Une jeune femme de 27ans est décédée vendredi 26 octobre 2012 à l‘hôpital Prince Régent Charles. Sa famille crie à une négligence médicale. Au directeur de l’hôpital d’estimer que « la responsabilité de l’infirmière incriminée n’est pas encore établie ».
<doc5836|left>Christine Niyogushima était femme de ménage au chef lieu de Rumonge. Originaire de cette même commune, elle a subi une opération d’hernie, dans l’avant midi du jeudi 25 octobre 2012, à l’hôpital Prince Régent Charles. Le lendemain de l’intervention, sa sœur, Esperine Kabura, affirme qu’elle se portait bien, qu’elle se rétablissait : « L’après-midi, elle s’est reposée. Au début de la soirée, elle a pu marcher un peu et a même pris son bain. Son opération était une réussite. » Mme Esperine est persuadée que la mort de sa sœur n’est pas naturelle, mais qu’elle est victime d’une négligence médicale : « La responsable est l’infirmière qui était de garde ce soir là. »
La veille de la mort de Mme Niyogushima, Esperine Kabura s’est rendue dans la salle d’infirmerie pour avertir l’infirmière de garde que la poche de sérum est presque terminée. L’infirmière lui répond qu’elle va venir. Elle retourne au chevet de Christine. Une heure passe. Personne ne vient. Elle y retourne. Et l’infirmière la rabroue : « Je sais ce que j’ai à faire. Laisse-moi tranquille.» Elle repart. Les heures passent. Elle raconte n’avoir pas osé y retourner par crainte de l’infirmière. Quatre heures après, ne pouvant plus rester les bras croisés, Mme Esperine retourne encore à l’infirmerie. Il était 1heure du matin. Ce n’est que tôt le matin, avant que sa remplaçante n’arrive, qu’elle est venue voir la patiente.
10 heures sans être perfusée
7heures30. L’infirmière arrive, enfin. Elle s’affaire et appelle de l’aide. Le médecin traitant et d’autres infirmières viennent et administrent des médicaments. Mais l’état de santé de Christine ne s’améliore pas. « Je les regardais parler entre eux. Ils avaient un regard grave. J’ai eu la certitude que ma sœur était dans un état critique. Pourtant, cela n’a pas empêché l’infirmière de rentrer chez elle», s’indigne Mme Kabura. A 10 heures, Christine Niyogushima a rendu l’âme. Elle a passé plus de 10 heures sans être perfusée alors que rien ne l’en empêcher. Sa famille compte saisir la justice pour négligence médicale, mais avoue ne pas savoir comment s’y prendre.
Pour le directeur de l’hôpital, il est prématuré d’affirmer que la jeune femme est morte à cause d’une négligence médicale. « Un décès peut survenir pour plusieurs facteurs », explique-t-il. Selon lui, l’établissement hospitalier a adressé une demande d’explication à l’infirmière incriminée par la famille de la défunte. Il indique que ce sont les enquêtes qui prouveront s’il y a eu ou non négligence médicale. Et cette infirmière, pour le moment, vaque à ses activités quotidiennes.
Pour Moise Ntiburuburyo, défenseur des malades, ce cas ne fait que confirmer ce que son association dénonce depuis des lustres : « Nous avons toujours affirmé que les malades sont souvent victimes de négligence médicale. Mais les autorités prennent ce problème à la légère. »
Des plaintes se heurtent à la solidarité négative du personnel soignant
Pourquoi alors rares sont ceux qui portent plainte ? Selon M.Moise, il est difficile de savoir les droits de celui qui estime être victime d’une négligence. En outre, il indique que les articles 482, 293, 225 du code pénal peuvent être utilisés, mais il est difficile de réunir toutes les pièces à conviction.
Il souligne aussi la difficulté de prouver la responsabilité d’un médecin ou infirmier, car souvent, les plaignants se heurtent à la solidarité négative des collègues : « Ils n’osent pas dénoncer un collègue. Alors le plaignant a besoin de preuves.» L’autre obstacle est qu’au Burundi, il n’y aucun médecin légiste. »
Par ailleurs, le rang social du plaignant importe : « Si ce cas était survenu sur un membre d’une famille aisée ou parent d’une haute autorité du pays, je suis certain que les choses se seraient passées autrement », précise le défenseur des droits des malades. Il indique que cette affaire ne sera pas étouffée, qu’il compte aider la famille de Mme Niyogushima à chercher un bon avocat, car il ne faut plus que « les négligences médicales restent impunies. »