Les 29 et 31 octobre, le ministère de l’Environnement, de l’Aménagement du territoire et de l’Urbanisme a démoli des constructions érigées dans des espaces public, parce qu’elles étaient illégales. Mais dans certains milieux et chez certains locataires de ces lieux, c’est l’incompréhension totale.
<doc1982|left>Le lundi31 octobre, en début d’après midi, des bulldozers envoyés par ce ministère, mettent à terre un bâtiment en construction dans la parcelle où se trouve le monument de l’Unité Nationale, dans le quartier Kiriri qui surplombe la ville de Bujumbura. Le chantier appartenait à Nahum Barankiriza, un homme d’affaires burundais, patron de la Tanganyika Business Company (TBC). Ce dernier n’avait pas présenté les documents l’autorisant à construire dans cet endroit. Il avait promis ces papiers, dès le samedi 29 octobre, au ministre Jean-Marie Nibirantije, quand ce dernier avait commencé la mise en application de l’acte de démolition.
Le même samedi, vers 10 heures, le ministre avait envoyé les
démolisseurs raser les minishops récemment implantés devant le Centre Islamique, au centre de la ville de Bujumbura. Le propriétaire serait un certain Mayondori, originaire de la province de Kayanza. Puis, trente minutes après, c’était le tour des fondations en construction dans les jardins du Monument de l’Unité Nationale. Une trentaine de policiers supervisait l’opération de démolition. Des autorités étaient présentes : le ministre Jean-Marie Nibirantije, son directeur général Jean-Bosco Nsabumuremyi, Jérôme Ntibogora, commissaire municipal, ainsi que… Nahum Barankiriza. Très décidé, le ministre insiste, avec force gestes, pour que les bulldozers creusent en profondeur. Il avait ordonné, le 24 octobre, l’interruption des travaux et la démolition des constructions déjà terminées. Des communiqués médiatiques avaient été diffusés dans ce sens.
Un concessionnaire étonné
Pour le directeur général au ministère en charge de l’urbanisme, Nahum Barankiriza était dans l’incapacité de présenter une lettre d’attribution en bonne et due forme, donnée par le même ministère : « La Mairie, précise-t-il, n’a pas les prérogatives d’octroyer une parcelle. L’acquéreur n’a même pas respecté les clauses de la convention qu’il a signée avec la Mairie. »
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Le directeur général à ce ministère dément les propos tenus par son prédécesseur, il y a à peu près une semaine, sur Radio Bonesha FM : « Ce dernier a affirmé que je suis le secrétaire de la commission municipale de l’Urbanisme, dirigée par le Maire de la ville de Bujumbura. Or, cette commission est présidée par le ministre de l’Environnement, de l’Aménagement du territoire et de l’Urbanisme et le Maire est un simple membre. » Une précision dans le but d’éviter que ses propos ne prêtent à confusion.
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Il est écrit, rappelle-t-il, qu’il ne s’agit que d’y construire en matériaux semi durables (paillotes). Et d’ajouter que le ministère doit décourager toute personne qui ne respecte pas la loi. M. Nsabumuremyi annonce également que des réunions seront organisées pour rappeler les compétences de chaque institution lorsqu’il faut construire en ville.
«Et pourtant, nous avions donné les plans de notre construction à la mairie et aux services de l’urbanisme qui étaient au courant du projet. Ce qui ne les a pas empêchés de venir démolir, sept mois après le début des travaux », s’étonne Nahoum Barankiriza. Cet homme d’affaires ne comprend pas les véritables raisons de cet acharnement, même si certains parlent de causes politiques. « Avant de construire, nous avons déplacé des tentes qui abritaient les militaires de la garde présidentielle, nous n’aurions pas pu oser le faire si nous ne pensions pas être dans notre droit », souligne M. Barankiriza.
Entre crainte et incompréhension
<doc1984|left>Nahoum Barankiriza passe pouvoir des entrées dans certains cercles du pouvoir. Mais il s’en défend et refuse de voir des mobiles politiques dans la démolition de sa maison. Et de toutes façons, observe-t-il, on ne devrait pas mélanger la politique et les affaires : « et je ne crois pas qu’une politique qui détruit une salle pouvant accueillir entre 1000 et 1200 personnes soit bonne pour les affaires », souligne M. Barankiriza. Il indique aussi qu’il n’aurait pas continué les constructions s’il avait su qu’elles étaient illégales. Car, explique encore le patron de la TBC, dans ses objectifs figurait également la mise en valeur du Monument de l’Unité, un symbole national qui peut également devenir un merveilleux site touristique, surtout du fait de la vue panoramique qu’il offre sur la ville de Bujumbura.
Nahoum Barankiriza avoue ne pas se sentir tranquille pour l’avenir, surtout qu’il ignore ce qui se cache derrière ces démolitions : « les services de l’urbanisme ont démoli sans pour autant annuler le contrat de location », précise-t-il. Et il se demande comment on peut appeler des investisseurs étrangers quand les biens des nationaux sont détruits ?
La question des contrats
Selon ce contrat, intitulé « Convention de gestion et d’exploitation d’un espace public », la mairie a accordé à Nahoum Baranikiriza l’espace public situé autour du Monument de l’Unité nationale pour en faire un site de loisirs. L’article 2 du contrat stipule que le concessionnaire ne peut construire en matériaux durables sur cet endroit, mais qu’il peut le clôturer en matériaux semi-durables. Le contrat stipule également que le M Barabkiriza peut libérer l’espace, chaque fois que des fêtes nationales sont organisées au Monument, sans frais de location. En signant le contrat de location, il a également accepté de garder le site historique, de l’entretenir avec ses alentours dans le strict respect des normes d’hygiène et de salubrité de nature à donner à cet espace un décor attrayant. Signée pour une durée de 20 ans, cette convention signée le 8 août 2010 exige le paiement d’un montant forfaitaire annuel de location de 2 millions de Fbu payable par anticipation à la caisse de la Mairie ; ce qui a été fait.