire général du FNL. Pour lui, c’est le ministère de la Défense et des anciens combattants qui devrait s’occuper de cette journée. Il indique qu’ils ont été obligés de rassurer leurs combattants en leur demandant une minute de silence pour se rappeler tous les leurs tombés pour leur cause. Il souligne qu’ils devront organiser une journée pareille pour tous les combattants – faute d’une initiative dudit ministère.

Cette idée est, quasi, partagée par Charles Nditije, président de l’Uprona. Car, pour lui, « la journée du combattant devrait être dédiée à la mémoire des victimes de toutes les tragédies causées par la barbarie humaine au Burundi ». Sinon, prévient-il, ce serait une apologie de la violence qui montrerait qu’il y a des combattants qui se sont battus pour de bonnes ou de mauvaises causes.

Selon Manassé Nzobonimpa, qui a fréquenté les centres de décision du Cndd-Fdd, le parti au pouvoir avait la même conception de la journée du combattant que le président de l’Uprona. Il assure qu’elle a été instaurée à Gitega « à la mémoire de toutes les personnes tuées depuis l’indépendance et issues de toutes les composantes sociales ». Aujourd’hui, indique-t-il, une poignée de gens utilisent cette journée pour mettre en cause la démocratie et trahir le pacte de Gitega.

Un mauvais présage ?

« Lorsque les plus hautes autorités participent à la célébration de cette journée des anciens combattants du Cndd-Fdd, c’est une tentative de militarisation de notre pays », fait remarquer Léonce Ngendakumana. A son sens, il s’agit d’une voie ouverte pour truquer les élections de 2015 par l’intimidation. Et de conclure : « Si le pouvoir commence à associer des Imbonerakure et des anciens combattants qui n’ont jamais été en contact avec la réalité militaire, ce qui se passera sera pire qu’au Rwanda ».

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