Samedi 23 novembre 2024

Politique

Uprona, l’entropie

22/05/2021 3
Uprona, l’entropie

Par Abbas Mbazumutima

Les héritiers légaux ou illégaux, légitimes ou illégitimes du prince Louis Rwagasore, le leader historique de l’Uprona, éparpillés aux quatre coins du Burundi et du monde, se querellent, s’entredéchirent, divergent sur tout.

Quelques couacs, voire quelques coups de bec au sein d’un parti politique ne sont pas exclus. C’est même le signe d’une certaine vitalité. Du choc des idées jaillit la lumière, dit-on… Mais quelquefois aussi des étincelles, même des explosions. L’Uprona a connu tout cela. C’est dans l’ADN de ce parti. Dieu seul sait combien de tribuns, certains d’ailleurs très brillants, de grandes «gueules », de rhéteurs, de discoureurs et de phraseurs, que l’Uprona a connus.

Des crocs-en-jambe, des peaux de banane, des trahisons, des conspirations, des intrigues, des coalitions, des cabales et des complots, ce parti a vécu tout cela. Et ce n’est pas pour rien qu’il a toujours rappelé à ses militants qu’ils doivent être des ‘’Badasigana’’, « ceux qui marchent au même pas ». Un idéal souvent oublié, trahi au gré des intérêts.

Mais aujourd’hui, le parti a franchi un autre palier. Les ténors du parti se donnent en spectacle, ils ne parviennent même plus à faire semblant pour accorder leurs violons, concilier leurs intérêts inconciliables, faire taire leurs appétits.

Car ce n’est pas une lutte pour l’idéal du Prince Rwagasore… Oui, il ne faut pas perdre de vue que l’ancien parti Etat, qui naguère ne tolérait aucune voix discordante, reste parmi les partis les plus riches. Terrains, immobiliers…

Cela crée des convoitises. En filigrane dans ce conflit, il est question de « vente de propriétés appartenant au parti » notamment. Officiellement, c’est pour ‘’subvenir aux besoins grandissants légitimes’’ de ce dernier. Les mauvaises langues disent que c’est plutôt dans l’intérêt de quelques apparatchiks… Et la lutte est féroce.

On assiste à des scissions, des éjections, le parti se voit pousser des ailes, non pour voler haut, mais pour plonger dans la fange, les schismes.
Libérés, tels des électrons libres, certains Badasigana se cherchent d’autres connexions.

En physique, cet éclatement de l’ordre porte un nom : l’entropie. C’est l’image qu’offre l’Uprona

Forum des lecteurs d'Iwacu

3 réactions
  1. Gacece

    Je doute que tous ces terrains, propriétés immobilières et autres richesses appartiennent légalement tous à l’Uprona. À l’avènement du multipartisme au début des années 90, le parti aurait dû recommencer à zéro comme tous les autres partis.

    En effet, le parti était un parti-État. C’est-à-dire que son financement, son budget de fonctionnement et sa gestion étaient sous la responsabilité de l’État.

    Il aurait alors fallu que toutes les propriétés immobilières (terrains et bâtiments) et mobilières (véhicules, motos, meubles, etc) soient soit retournés à l’État, soit liquidés et/ou vendus aux enchères pour renflouer les coffres de l’État. On ne parle pas de les vendre à l’Uprona puisque même ses avoirs liquides appartenaient à l’État.

    Je suggères que les avocats/procureurs et un magistrat de l’État fassent des vérifications approfondies sur ce qui s’est réellement passé lors du début du multipartisme. Est-ce qu’il y a eu une cession formelle de ces biens et avoirs à l’Uprona par l’État (décrets ou lois)? La cession était-elle légale aux yeux des lois de l’époque? Comment s’est faite la transition? Ces biens et avoirs ont-ils fait l’objet de clauses dans les différentes négociations qui ont eu lieu depuis le début du multipartisme. Y’a-t-il lieu d’imposer actuellement un moratoire sur la vente ou la cession de ces biens et avoirs en attendant la fin des vérifications?

    Évidemment, les biens et avoirs qui ont été acquis après le début du multipartisme ne seront concernés qu’après avoir établi et déterminé une date après laquelle on pourrait considérer que le parti avait une certaine indépendance financière grâce aux dons et cotisations de ses membres et ses sympathisants.

    Les seules biens qui pourraient être exclus de ces vérifications sont les emblèmes et les symboles du parti comme les drapeaux, logos, uniformes, casquettes,… Tout le reste doit y passer.

    Je ne crois pas que l’Uprona va disparaître à cause de cela!… des turbulences, ils en ont traversé et vu des pires!… Mais ceci pourrait aussi faire partie (et y contribuer positivement) du processus de réconciliation autant entre les Upronistes eux-mêmes, qu’entre les Burundais.

    À tout le moins, on pourra penser qu’ils se querellent pour des biens et avoirs légalement acquis.

    À bon entendeur… (c’était l’ouverture d’une parenthèse…

    Et si tous se donnaient rendez-vous pour siroter une bière à Kumugumya? C’est ridicule tout ça!… Ils se chamaillent pour un rien qui est tout et un tout qui n’est rien!… à bien y penser!

    … c’était la fermeture d’une parenthèse)… Salut!

  2. Rugwe Albert

    Le terme d’entropie est bien choisi même si il est difficilement applicable à l’ancien parti de Rwagasore.
    Il faut rappeler ici que « plus l’entropie d’un système est élevé, moins ses éléments sont liés et ordonnés pour produire un effet éventuel ». Il y a gaspillage de l’énergie et donc perte.

    L’ éclatement du parti de Rwagasore a produit des éléments très utiles au parti CNDD-FDD.
    De Rubuka à Gashatsi, le CNDD_FDD a eu le génie de trouver des hommes et des femmes à esprits rivés sur l’argent et disposés à vendre leurs consciences sur le marché des biens matériels. Ils sont toujours là. Ils se renouvelleront toutes les années jusqu’à l’extinction totale de ce parti, qui est très proche je vous le confirme.
    Albert

    • Yani

      Il y a des chances que l’extinction de ce parti n’arrive pas avant celle de son patrimoine.
      Aussi longtemps que le parti aura encore quelque chose qu’on peut dénicher (ou se mettre sous la dent), il aura des militants. Ceci étant dit, ce n’est pas la spécialité du seul parti Uprona.

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