Dimanche 30 mars 2025

Editorial

Une crise de trésorerie à l’EALA qui en dit long

21/02/2025 3

Une crise financière contraint l’Assemblée législative de l’Afrique de l’Est (EALA) à suspendre ses activités pour le premier semestre de 2025. La décision a été prise le 6 février. Hélas, cette suspension législative semble récurrente dans cette institution censée promouvoir l’intégration régionale par la législation, la surveillance et la représentation au niveau de la Communauté d’Afrique de l’Est, l’EAC. La grave crise de trésorerie est due aux retards des contributions des États membres de l’EAC. À titre d’exemple, à la fin de 2022, le Soudan du Sud accusait une dette de plus de 22 millions de dollars en cotisations impayées. Je ne me limite que sur ce pays…

Les contributions irrégulières de la part des États membres affectent aussi d’autres activités essentielles. Comment couvrir tous les pays membres pour sensibiliser une population d’environ 300 millions sur l’intégration ? Seraient-elles également à l’origine de la réduction des plénières de l’EALA ? Une députée n’a pas mâché ses mots en décrivant la situation : « Nous ne tenons que quatre plénières par an. Une plénière dure 14 jours. Cela veut dire que nous ne travaillons que 56 jours par an. Pourtant, nous sommes payés pour toute l’année. Nous disons non, nous sommes là pour travailler ». Les États ayant des arriérés de paiement pourront-ils régulariser rapidement leur situation afin de permettre la reprise des activités ?

A contrario, certains analystes estiment que la situation risque de s’enliser. En effet, avec la guerre à l’Est de la République démocratique du Congo (RDC), il y a lieu de s’inquiéter sur l’avenir de l’EALA, et par ricochet de toute la Communauté d’Afrique de l’Est. De mémoire, alors que la situation n’était pas aussi tendue qu’aujourd’hui, les députés de la RDC se sont abstenus de participer à l’assemblée générale de l’EALA à Kigali, du 23 novembre au 7 décembre 2023.

La guerre met à genoux le développement non seulement de la RDC, mais également de toute l’EAC. Aucun essor économique n’est possible dans un environnement conflictuel. La situation sécuritaire précaire dans les provinces orientales a des répercussions directes sur les échanges commerciaux transfrontaliers. Le journal Iwacu vient de faire un reportage au marché très fréquentés par les Congolais, communément appelé Chez Sion. Les activités sont à l’arrêt, ou presque.

Au-delà des impacts directs sur le commerce, les divergences de vues entre les Etats membres de l’EAC sur la crise à l’Est de la RDC et l’évolution rapide de la situation sur le terrain ne sont pas de nature à pallier cette crise de trésorerie à l’EALA. D’après un analyste des relations entre Etats, les tensions diplomatiques qui se multiplient au sein de la Communauté, les accusations mutuelles de soutien aux groupes armés et d’ingérence dans les affaires intérieures compromettent des projets d’infrastructure communs essentiels à l’intégration économique.

La Communauté d’Afrique de l’Est dont dépend l’EALA est en danger. Chaque minute est cruciale. Mais tout n’est pas perdu, il y a encore à espérer. Comme le martèle le cardinal congolais Ambongo, le dialogue est le maître mot « même avec ceux que nous considérons comme nos ennemis ». Je fais mien l’avis de l’analyste : « La survie du projet d’intégration Est-Africaine dépendra de la capacité des Etats membres à transcender leurs différends pour privilégier leurs intérêts communs. »

Forum des lecteurs d'Iwacu

3 réactions
  1. Maningo Claude

    « À titre d’exemple, à la fin de 2022, le Soudan du Sud accusait une dette de plus de 22 millions de dollars en cotisations impayées. Je ne me limite que sur ce pays… »
    M. l’éditorialiste, pouvez-vous nous dire si le Burundi est en ordre en cotisations dans l’EAC. Si non, combien doit-il à la Communauté. L’enfer, c’est l’autre…

  2. Fofo

    Il y a de l’hypocrisie dans l’EAC. Comment les pays peuvent décider d’agresser une autre jusqu’à détruire une ville touristique et commerciale comme Goma pourtant qui était leur plus grand marché de la région. C’est l’immaterisme ! En tout cas, au-delà d’être horrifié de ce qui se passe dans l’Est de la RDC, je suis totalement déçu de voir un dirigeant pourtant leader d’un marché commun et d’une zone libre échange en Africains décide de tout jeter dans l’eau juste pour satisfaire les intérêts obscurs. Les USA viennent de restreindre leurs ressortissants l’accès à tous les lieux touristiques. Quel impact sur l’activité touristique !

  3. Jean Pierre Hakizimana

    Merci Mr Léandre Sikuyavuga

    Honnêtement, peu de Burundais s’inquiètent pour ces « big cats » qui travaillent a EALA. Je vous explique pourquoi. Le Burundais vis du jour au jour. De plus en plus, il se réveille sans savoir ce que le jour lui réserve. Je sais que vous le savez.

    Il y a quelques jours, avec cette avancée phénoménale de M23, j’ai pensé à toutes les frontières de la RDC avec les Burundi qui seront contrôlées par Le M23. Uvira est tombé sous le M23 n’est ce pas? Vue la vitesse avec laquelle Le M23 avance, il serait pas injuste de douter de la performance des soldats Burundais envoyés aider les Wazalendo! Je ne sais même pas si la RDC a une armée.

    Clairement, la RDC est tjrs le Zaire.

    Si j’ai bien compris, le peu d’essence/mazout que les gens de la Capitale Burundaise utilisait venait de la RDC. la même année chose pour le $ car presque tous ces regions prises fonctionnent qu’avec le US $. le system informel mais, toute fois qui fini par filtrer dans l’économie formelle soit au Burundi. Si je suis Tchisekedi, pourquoi est ce que je payerai president Neva pour les soldats qu’il m’a envoyés? Après tout le M23 sont entrés dans la RDC comme si ils venaient dans un picnic. Alors la conclusion serait que Le M23 va asphyxier l’économie de Bujumbura en premier, puis du Burundi.

    Comment est ce que le CND-FDD a pu tourner le Rwanda en ennemie? Et surtout pourquoi choisir la RDC dans ce conflit? Je demande parce que je n’arrive pas à comprendre. Nous parlons pratiquement les mêmes langues, avec presque la même culture, nous avons historiquement échangé nos réfugiés qui sont arrivés au pouvoir après les évènement de 1994. Donc ces deux gouvernements ont tout pour travailler ensemble.

    Quelqu’un peut, stp, m’expliquer pourquoi le CND-FDD a choisi la RDC?

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