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Une CVR sans Nations Unies est-elle possible ?

05/05/2013 Commentaires fermés sur Une CVR sans Nations Unies est-elle possible ?

En mettant en avant le pardon et en reléguant la justice au second plan dans le processus de la CVR, le gouvernement burundais s’oppose à la communauté internationale représentée par les NU. Pourtant, il semble qu’il ne peut écarter totalement ce partenaire.

<doc6756|right>Dans la dernière interview exclusive accordée à Aloys Batunganwayo (Iwacu n°201), le président de la République n’a pas été clair à propos de la justice après la CVR, une des exigences de la communauté internationale, notamment les NU. Pourtant, il apparaît que c’est un partenaire incontournable dans ce processus car le Burundi ne peut ni supporter seul le coût matériel, ni assurer la technicité, si du moins le pouvoir veut le rendre crédible.

Les NU et le gouvernement burundais ont une approche opposée au sujet de la justice après la CVR. Alors que le pouvoir de Bujumbura semble privilégier le pardon, les NU ont une position arrêtée contre ce qu’elles qualifient de crimes inamnistiables. Le 19 décembre 2011, le Haut Commissariat des Nations Unies aux Droits de l’Homme a signifié au ministre des Relations Extérieures que les NU sont contre toute amnistie pour les crimes de génocide, les crimes de guerre, les crimes contre l’humanité et les crimes de violence sexuelle ou les violations graves des droits humains. Dans cette correspondance, le HCDH a également souligné que la commission n’a pas le droit de recommander le pardon au profit des présumés auteurs de ces crimes, puisque le pardon ne peut pas empêcher les poursuites judiciaires.

Pardon ou justice ?

Dans les négociations entre le gouvernement et les NU, il n’y a pas eu d’ambigüité sur la question de l’inamnistiabilité du crime de génocide, des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité. La CVR devrait ainsi être capable d’enquêter et d’établir les responsabilités individuelles dans les cas de violations massives et systématiques des droits de l’homme et du droit humanitaire que constituent les crimes de guerre, le crime de génocide et les crimes contre l’humanité. Dans son optique de réconcilier les Burundais, elle doit non seulement faire en sorte que les responsables reconnaissent leur responsabilité, mais aussi que les victimes se libèrent suffisamment du passé pour se tourner vers l’avenir.

Car, une vérité établie objectivement, mais qui ne serait suivie d’aucune conséquence, est dangereuse. Elle confirmerait le sentiment d’impunité de ceux qui échapperaient à l’action de la justice, les incitant à se croire au-dessus de la loi et à récidiver. Ipso facto, justice et paix doivent coïncide r à terme, car il n’y a pas de véritable réconciliation sans justice.

Des NU incontournables ?

En 2005, l’ONU a accordé son soutien à la création d’une CVR au Burundi, « encouragé par la décision des autorités burundaises d’accorder la priorité à la réconciliation et de mettre fin à l’impunité qui constituent deux facteurs déterminants pour l’instauration d’une paix durable ».

Selon le président de la République, le Burundi est capable de financer le processus de la CVR et de se l’approprier, sans y inclure la communauté internationale sauf pour la consulter. C’est dans ce sens qu’un milliard de Fbu ont été disponibilisés. Les NU et certains partenaires internationaux risquent de se retirer du processus si les normes internationales ne sont pas respectées. Et, quand bien même l’Etat burundais serait capable de financer la CVR, il a besoin d’une assistance technique compétente et expérimentée.

Souveraineté d’accord, mais…

Il est vrai que le Statut de Rome garantit la souveraineté des Etats et leur compétence à juger les auteurs de crimes graves, pour lesquels serait compétente la justice internationale.
La Cour Pénale Internationale se saisit d’une affaire si l’Etat en question n’a pas la volonté ou la capacité de juger lui-même les auteurs des crimes allégués. De plus, l’article 20 du Statut de Rome consacre le principe « non bis in idem », en vertu duquel nul ne peut être jugé deux fois pour le même crime. La seule limite à ce principe est le comportement frauduleux ou le déni de justice. En ce cas, la CPI peut rejuger une personne si un procès national a eu pour but de la soustraire à sa compétence ou n’a pas été mené de manière indépendante et impartiale. Et au Burundi, outre le fait que le pouvoir semble oublier le volet justice après la CVR, il y a fort à parier que, quand bien même il s’en souviendrait, les jugements rendus risqueraient de provoquer l’intervention de cette communauté internationale qu’on veut ignorer.

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