Samedi 23 novembre 2024

Économie

Une bouffée d’oxygène pour la BRB

La mesure obligeant les ONG et autres opérateurs économiques à loger leurs devises à la Banque centrale a été un peu bénéfique pour cette dernière bien qu’elle ait déclenché la fuite d’une certaine quantité de devises vers les pays voisins.

Faustin Ndikumana : «Cette mesure a été une bouffée d’oxygène pour la BRB.»
Faustin Ndikumana : «Cette mesure a été une bouffée d’oxygène pour la BRB.»

«Cette mesure a été une bouffée d’oxygène pour la BRB», indique Faustin Ndikumana, président de la Parcem. En invitant les ONG internationales et locales à loger leurs comptes en devises à la Banque centrale, poursuit-il, c’était une façon de cette dernière d’avoir une mainmise sur cette quantité de devises. «C’est une gestion des devises dans un contexte de rareté de ces dernières. Cela permet à la BRB de décider de son orientation par rapport aux besoins urgents. »

Pour Faustin Ndikumana, c’est la BRB qui a gagné. «Les grandes perdantes sont plutôt les banques commerciales avec cette mesure.» Et d’expliquer qu’aujourd’hui, la Banque peut décider, pour l’intérêt de la nation, de régler les factures liées à l’importation des produits stratégiques en l’occurrence le carburant, les médicaments, les engrais chimiques,… «Contrairement aux banques commerciales qui ne distinguent pas les produits stratégiques et les autres et qui paient comme toute entreprise commerciale qui doit faire des profits.»

Toutefois, le président de la Parcem trouve que cette mesure a lamentablement réduit la marge de manœuvre des banques commerciales. «A ce niveau, ça limite la possibilité des importations à payer spontanément leurs fournisseurs étrangers. Ce qui jette un discrédit sur la capacité de l’économie burundaise par rapport à ces derniers.»

Et la fuite des capitaux?

D’après la BRB, la mesure prise a été bien respectée grâce à la collaboration entre la Banque centrale et les banques commerciales. « Elles ont travaillé ensemble pour exécuter cette mesure gouvernementale régie par la loi numéro 1/22 promulguée le 31 décembre 2015.»

Toutefois, des sources indiquent que certaines ONG ont préféré exporter leurs devises dans les pays de la sous-région. La BRB est pointée du doigt. «Nous accusons un manque à gagner très énorme car la Banque centrale échange les devises sur un taux très inférieur par rapport à celui pratiqué sur le marché.», confie un cadre d’une ONG.

M. Ndikumana reconnaît que certaines organisations seraient tentées de transférer leurs deviser à l’étranger afin de garder une liberté sur une partie de leurs devises. «Qu’on le veuille ou pas, il y a une partie des devises qui doit rester au pays notamment pour payer les salaires, le loyer ou les autres activités comme les ateliers de formation.» Et la BRB contrôle cet argent ce qui n’était pas le cas auparavant.

Un autre grief contre la BRB est sa «lenteur» pour rendre disponible les devises à sa clientèle. Faustin Ndikumana trouve cela normal dans un contexte de pénurie. Selon lui, la Banque centrale doit maintenir le cap pour financer les produits stratégiques et ceux qui veulent importer par exemple les matériaux de construction ou les friperies doivent se débrouiller autrement. «Imaginez si on laissait les importateurs du carburant payer leurs importations à partir de la valeur réelle du marché, les prix exploseraient.», conclut Faustin Ndikumana.


Pas de solution pour parer au plus pressé

Presque pas de solution à très court terme pour renflouer les caisses de la BRB en devises.

Antoine Muzaneza : « Le gouvernement devrait s’endetter auprès des institutions de Bretton Woods. »
Antoine Muzaneza : « Le gouvernement devrait s’endetter auprès des institutions de Bretton Woods. »

Antoine Muzaneza, président de l’Association des commerçants du Burundi, (Abuco) exhorte le gouvernement à s’endetter auprès des institutions de Breton Wood.

Mais cette option est fort peu envisageable. Selon Faustin Ndikumana, le Burundi a déjà atteint le plafond pour ce qui est de l’endettement extérieur. Il est surveillé comme le lait au feu par le fait qu’il faisait partie des pays pauvres et très endettés pour lesquels les bailleurs ont annulé la dette extérieure. Par ailleurs, même la loi de finance 2016 ne prévoit pas cette option. Bien plus, les bailleurs étrangers conditionnent leur appui aux pourparlers inter-burundais inclusifs. Ceux-ci peuvent aboutir à un gouvernement de transition, ce que le pouvoir ne veut pas entendre.

Dr Salomon Nsabimana conseille une gestion optimale de devises qui restent sur le marché en ces temps difficiles. Ce qui suppose selon lui un dialogue entre les acteurs concernés (la Banque Centrale, les banques commerciales, etc.

A court et à moyen terme, « il faudrait créer un environnement attractif qui permet aux investisseurs (étrangers ou diaspora) et bailleurs d’amener les devises dans le pays », suggère-t-il.

Audace Niyonzima de la BRB parle d’un suivi rigoureux des recettes issues de l’exploitation et de la commercialisation des minerais et l’augmentation du volume des exportations.

Accroître le volume des exportations

L’augmentation des produits d’exportation en diversifiant les secteurs et les produits susceptibles de générer des devises, c’est aussi la suggestion du Dr Nsabimana. Il cite ici les minerais, l’huile de palme, fruits, développement touristique, etc.

Dr Nsabimana note par ailleurs que le Burundi regorge des potentialités qui ne demandent qu’à être mises en valeur. A ceux qui proposent la dévaluation comme une des solutions, ce professeur d’université dit que la prise de cette décision revient au gouvernement en collaboration avec la Banque Centrale et d’autres institutions financières comme le FMI. « Donc, un processus qui passe par un grand débat », conclut-il.

Forum des lecteurs d'Iwacu

10 réactions
  1. KANYANA Libérate

    Le plus grand problème de la rareté c’est le gouvernement à travers la BRB fixe un taux « au hasard » sans le libre jeux du marché. Le Burundi n’exporte que le café et le thé en grande partie (d’ailleurs le 2ème VP qui apparemment est nulle en économie vient d’interdire l’exportation de certains produit qui étaient source des devises). La BRB devrait injecter les dollars sur le marché pour faire apprécier le BIF sinon toutes ces manœuvres de « décréter un taux de change » seront nulles.

  2. RUGAMBA RUTAGANZWA

    @Antoine Muzaneza: ‘’Le gouvernement devrait s’endetter auprès des institutions de Bretton Woods’’

    Soyez un peu plus créatif et imaginatif, cher Monsieur! Je pense que le Gouvernement est déjà au courant de l’existence des institutions dont vous parlez ainsi que leurs rôles. Seulement, ces Institutions donnent des dettes à des Gouvernements crédibles. Alors si le nôtre pense qu’il l’est, il n’a qu’à tenter sa chance. En ce qui me concerne je suis presque sûr qu’il lui sera opposé une fin de non-recevoir pour les raisons que vous n’ignorez pas mais que je peux rappeler brièvement: violations massives des droits de la personne humaine y compris viols comme arme de dissuasion politique, enlèvements et disparitions forcées y compris exécutions extrajudiciaires… ! Malheureusement, la liste n’est pas exhaustive.
    A mon humble avis, au lieu de se diriger vers les instituions de Breton Woods, certains dirigeants de ce pays devraient se rendre de leurs propres grés à La Haye devant le Tribunal Pénal International où, je pense, beaucoup finiront leurs jours !!

    • Cet homme crache toujours sa haine qu’il a envers le Gouvernement Hutu. Franchement, tu risques d’avoir une crise cardiaque parce que le Gouvernement du CNDD FDD va diriger bcp d’annees tant qu’il n’existe aucune alternative a ce Gouvernement qui est tres apprecie par la quasitotalite du peuple Burundais..

      • Bugongo Côme

        Mr Hima Jeremy, tu n’as rien compris de l’analyse! Comment as-tu su que Rugamba Rutaganzwa n’est pas hutu? Seulement tu es comme ces gens qui pleurent sans savoir qui est mort. Ce que dit Rugamba relève de la haute économie en rapport avec les finances publiques. Qu’un gouvernement soit tutsi ou hutu, il doit travailler pour le peuple tutsi et hutu. Et maintenant, le peuple affamé, mort de maladies, illettré, il est plus hutu que tutsi comme il en est en effectif. Ne sois pas partisan d’une idéologie qui ne mène nulle part.

      • Meurlsaut

        Hima jeremy
        Gouvernement hutu ou gouvernement burundais?? Tes affirmations tapageuses sont celles d’un esprit obtus et borné! Je pense que j’ai tort de réagir à tes fariboles!

  3. Maya

    [Ndlr: Nous accusons un manque à gagner très énorme car la Banque centrale échange les devises sur un taux très inférieur par rapport à celui pratiqué sur le marché.», confie un cadre d’une ONG]; Quel marché fait-il allusion? Certainement le marché noir! Il faut plutôt que le Gouvernement s’investisse pour éradiquer cette pratique de marché noir! Quand bien même ce marché noir existerait, il faut tout faire qu’il n’y ait pas une grande différence qui inciterait les gens à préférer vendre leurs devises à ce marché.

  4. Fofo

    Il y a une autre piste qui pourrait faire entrer bcp des devises dans le pays mais qui n’est pas encore exploitée : La possibilité de recevoir les paiement en ligne avec les cartes de crédit. Aujourd’hui nous avons la possibilité d’acheter en ligne, de payer nos factures en ligne et de transférer d’argent avec les cartes de crédit telle que Visa card mais l’inverse ne fonctionne pas. Cela signifie que le peu de devises peuvent être envoyer sans avoir la possibilité de recevoir les devises via le même canal. Or nombreux sont ceux qui prêts à acheter, régler les factures ou transférer des sous directement en ligne avec leurs cartes de crédit (de l’étranger sans avoir besoin d’effectuer des virements ordinaires ou transfert WU, MG, etc.). Il faut que le Gouvernement accélère son projet de modernisation de son système de paiement pour rendre possible cette piste!

    • Anonymous

      Une carte de crédit ne permet nul part de recevoir de l’argent, ce n’est pas un compte. Une carte est adossée à un compte bancaire et ce n’est qu’à ce dernier qu’on peut recevoir de l’argent. Tu pourras recevoir de l’argent sur un compte bancaire, un compte Paypal, un compte x mais jamais sur une carte bancaire! Pourrais-tu t’expliquer ? Merci.

      • Fofo

        @Anonymous,
        Je n’ai pas dit que la carte de crédit permet de recevoir de l’argent! Lisez bien mon commentaire!
        Le problème n’est pas une carte de crédit car bon nombre des banques locales disposent déjà de ce moyen de paiement! Le problème c’est notre système bancaire actuel qui ne nous offre pas la possibilité de recevoir le paiement ou transfert en ligne réalisé à travers les cartes de crédit. Cela n’est pas un cas particulier pour le Burundi, à l’exception du Kenya sinon tous les pays de la région connaissent cette problématique! https://www.paypal.com/fr/cgi-bin/webscr?cmd=%5fdisplay%2dcountry%2dfunctionality%2doutside&dispatch=5885d80a13c0db1f8e263663d3faee8d64813b57e559a2578463e58274899069

        Le projet de Modernisation est encours et si ce système pourrait fonctionner le plus rapidement, ça pourrait nous permettre de vendre certains produits/services en ligne et nous aider à encaisser les devises!

  5. KABADUGARITSE

    Je crois que Mr Antoine ne maîtrise que très partiellement l’impact du danger de recourir aux institutions de Bretton Woods. Qu’il s’informe auprès des argentins n’eut-été le courage des autorités républicaines.-

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