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Une heure dans la misère de Mpimba

09/06/2011 Commentaires fermés sur Une heure dans la misère de Mpimba

Des magistrats ont visité ce 6 juin la prison centrale de Mpimba pour se rendre compte de la situation carcérale dans le cadre d’une plaidoirie pour l’application des mesures et peines alternatives pour les prisonniers…

Vers onze heures du matin, les visiteurs arrivent à Mpimba: une dizaine de magistrats des Parquets et des Tribunaux de Grande Instance de Bujumbura Mairie et de Bujumbura, ceux de la Police Judiciaire ainsi que les représentants de l’USAID sont accueillis par le directeur adjoint de la prison. Petite discussion avec les policiers, qui exigent auparavant que les visiteurs laissent à l’entrée leurs téléphones mobiles, avant de céder. La visite, organisée par l’ ABDP-DRS (Association Burundaise pour la défense des droits des prisonniers – Dignité et Réinsertion sociale, s’étendra aux chambres et recoins des 11 ‘quartiers’ de Mpimba. Tous les corridors menant dans les chambres servent aussi de dortoirs aux prisonniers. Un des corridors, le plus large, est plein d’eau de couleur noirâtre. Par terre, des matelas pour dormir : la place devient étroite. Dans les chambres des hommes, on dort à même le sol. Certaines chambres ont 38 lits superposés pour plus de 200 prisonniers, avec une seule latrine. Des cris des prisonniers alertés par la présence des juges fusent : « Abo ntaco badufasha ni bo badufungishije ! »- Ils ne peuvent pas nous aider car ce sont eux qui nous ont fait emprisonner…

72% des prisonniers sont des prévenus, le reste des condamnés

« Je mène une vie de misère, je dors par terre et je tombe souvent malade. Plus de 2.000 prisonniers n’ont pas de place où dormir », raconte Claude Birikunzira, ancien élève arrêté le 28 décembre 2007 à Gatumba. Accusé d’avoir volé une chèvre, il n’a jamais comparu devant le juge. Rappelons que la prison de Mpimba, c’est 3.513 prisonniers alors qu’elle devrait accueillir 800 prisonniers. Plus 72% des prisonniers sont des prévenus, les 23% restant des condamnés…
Sur le terrain de basket et dans la cours de la prison, on dort à la belle étoile. Même quand il pleut. Quelques rares prisonniers profitent de vieilles tentes. Un peu plus loin dans un coin, un homme est tout heureux d’avoir trouver sa ration de la journée. Il est entrain de cuire des rats. Chaque prisonnier, sexe et âge confondu, reçoit 350g de farine et 350g de haricots par jour sans huile ni sel. Vu les mauvaises conditions de incarcération, vaut mieux se verser dans la lecture de la Bible. « Avec l’aide de Dieu, je sortirai de cette prison », espère un jeune prisonnier rencontré dans un des corridors entrain de lire un passage dans Exode parlant de la libération des Israéliens en Egypte…

Arrêtée le 3 mai 2010, elle n’a jamais comparu

Dans le quartier des femmes, en plus de 120 prisonnières, 27 nourrissons pleurent, dorment, jouent, tous nés à Mpimba. Tous ce monde se partage une toilette et une douche, très mal entretenus. Il y a aussi des mineures. Exemple, Evelyne Nkeshimana, 17 ans, accusée d’avoir tenté de tuer son bébé car son soit-disant père ne voulait pas le reconnaitre. Arrêtée le 3 mai 2010, elle n’a jamais comparu.
Bien protégés pour ne pas se faire agresser, la visite se prolongera pendant plus d’une heure, aux cris de « Laisse-moi un peu d’argent pour manger! » qui résonnent le long des couloirs. Une main s’accroche à mon poignet, on me demande le bracelet que je porte. Refuser serait d’un tel poids que je le laisse sur le champ. On va vendre le nouveau bien dans le petit marché qui se trouve à l’intérieur de Mpimba, pour pouvoir acheter à manger ou du savon.
Pour Claudine Kaneza, magistrat au Tribunal de Grande Instance, les conditions d’incarcération sont insupportables : « Ils sont trop nombreux, les mineurs doivent aller dans des centres de rééducation pour une meilleure réinsertion. » Claudine trouve que ceux qui se sont bien conduits ou qui ont commis des délits doivent bénéficier des libérations conditionnelles ou des mesures et peines alternatives. « Le principe est dans la libération, l’incarcération est l’exception », ajoute-elle. A quand la mise en application ?

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