L’histoire ancienne et récente montre que la force d’une rébellion, quelle qu’elle soit, tient en grande partie dans sa capacité de communiquer, d’expliquer pourquoi elle a pris les armes, bref de susciter l’adhésion populaire à son projet. Souvenez-vous, près de nous, du FPR avec sa station radio « Muhabura », des sorties presque quotidiennes du Cndd-fdd encore dans le maquis sur BBC « Gahuzamiryango », on pourrait multiplier les exemples…
Si aujourd’hui on faisait un sondage en demandant aux citoyens quelle rébellion a pris les armes au Burundi, et pourquoi, ils auraient toutes les peines du monde à répondre.
La rébellion burundaise – si rébellion il y a – peine à s’identifier, à s’affirmer. En dehors de quelques tracts jetés ci et là, et des interviews sur le web où finalement on n’apprend pas grand-chose, apparemment personne n’a envie ou le courage d’assumer la lutte. Sur la toile justement, la guerre du web fait rage : un certain Rukundo du « Fronabu Tabara » affirme qu’il est seul sur « le terrain », contestant les propos du « MNB qui affirme coiffer politiquement ces groupes »…
Passons maintenant du côté de l’opposition : motus et bouche cousue chez Agathon Rwasa en exil depuis de longs mois, sur place Léonce Ngendakumana affirme inlassablement que l’ADC-Ikibiri a pris l’option de la lutte politique, Alexis Sinduhije soutient dans une carte blanche sur {www.iwacu-burundi.org} que « son parti ne sera jamais un parti de guerriers »… Au bout du compte, force est de constater qu’aucun leader de l’opposition ne se reconnaît finalement dans cette rébellion.
Ce que je vais dire ici va susciter des critiques acerbes dans certains milieux. On va me taxer de » rouler pour le gouvernement » mais je vais quand même dire ce que beaucoup pensent de plus en plus : nous sommes face à une rébellion atypique. Cette situation oblige beaucoup plus les médias à l’analyse. Les journalistes ne peuvent échapper à une réflexion critique dans leur mission d’informer sous peine d’être instrumentalisés par un mouvement dont personne ne réclame la paternité, avec un projet de société inconnu. Oui, continuer à informer, même sur cette rébellion, mais plus que jamais prendre du recul.