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Uprona : le congrès de trop …

05/05/2013 Commentaires fermés sur Uprona : le congrès de trop …

Le congrès de Gitega a finalement eu lieu, après un feuilleton politico-judiciaire qui a tenu beaucoup de personnes en haleine. Aujourd’hui, l’Uprona a de nouveaux dirigeants, contestés par une partie des Badasigana. Le parti n’en est que plus fragilisé. Un reporter d’Iwacu a suivi le congrès.

<doc5251|right>En entrant dans la ville de Gitega, rien ne laisse présager qu’un congrès d’un parti s’y prépare, en ce dimanche 16 septembre, plutôt ensoleillé.

Les passants s’interrogent pourtant sur les véhicules aux couleurs du parti Uprona qui passent ici et là. Ce n’est qu’en arrivant à l’ancien emplacement du marché qu’on voit une banderole qui annonce la tenue du 4ème congrès ordinaire de l’Uprona au grand séminaire Jean Paul II de Gitega.

A l’entrée du séminaire, des militaires et des policiers sont sur les lieux depuis 3 h du matin, d’après un uproniste de Gitega. Dans la cour intérieure, des hommes et des femmes habillés aux couleurs du parti discutent sous les sons d’une fanfare qui massacre allègrement quelques chansons à la gloire du parti.

Les congressistes viennent par délégation provinciale, et forment des groupes où ils font des messes basses. Des groupes, plus restreints, à l’écart, discutent avec des airs de conspirateurs. D’autres upronistes, moins discrets, discutent à haute voix. « Arrêtez cette mascarade, je sais que vous avez l’injonction de voter pour Nditije », lance l’un d’eux. « Je suis assez grand pour faire mon propre choix », lui rétorque un autre. « Un hutu à la tête de l’Uprona, il ne manquait plus que ça. Vous avez vendu le parti de Rwagasore », martèle un troisième.

Après l’arrivée du premier vice-président de la République, les participants commencent à entrer par province en brandissant leur invitation, et après vérification sur les listes. Dans la salle, les congressistes sont également assis par délégation, à la demande d’André Ndayizamba, un des candidats au poste de président du parti, pour qu’ils soient moins influençables.

La salle est comble, les chaises ont été installées jusque dehors. Au-dessus de l’estrade, trône une banderole sur laquelle est écrite : « Vivez la réconciliation à l’école du Christ. »

Parmi les invités, les ambassadeurs de Russie et de Chine, ainsi qu’une représentante du Cndd-Fdd. Les diplomates, visiblement ennuyées, dans un congrès tout en kirundi, quitteront la salle peu après le début des activités.
Après la présentation du programme du jour, les participants ont chanté les hymnes du pays et du parti, suivi par la lecture du règlement régissant le congrès.

Le président sortant, Bonaventure Niyoyankana, a ensuite fait un discours-rapport de son mandat, dans lequel il n’a pas manqué de s’attaquer à ses adversaires, dans un kirundi imagé qui a suscité les rires de l’assistance et parfois les applaudissements du premier vice-président. Pour M. Niyoyankana, ceux qui ont reçu des invitations, mais qui n’ont pas participé au congrès, sont à la solde de certains partis qui veulent détruire l’Uprona.

<doc5254|right>Des candidatures réglées à l’avance

Après la lecture des amendements du règlement du parti par son vice-président, Concilie Nibigira, le président du parti a repris la parole pour présenter les candidatures. Il indique qu’une équipe composée de trois parlementaires et de 11 upronistes non parlementaires s’est penchée sur la question des candidatures, et s’est convenue sur une candidature unique d’un parlementaire, en la personne de Charles Nditije, un Hutu originaire de Bururi. « C’est pourquoi la candidature de Bonaventure Gasutwa a été écartée, mais il paraît qu’il aura la présidence du groupe parlementaire Uprona en échange », me murmure un congressiste. Niyoyankana a souligné que même les candidatures libres ont été acceptées, sans mentionner lesquelles. Demandant la parole, André Ndayizamba, un autre « bururien », mais Tutsi, a indiqué au public qu’il était l’autre candidat même si M. Niyoyankana semblait l’avoir oublié, ce qui a causé les rires de certains participants.

Les candidats se sont par la suite présentés eux-mêmes aux électeurs. M. Ndayizamba, en s’appesantissant sur son parcours, a insisté sur une gestion plus démocratique du parti. Quant à M. Nditije, il a uniquement parlé de son engagement dans le parti, en soulignant le besoin de discipline à l’Uprona. Toutefois, les deux candidats ont souligné la nécessité d’unir tous les upronistes. « La décision de la Cour Suprême a mis le parti dans le pétrin. Il faut gagner ce procès, ou alors que ceux qui ont déposé la plainte la retirent d’eux-mêmes », a indiqué le candidat Ndayizamba.

<doc5253|left>Quand la politique l’emporte sur la justice …

Le vote s’est déroulé par province et s’est terminé vers 17h20 sur la victoire de Charles Nditije avec 574 voix contre 243 pour André Ndayizamba, sur 842 votants représentant 18 provinces dont l’université du Burundi. Félix Mboneko et Gaston Sindimwo, candidats uniques, ont été respectivement élus à main levée aux postes de vice-président et secrétaire général du parti.
Il n’y a aucun doute : le congrès de Gitega a mis à jour les divisions internes au parti. Ndayizamba et ses sympathisants semblaient proches du courant de réhabilitation du parti. Il était clair qu’ils ne voulaient d’un candidat proposé par Niyoyankana et le 1er vice-président alors qu’aujourd’hui un changement dans le fonctionnement du parti est plus que nécessaire.

Rappelons que, avant la tenue du dit congrès, la Cour Suprême s’est prononcée en faveur des adversaires de la direction actuelle du parti, en invalidant les précédents congrès communaux et provinciaux, et en annulant l’exclusion de certains membres du comité central.

La décision de la Cour Suprême étant sans appel, le ministre de l’Intérieur, Edouard Nduwimana, a aussitôt interdit la tenue du congrès, avant de se rétracter 24 h plus tard, en arguant que la direction du parti a fait appel dans la chambre de cassation de la même cour. Il a précisé, cependant, que les organes issus du congrès ne seront reconnus qu’après le verdict de cette cour. Or, constate Me Anatole Miburo, avocat du courant de la réhabilitation du parti Uprona, le président du parti, Bonaventure Niyoyankana, n’avait pas le droit d’interjeter l’appel : « Au niveau de la chambre administrative de la Cour Suprême, qui a la spécificité de plancher sur les affaires administratives ou les litiges inhérents au fonctionnement des partis politiques, le premier jugement est aussi le dernier. » 
Comme nous l’avons indiqué dans notre édition précédente, la première vice-présidence et la direction du parti ont menacé de rompre le partenariat avec le parti au pouvoir si le ministre de l’Intérieur ne rectifiait pas son tir. Ainsi, la politique l’a remporté sur la justice, comme Gaston Sindimwo l’avait indiqué.

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