Plus de 100 cas de violences basées sur le genre contre les hommes ont été enregistrés par deux centres à Bujumbura en 2019.
Viol, violences physiques et économiques sont les principales formes de violence que subissent les hommes. Le centre Seruka affirme avoir enregistré 91 cas de VBG contre les hommes en 2019. Plus de 95% de ces cas sont des violences sexuelles sur les garçons âgés de 5 à 15 ans. Quelques cas aussi d’hommes de plus de 20 ans ou d’une trentaine d’années violés. Beaucoup de victimes proviennent de Bujumbura et des provinces limitrophes, Bubanza Cibitoke et Rumonge.
L’association des femmes juristes (AFJ) a accueilli 20 cas de VBG contre les hommes sur un total de 772 cas en 2019. Les violences économiques dominent.
Dr Scholastique Rubarika, assistante médicale, qui accueille en premier les victimes décrit l’état dans lequel elles débarquent : une honte énorme surtout chez les hommes plus ou moins âgés qui ont subi un viol. La victime perd complétement son estime de soi. Il ne se sent plus « homme ». Il ne s’attendait pas le moins du monde à être violé. Ils croient que c’est l’affaire des femmes. Il est énormément traumatisé, suite au rapport anal, explique ce médecin.
Elle fait savoir que les hommes sont très réticents à demander une assistance. Par conséquent, les victimes arrivent tardivement, après le délai de protection contre les maladies sexuellement transmissibles, 48 heures. « Et quand on l’explique aux victimes, elles ont du mal à l’accepter. Sous le choc, ils veulent à tout prix avoir les médicaments alors que ce n’est plus possible».
Elle souligne un autre défi : « Il arrive que la victime vienne avec l’auteur ou sa famille. Ils se chamaillent au bureau, attendant de moi que je fasse la juge. Alors je ne suis là que pour soigner. Dans ce cas, nous sommes énormément désemparés.»
Dr Rubarika évoque aussi un manque de médicaments de temps à autre. De surcroît, il faut qu’elle soit éveillée 24h/24, car à tout moment, une victime peut débarquer.
Quid des causes ?
La psychologue Aline Shemezimana qui donne une assistance médicale explique que les enfants sont naturellement vulnérables. C’est pourquoi ils sont plus touchés par le viol. « Il est plus facile de corrompre moralement les enfants que les adultes. Par manque de maturité, ils acceptent car ils ignorent ce qu’ils font».
Pourquoi le viol sur les garçons ou les hommes ? Cette assistante psychologique explique que l’auteur veut découvrir comment fonctionne son corps. D’autant plus que dans l’éducation burundaise, la sexualité est un sujet tabou. Les parents n’osent pas en parler. « Puisque le garçon, au stade de la puberté, ignore comment fonctionne son corps, il ignore qu’il ne peut pas approcher un autre garçon». Et comme souvent les enfants de même sexe jouent ensemble, il lui sera facile d’explorer celui qui est tout près. Quand l’enfant grandit, ce comportement diminue.
Cette psychologue affirme qu’elle reçoit parfois des cas compliqués. Les victimes arrivent hyper traumatisées. Ils auront déjà développé un dégoût pour les hommes. « Même si je suis une femme, quand la victime voit que je porte un pantalon, ce seul détail l’empêche de me parler. Il a l’image d’un homme devant lui». Dans ce cas, le centre réfère la victime à un centre psychiatrique.
Mme Shemezimana confie que les victimes adultes sont souvent des domestiques, des taxis-vélos, des employés de restaurants… qui ont leurs familles loin en province et font la colocation.
Le centre Seruka a enregistré 1.475 cas de VBG en 2019, plus de 1200 sont des violences sexuelles.