L’université du Burundi est entrée dans le système Licence-Maîtrise-Doctorat (LMD). Étudiants et professeurs estiment que toutes les conditions n’étaient pas encore réunies. Les autorités universitaires assument.
<doc3248|left>« C’est toute une génération qu’on vient de sacrifier », se lamente Jean Claude Barutwanayo, représentant des étudiants de l’Université du Burundi. Il estime que les autorités de l’Université du Burundi se sont précipitées à entrer dans ce système, car l’insuffisance des ressources humaines et matérielles est tellement flagrante. Pour illustrer ses propos, il donne l’exemple du manque criant de professeurs, qui va s’aggraver cette année académique avec l’arrivée de 5.000 étudiants, alors que le plus grand amphithéâtre accueille un effectif de 250.
Même son de cloche du coté de l’Association des Professeurs de l’Université du Burundi (APUB). Egide Manirakiza, son président, parle aussi d’un système mal conçu, mal préparé avec d’effectifs pléthoriques d’étudiants surtout dans la Faculté des Sciences où un professeur se retrouve devant presque mille étudiants dans une salle. De même, il affirme que les professeurs n’étaient pas suffisamment préparés, qu’il fallait des séminaires pour donner de plus amples explications sur le nouveau système : « On a consulté seulement les chefs de département et les doyens des facultés. Il fallait des séminaires ou des rencontres pour que les autorités de l’université et le corps professoral aient la même vision sur ce système. »
Le niveau de formation va chuter
A la différence de l’ancien système, le professeur donne les travaux dirigés nécessitant la présence d’assistants pour l’aider à encadrer les étudiants. Pourtant, les autorités de l’UB ont seulement prévu d’en recruter 20, ce qui fera un par faculté : « Normalement, un assistant peut se charger à la limite de 50 étudiants. »
Cet empressement aura des conséquences désastreuses, selon le représentant général des étudiants : baisse du niveau de formation, une mauvaise productivité, moins de compétitivité et hausse du taux d’échecs. De plus, les conditions de vie n’étant pas bonnes dans les campus, avec l’arrivée de nouveaux étudiants, Jean Claude Barutwanayo pense que la situation va s’empirer : « Plus de 80% d’étudiants viennent de la campagne. Il faudrait majorer la bourse, agrandir les restaurants et construire d’autres infrastructures. Tout cela demande beaucoup de moyens. »
Marie Josée Bigendako, directeur des services académiques de l’UB ne nie pas l’existence de difficultés, mais estime que ces inquiétudes sont liées à la peur du changement et au négativisme : « C’est un processus qui va être complété au fil du temps. Si on avait attendu que tout soit en ordre, on n’aurait jamais commencé. Nous étions déjà en arrière par rapport aux autres pays de la sous-région. Nous sommes conscients qu’il y a toujours des défis à relever. »
La location des salles de cours est envisageable
Face au manque de professeurs, l’université va recourir aux professeurs visiteurs grâce aux relations bilatérales. Par ailleurs, Marie Josée Bigendako se réjouit que maintenant la plupart des doctorants, à la fin de leurs études, rentrent au bercail.
Quand au problème d’infrastructures académiques, le directeur académique fait savoir que les locaux de l’UB (campus Kamenge, Kiriri, Mutanga et l’ENS) vont être gérés dans leur ensemble : « Si le besoin se fait sentir, la location est envisageable. Cette année, parmi les 6000 lauréats, nous avons accueilli 4619 dans notre institution alors que l’année précédente, ils étaient autour de 3000».
Pour ce qui est de l’outil informatique, elle indique que la connexion internet a été renforcée. Sauf le campus Zege (Gitega), les autres ont une connexion à haut débit avec plus 500 ordinateurs dans les salles d’étudiants, conclut le directeur académique de l’UB.
Même volontarisme ailleurs …
L’université du Lac Tanganyika vient aussi d’entrer dans le système LMD avec l’année académique 2011-2012. Ayant les mêmes difficultés que ceux de l’Université du Burundi, Evariste Ngayimpenda, Recteur, indique qu’il n’était pas question de reculer : « Nous n’étions pas prêts. Mais, mieux vaut affronter les difficultés que d’attendre. »
La stratégie de faire face aux difficultés notamment liées à la disponibilité du personnel enseignant en quantité, le manque du matériel informatique et bibliothèque est la même : « Comme c’est la première année, la phase expérimentale, nous allons les résoudre progressivement. » De ce fait, un suivi régulier des enseignements, aussi une amélioration progressive de l’équipement en informatique de telle façon que les étudiants puissent accéder de manière rotative à l’outil informatique (80 ordinateurs pour un effectif 2.200 étudiants pour le moment), avec une connexion internet, sont envisagés pour que le nouveau système soit une réussite.