Vendredi 22 novembre 2024

Société

Université du Lac Tanganyika : l’odeur d’une « malversation »

23/02/2018 10

Des anciens étudiants à l’Université du Lac Tanganyika sont outrés par l’exigence de « payer doublement » pour obtenir leurs documents académiques. Le recteur évoque soit un détournement de fonds, soit l’incompétence d’une caissière.

Des anciens étudiants à l’ULT ont du mal à avoir leurs documents

La plupart sont de la toute première promotion du système BMD (Baccalauréat-master-doctorat). Ils ont terminé leur cursus, il y a plus de deux ans. Mais certains n’ont pas encore obtenu leurs documents académiques (attestation de réussite, bulletins, diplôme, etc.)

Depuis un certain temps, témoignent d’anciens étudiants, quand l’on cherche un document, les services habilités s’arrangent pour créer une irrégularité. « Soit tu n’as pas payé les frais de rapport de stage, les frais académiques, ou encore tu n’as pas la note d’un tel cours. Pas d’autre choix que de mettre de nouveau la main à la poche. »

Or, une question leur trotte dans la tête : comment un étudiant peut-il terminer tout le cursus, faire son stage académique et présenter le rapport de stage sans être en ordre ?

I.N. est un ancien étudiant en Finances et Comptabilité. Il a terminé son cursus « en bonne et due forme ». Il a même présenté son rapport de stage, depuis 2016. Quand il a réclamé son diplôme, l’université lui a dit qu’il n’a pas payé les frais de rapport de stage, à sa grande surprise.

Elle lui a exigé de présenter le reçu prouvant qu’il a payé les 225 mille Fbu. «Comment puis-je retrouver un petit bout de papier, deux ans après? Comment m’ont-ils autorisé à présenter mon rapport de stage, si je n’ai pas payé ? » Il signale qu’avant la défense, c’est la première chose que l’on vérifie.

Contraints de fouiller dans les archives…

Les archives où des étudiants sont contraints de chercher leurs pièces perdues.

F.I, même promotion, est un autre cas. Elle a commandé son diplôme, mais elle devait d’abord récupérer les bulletins. « Curieusement », elle apprend qu’il y a un cours de la 3ème année dont elle n’a pas la note. « Impossible, car, à la fin de l’année, lors de l’annonce des résultats, la note était affichée ».

Elle se voit contrainte de fouiller les archives pour chercher la copie. Mais elle n’a pas eu ce courage. « C’est le service le plus désordonné que j’ai jamais vu ! » Des milliers de papiers datant de plusieurs années traînent de toutes parts. Chaises usées, vieux ordinateurs y sont jetés…

Alors qu’il réclamait son attestation de réussite, un autre étudiant de la même promotion apprend qu’il n’a pas payé les frais d’inscription à l’université et les frais académiques de la 2ème année. « Je tombe des nues, car je suis sûr et certain que je suis totalement en ordre. » Et d’enchaîner : « Comment aurais-je pu terminer tout mon cursus, sans avoir payé l’inscription ? »

M.I, elle, a été reprochée d’avoir une dette de 135 mille Fbu représentant les frais académiques de la 3ème année. Elle a alors présenté son reçu de paiement et son problème a été réglé.

Entre malversation et incompétence

Le recteur de l’Université du Lac Tanganyika (ULT), Evariste Ngayimpenda, reconnaît ce problème. Comme explication, il avance deux hypothèses : détournement de fonds ou incompétence d’une employée. A cet égard, il pointe du doigt une caissière « distraite », « mal organisée » qui percevait l’argent. Mais il se réserve de donner son identité « avant la fin des vérifications ».

Il explique que jusqu’en 2016, les étudiants avaient deux moyens de payer les frais académiques : la banque ou la caisse de l’établissement. Mais la direction leur avait recommandé de payer à la banque, le moyen le plus sûr. Mais pour éviter de faire la queue à la banque, indique le recteur, certains préféraient recourir à la caisse. Et la plupart des étudiants lésés sont ceux-là.

Des reçus délivrés introuvables dans le carnet à souches, la falsification de la date de paiement… des magouilles qui sont en train d’être découvertes.

Le recteur de l’ULT évoque l’hypothèse d’une malversation

M. Ngayimpenda fait tout de même remarquer que les étudiants ont une part de responsabilité. Depuis 2012, ils ont eu l’ordre de garder jalousement les reçus ou toute autre pièce de paiement. C’est à partir du reçu, insiste un comptable de l’université, que l’on peut voir qui a perçu l’argent.

Toutefois, le recteur de l’ULT se veut rassurant : « Aucun étudiant n’est mis en difficulté. Mais un peu de patience pour certains… » Et de souligner que lorsque l’université est dans l’incapacité de prouver que l’erreur incombe à l’étudiant, ce dernier ne peut pas être pénalisé. « Si un étudiant demande un document et que cela prend du temps, histoire de clarifier certaines choses, je trouve ça normal. »

Forum des lecteurs d'Iwacu

10 réactions
  1. Cosmas Musafiri Mugongo

    Juste dire aux autorités administratives d’être compétent et de connaître leur rôle. Parce que je n’ai jamais su qu’un Etudiant qui défend sa thèse pourrait être privé de ses droits à cause du paiement hors les touts sont payés avant le stage.

  2. John

    Le principe dit que tout celui qui présente son rapport de stage et le défend devrait avoir payé tous les frais. Et on l’on sait et voit comment ils aiment l’argent (on le voit même à travers cet article, qui je crois, est fidèle à leurs dires). Donc aucun litige ne devrait survenir pour les frais de rapport de stage et tous frais antérieurs. Si litige il y a, possible uniquement sur les frais de retrait de diplôme et de bulletins. Et cela peut être réglé facilement, souvent c’est récent, donc facile à retouver soit chez l’étudiant, soit à l’Université. Le reste ne relève que de l’escroquerie organisée par l’Université, surtout que le recteur prends des positions déshonorantes, et pour lui-même et pour l’Université qu’il représente.

  3. Gacece

    Quand on cherche un document dans ces archives, n’a-t-on pas l’impression de faire une f(ou)ille archéologique?

    Et puis, qu’est-ce qu’un ancien étudiant a à pénétrer dans les archives d’une université?

    Normalement, la gestion des archives doit être confiée à du personnel compétent, bien organisé et ayant à coeur la confidentialité des documents dont il a la garde.

    Laisser entrer quelqu’un qui n’est pas membre du personnel, dans les archives, c’est exposer les documents s’y trouvant au vol, à la falsification, à la divulgation de leur contenu, à la substitution, à la destruction, etc, etc, etc.

    En regardant ces « archives » dans l’image ci-dessus, l’on peut se demander s’il ne serait pas presque criminel d’appeler cela des « archives »?

    Portez-vous bien!

  4. KABADUGARITSE

    … Et la caissière ne serait pas suivie !!! Et le rectorat n’aurait pas droit de regard sur ses finances!!! Drôle de comptabilité.-

    • Mugisha

      Si l’alternative politique que monsieur Ngayimpenda et ses amis de l’opposition interne et externe nous concocte pour le Burundi est à l’image du bureau des archives de son université, alors, laissez-moi rire pour mieux pleurer!

      • KABADUGARITSE

        Lol! Uranyishe !!!

      • Biragaragara

        Au moins lui il un stylo dans la poche et un autre sur la table, signe qu’il est intellectuel et pas un joueur

        • Mugisha

          Vois-tu une intelligence quelconque dans l’état du service des archives de cette université tel qu’on le voit sur l’image qui accompagne l’article? Moi non! Pourtant on nous rabat les oreilles à longueur de journée que le privé gère beaucoup mieux et est beaucoup plus efficace que le public. Encore une fois, si c’est cela l’efficacité alternative que Ngayimpenda et consorts sont en mesure de nous offrir  »pour faire mieux », laissez-moi rire pour mieux pleurer!

        • Znk

          Biragaragara, pour vous plus on a de stylos et plus on est intello. Ensuite intellectuel et joueur sont incompatibles. Là vous me rappelez un certain médecin Socrates Brasileiro qui était le capitaine de l’équipe nationale de football du Brésil dans les années 80 (qui nous a régalés nous les dinosaures). Un bon contre-exemple de votre affirmation.

        • John

          Depuis Micombero, il n’y avait que des intellectuels. Tout le monde connaît le résultat. Parfois on a plus besoin de sagesse que de diplômes.

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