Cette semaine, nous avons accordé une grande place à l’économie. Parce que nous sentons qu’un palier a été franchi dans la descente aux enfers. Les Burundais sont généralement pudiques. Tout le monde savait que la misère était là, installée. Depuis quelques années, elle rogne chaque jour un peu plus les rares ressources.
En dehors d’un petit cercle de privilégiés, certains paradoxalement de plus en plus riches d’ailleurs, la majorité de la population est frappée par la misère. Mais les Burundais gardaient une certaine dignité, fidèles à la morale ancestrale qui enseigne que « les larmes d’un vrai Burundais coulent à l’intérieur ». Chacun, à sa manière, essayait de s’adapter, de composer, de survivre.
Mais depuis quelques jours, avec les nouvelles hausses des prix de l’eau et de l’électricité, cette digue de dignité a sauté. Partout, dans les ménages, dans la rue, dans les bus, au bureau, au bistrot, etc., les Burundais parlent ouvertement de leur misère accrue. Il y a le désespoir, l’incompréhension. Et surtout on sent poindre une grande colère, longtemps contenue. Une rupture avec le monde politique.
Au moment où nous mettons sous presse, nous apprenons que le gouvernement vient de reculer : la mesure est annulée. Mais il n’y a pas lieu de pavoiser. C’est juste un petit répit. Mais jusqu’à quand ? En effet, sans des mesures concrètes pour rassurer et attirer les investisseurs, sans une lutte contre la corruption, une vraie, pas celle qui arrête les petits fraudeurs de charbon et ferme les yeux sur « les gros poissons » comme le remarque l’[Ambassadeur de l’Union Européenne au Burundi->http://www.iwacu-burundi.org/index.php?option=com_content&view=article&id=3266&Itemid=53], sans un environnement apaisé par un réel dialogue entre les différents acteurs politiques, la relance économique n’aura pas lieu.
Enfin, interdire l’OLUCOME ou emprisonner Gabriel Rufyiri est une fausse solution. Luttez plutôt contre la corruption et laissez en paix (et en vie !) Rufyiri. On ne baisse pas la température en cassant le thermomètre.