Samedi 28 septembre 2024

Société

Université du Burundi : Une mesure saluée mais …

26/06/2024 3
Université du Burundi : Une mesure saluée mais …
Audace Manirabona : « Nous avons accueilli avec enthousiasme cette bonne nouvelle »

Dans une note présentée par le ministre de l’Education nationale et de la Recherche scientifique au Conseil des ministres du 12 juin 2024, l’Etat du Burundi envisage la redynamisation des homes universitaires ainsi que la gestion de la bourse et du prêt-bourse. Pour certains étudiants, cette mesure viendrait améliorer leurs conditions de vie. D’autres restent sceptiques quant à sa faisabilité vu la crise économique dans laquelle le pays est plongée.

Dans un communiqué sorti au terme dudit Conseil des ministres, Jérôme Niyonzima, secrétaire général et porte-parole du gouvernement, a fait savoir que la note retrace l’évolution de la situation à l’Université du Burundi depuis la création de la Régie des Œuvres universitaires en décembre 1984 dont les missions principales étaient notamment d’assurer le logement, la restauration, l’acquisition et l’entretien du patrimoine mobilier et immobilier de l’Université du Burundi.

Cependant, fait-il remarquer, avec l’accroissement incessant des effectifs des étudiants, l’Université a été progressivement amenée à réduire ses interventions telles que assignées dans ses missions.

« Au vu des moyens financiers lui accordés, l’Université du Burundi n’est plus à mesure de réhabiliter ses infrastructures, de s’offrir des équipements socio-académiques de qualité et d’assurer le service d’hébergement et de restauration », lit-on dans ce communiqué.
Et de déplorer que cela a eu comme conséquence la suppression totale des restaurants universitaires dans les différents campus et l’instauration du prêt-bourse.

Par ailleurs, ajoute le porte-parole du gouvernement, la note propose des pistes de redynamisation des services sociaux ainsi que des scénarii de rentabilisation du patrimoine de l’Université. Elle propose aussi l’implication du secteur privé.
« Après l’analyse, le Conseil des ministres a constaté que l’Etat a le devoir de s’impliquer dans l’éducation car c’est l’avenir du pays », précise-t-il.

Dans ce communiqué, le Conseil des ministres a recommandé de mettre en place une commission qui va proposer une stratégie de redynamisation du secteur de l’éducation avec la participation du secteur privé dans la construction et l’exploitation des internats et homes universitaires. Il a également été recommandé d’intégrer la majoration du prêt-bourse dans le budget 2024/2025.

Espoir et scepticisme

La mesure a été accueillie positivement par certains concernés tout en laissant nourrir du scepticisme chez d’autres.
Certains étudiants rencontrés apprécient en effet positivement la mesure du gouvernement de l’augmentation du prêt-bourse. Ils disent qu’il y aura une amélioration de leurs conditions de vie.

« Nous avons bien accueilli cette information parce que les conditions de vie dans lesquelles nous vivons actuellement sont déplorables. Nous espérons que la vie va changer. La restauration ici dans la ville de Bujumbura est chère. Nous éprouvons des difficultés pour nous restaurer et pour dormir. Nous remercions l’Etat d’avoir pensé à nous », disent-ils.

Ils évoquent l’insuffisance du prêt-bourse qui leur est accordé. Au regard de la cherté de la vie, déplorent-ils, la somme perçue à la fin de chaque mois ne leur permet pas de couvrir leurs besoins.

« Le prêt-bourse qu’on nous donne ne suffit pas. Et entretemps, les prix des denrées alimentaires ont augmenté. Les étudiants qui vivent à l’extérieur des campus souffrent énormément car en plus de la restauration, ils doivent payer le loyer »
D’autres étudiants restent sceptiques quant à la mise en application d’une telle mesure. Pour eux, la conjoncture économique n’est pas de nature à les rassurer. « Le gouvernement ne cesse d’annoncer des mesures salvatrices pour ses citoyens. Mais, malheureusement, la concrétisation dans les actes de telles mesures peine à se manifester ». Ils citent à titre d’exemple les promesses en rapport avec la situation des retraités, le dégel de annales et d’autres indemnités.

« Que l’Etat tienne sa parole. Ça serait une bonne chose pour nous. Mais, la crise économique dans laquelle le pays est plongée ne nous tranquillise pas », font-ils observer.

Les mêmes sceptiques fustigent les retards observés dans l’octroi du prêt-bourse. « Qu’il nous parvienne au moins à temps. Le retard dans l’octroi du prêt-bourse nous cause des ennuis. L’augmenter est une bonne chose, mais il faut qu’il soit octroyé à temps pour que nous puissions régler nos engagements à temps », demandent-ils.

Ces étudiants plaident aussi pour la réhabilitation et l’extension des homes universitaires vu le nombre sans cesse croissant des étudiants. A l’état actuel des choses, déplorent-ils, les homes sont délabrés et la plupart ne sont pas équipés.

Ils estiment que la suppression de la restauration des étudiants a eu des impacts négatifs sur la réussite académique avant d’espérer que la restauration et l’hébergement des étudiants, s’ils venaient de nouveau à être garantis dans les homes universitaires, ils pourront améliorer le taux de réussite.

La hausse du prêt-bourse ne suffit pas

Désiré Nisubire : « Le grand problème est que les étudiants éprouvent des difficultés liées à la restauration et au logement »

Pour le professeur Désiré Nisubire, président du Syndicat du personnel enseignant du Burundi, la question ne se situe pas au niveau de l’augmentation du prêt-bourse. Il faut plutôt améliorer les conditions de vie des étudiants. Le grand problème, fait-il savoir, est que les étudiants éprouvent des difficultés liées à la restauration et au logement.

« Est-ce que si le prêt-bourse est majoré, les étudiants vont-ils bien se nourrir et se loger ? Est-ce qu’ils ne vont pas continuer à vivre dans les quartiers lointains des campus ? Ne vont-ils pas éprouver de la peine pour rejoindre les auditoires compte tenu des contraintes de déplacement ? Est-ce qu’ils ne vont pas continuer à manger dans les petits restaurants des quartiers où la nourriture n’est pas généralement de bonne qualité ? », s’interroge-t-il.

Le professeur Nisubire demande à tous ceux qui prennent des décisions de se rappeler des conditions dans lesquelles ils ont étudié. Pour lui, ce sont justement ces bonnes conditions qu’il faut mettre en avant et pouvoir restaurer les étudiants.

Et d’inviter le gouvernement burundais à investir dans la restauration et le logement des étudiants afin de leur permettre de bien suivre leurs études. « Il faut que les subventions puissent être accordées aux privés parce qu’il ne faut pas ignorer que les services publics sont minés par la corruption. Et l’on sait comment les marchés publics sont octroyés », fait-il remarquer.

Compte tenu de la subvention obtenue de la part du gouvernement, fait-il observer, le privé va donc diminuer le prix. Ce qui pourra permettre aux étudiants de bien manger, de bien vivre et de bien se loger dans les homes universitaires.

« Le fait de vivre dans les homes universitaires n’est pas une question de bien vivre ou de bien se loger. C’est aussi une question d’accentuer le rapprochement social des étudiants pour qu’ils puissent vivre ensemble et penser ensemble, partager la vie ensemble et plus tard partager la vie professionnelle ensemble », souligne-t-il.

Pour ce syndicaliste, la mesure qui vient d’être prise par le gouvernement devrait passer par les instances habilitées à l’Université du Burundi
« Il faut que le ministère concerné approche tous les acteurs c’est-à-dire la direction de l’Université du Burundi, les enseignants ainsi que les étudiants pour discuter et arrêter ensemble les mesures à prendre afin d’améliorer les conditions de vie des étudiants », recommande-t-il.

La direction de l’Université rassure

« Nous avons accueilli avec enthousiasme cette bonne nouvelle. Nous avions soumis des doléances dans le sens de cette note. C’est une nouvelle qu’on attendait depuis longtemps. C’est un soulagement pour nous parce que les conditions dans lesquelles vivent actuellement les étudiants sont difficiles », se réjouit Audace Manirabona, recteur de l’Université du Burundi.

A propos des moyens, il fait savoir que le gouvernement burundais va fournir des efforts pour majorer le prêt-bourse. Ainsi, informe-t-il, le prêt-bourse va passer de 60 mille à 100 mille BIF pour les étudiants du baccalauréat et de 100 mille à 150 mille BIF pour les étudiants du master.

Du côté de l’Université, rassure Audace Manirabona, les services concernés vont essayer d’accélérer les procédures pour que les étudiants aient ce prêt-bourse à temps.

Concernant le logement, le recteur Manirabona tranquillise. « Il est vrai que nous n’avons pas les moyens suffisants pour pouvoir offrir les logements aux étudiants. Mais, comme le Conseil des ministres l’a recommandé, nous allons faire un effort pour que les partenaires qui sont capables d’offrir ces services puissent les rendre disponibles afin que les étudiants puissent avoir facilement les logements soit tout près du lieu des cours, soit dans l’espace de l’Université ».

Il fait savoir que c’est le système qui est déjà pratiqué dans les campus universitaires de Nyamugerera dans la province de Bubanza, Buhumuza dans la province de Cankuzo et au centre vétérinaire dans la province de Gitega.

Et de préciser que dans le cadre de la note, l’Université du Burundi va mettre à la disposition des partenaires qui sont capables, un terrain pour qu’ils puissent construire ces logements.

Du côté de l’Université, informe-t-il, une équipe est déjà en place tout en rassurant que d’ici peu les premières étapes vont commencer.
Il recommande aux partenaires de tout faire afin que ce projet qui est ambitieux et salutaire pour les étudiants soit réalisé dans les meilleurs délais.

Signalons que l’Université du Burundi, la principale université publique, a été créée en 1964. Elle compte actuellement environ 18 500 étudiants. Elle est entrée dans le système BMD (3-2-3) depuis la rentrée académique 2011-2012.

Forum des lecteurs d'Iwacu

3 réactions
  1. Jacques Habimana

    Mon humble proposition:
    1) Rehabiliter les homes (infrastructure):
    * remise en état des chambres d’étudiants
    *Si possible augmenter les effectifs de pensionnaires . Cecil implique la construction de nouvelles chambres et/ou le reaménagement des anciennes pour contenir plus d’occupants que prevu au depart. Dans ce denier cas , faire attention aux normes de genie civil, d’hygiène, environment , santé publique etc.
    *Doter chaque chambre ou groupe de chambres d’une cuisine équipée avec gaz de ville. (Je souligne ici GAZ DE VILLE parce qu’il faut quand meme passer ce pas; les habitants de Buja n’ont pas bcp d’années à survivre avec le makala de bois)
    3) Majorer le pret-bourse accordé aux étudiants
    4) Faire paryociper les collectivités locales (les communes)dans la prise en charge des étidiants de leur ressort. Ici , il faut d’abord donner aux communes les possibilités d’auto financement, qui de mon avis, devraient commencer par la session de curtains impots de contribuables de l’Etat(gouvernement) aux communes

    • NIYONKURU

      Comment un système qui chante l’éducation pour Tous peut subsister aux besoins des policiers, militaires et prisonniers mais n’est pas capable de le faire pour les étudiants ?

  2. Ndayikunda Léonidas

    Je suis très peiné de constater l’état de délabrement dans lequel se trouve la seule université nationale surtout pour y avoir passé quelques années avant de prendre le large en raisons des évéments malheureux que nous avons vécu.
    Il est plus qu’urgent pour les princes qui nous gouvernent de faire tout ce qui est possible pour réhabiliter cette institution. Il me semble que c’est la volonté qui fait défaut sinon ces homes universitaires auraient été réhabilitées depuis longtemps. C’est à mon humble avis l’une des priorités sur lesquelles le ministère ayant l’enseignement supérieur dans ses attributions devrait travailler.
    .

A nos chers lecteurs

Nous sommes heureux que vous soyez si nombreux à nous suivre sur le web. Nous avons fait le choix de mettre en accès gratuit une grande partie de nos contenus, mais une information rigoureuse, vérifiée et de qualité n'est pas gratuite. Nous avons besoin de votre soutien pour continuer à vous proposer un journalisme ouvert, pluraliste et indépendant.

Chaque contribution, grande ou petite, permet de nous assurer notre avenir à long terme.

Soutenez Iwacu à partir de seulement 1 euro ou 1 dollar, cela ne prend qu'une minute. Vous pouvez aussi devenir membre du Club des amis d'Iwacu, ce qui vous ouvre un accès illimité à toutes nos archives ainsi qu'à notre magazine dès sa parution au Burundi.

Editorial de la semaine

Le secteur de l’éducation peine à attirer

Le Burundi fait face à un sérieux manque d’enseignants. « Le ministère de l’Education a reçu l’autorisation d’engager 630 nouveaux enseignants, soit 5 par commune, sur les 12 000 demandés au gouvernement », a précisé le ministre lors des questions orales au Sénat, (…)

Online Users

Total 3 735 users online