La Commission nationale de dialogue inter-burundais (CNDI) a présenté le 24 août un rapport. Des éléments
qui méritent l’attention. Entre autres: « la grande majorité des participants au dialogue veulent que le Président de la République puisse exercer plus de deux mandats », « la grande majorité des participants veulent également que la Constitution prime sur l’Accord d’Arusha », « tous les participants veulent que le Sénat ne comprenne pas d’anciens Présidents de la République qui n’ont pas été élus pour cette assemblée ».
A tort ou à raison, l’opposition radicale s’est insurgée contre son contenu.
S’exprimant au nom du Cnared, Jérémie Minani affirme que son organisation ne reconnaît pas la CNDI. Il la qualifie
d’ailleurs d’instrument qui roule pour le pouvoir afin de s’en servir comme véritable échappatoire aux négociations
inclusives sous la médiation internationale.
Pour Frédéric Bamvuginyumvira, président du parti Sahwanya-Frodebu, il faut ressortir de ces démarches de la CNDI,
la hantise du parti au pouvoir de revoir la Constitution spécialement les articles sur le mandat, les majorités qualifiantes et surtout la mise au rancard de l’Accord d’Arusha comme chapeau de la Constitution : L’article 302 est visé en premier lieu à travers la correction des « erreurs se trouvant dans l’Accord d’Arusha ».
Mais la Commission est dans l’obligation de rendre compte à la fin de son mandat.
Par ailleurs, ce n’est qu’un rapport d’étape, il n’est pas définitif : «Le programme va se poursuivre dans 106 communes restantes, sur des collines et à l’extérieur. » L’opposition devrait en tenir compte.
Cependant, des questions restent sans réponse. Comment peut-on qualifier la grande majorité alors qu’il n’y a pas
d’échantillonnage sélectionné de façon scientifique, encore que le grand travail reste à faire ? La population est-elle suffisamment sensibilisée sur le contenu de l’Accord d’Arusha et de la Constitution pour en faire une évaluation critique?
Que se passerait-il si la population que la Commission va rencontrer dans l’avenir donnait des avis contraires à ces propos ?
La CNDI devrait conduire un dialogue qui reflète un caractère national inclusif afin de consolider les bases fondamentales de la politique burundaise au profit de tous les citoyens.
Constatons que ce rapport dit d’étape sort avant terme car selon le communique de presse de la CNDI « … elle n’a pas encore terminé leur dépouillement ». Pourquoi cette intervention le 24 août 2016, quelques jours après les résultats du Congrès du CNDD-DD de Gitega ? Une course contre la montre pour s’assurer des instruments permettant aux dignitaires actuels des coudées franches pour se forger un fauteuil non éjectable..
Il est absurde de vouloir organiser une Commission nationale de dialogue inter-burundais à l’heure qu’il est. une telle commission ne peut refléter que la pensée de Nkurunziza et sa clique. C’est comme la CVR qui prétend atteindre une réconcialiation dans les circonstances actuelles. Toute ces institutions ne peuvent pas fonctionner de facon adéquate tant que Nkurunziza et sa clique sont au pouvoir. Comme Buyoya hier, Nkurunziza et sa clique n’ont pas l’autorité morale nécessaire pour de telles initiatives. Il nous faudra des leaders aux mains un peu plus propre pour imulser ces initiatives.
Après les premiers comptes-rendus des séances conduites par la CNDI, il ne peut y avoir de surprise dans les conclusions du rapport rendu.
Maintenant, que représente vraiment « la majorité des participants au dialogue » ? Et une autre question se pose, au Burundi comme en Europe d’ailleurs, la « majorité » a-t-elle nécessairement raison ? Une majorité trop facilement manipulable, et c’est la faiblesse des démocraties.
Concilier les décisions populaires, immanquablement « sous influence », avec l’intérêt à long terme des sociétés est un problème dont la solution est ardue. Voir le tumulte qui a entouré le référendum sur le BREXIT en Europe.
Et puis, les consultatons de la CNDI n’avaient pas la prétention d’être inclusives, ni d’être un référendum.
Valeur : le gouvernement a obtenu ce qu’il voulait, tout comme il y a plus d’une année. La qualité des oripeaux dont il se pare ne trompe pas grand’monde.