Utilisé en cas d’antagonisme socio-politique, le langage kamikaze peut provoquer des violences de masse. Désiré Ndagijimana, expert en communication non-violente, préconise la retenue et un dialogue pour trouver un compromis.
Que peut-on comprendre par langage kamikaze ?
Un langage kamikaze est utilisé par un groupe en position de faiblesse en cas d’antagonisme socio-politique. Les membres d’un groupe humilié, disqualifié, menacé d’extermination sont emportés de colère et menacent à leur tour d’en découdre avec les membres d’un groupe opposé. Ils sont conscients qu’ils sont les grands perdants de cette opposition. Ils se disent qu’ils n’ont plus rien à perdre. Pour eux le seul moyen de se faire entendre est d’engager un bras de fer.
Quand est-ce que ce langage est utilisé?
C’est un langage en vogue quand prévalent des conditions socio-politiques obscures. Les gens ne voient pas la finalité de ce qu’ils sont en train de faire. Prenons la période électorale. Dans certains pays, on connaît le candidat favori. Mais ailleurs, il est difficile de le constater, chacun se considérant comme tel. On se lance des piques. Du coup, il y a formation des blocs.
Que peuvent être les conséquences ?
Des membres du groupe indexé cherchent à se valoriser par tous les moyens. Ils passent à l’offensive. C’est une réaction suicidaire. Ils se disent qu’ils vont attaquer puis assumer la suite. Les membres du groupe en position de force se consolident et organisent la riposte. Sa réaction est souvent plus violente. Des bagarres, une crise voire une guerre. La société est embrasée. De tels langages sapent tous les efforts de réconciliation. Si cette situation persiste, ce sont des violences de masse à grande échelle.
Que faut-il faire pour prévenir l’irréparable en cette période électorale ?
Les leaders politiques doivent privilégier une communication non-violente et créer un cadre de dialogue permanent pour trouver un compromis sur toute situation problématique. « La violence appelle la violence », disent les sociologues. Il faut donc un climat d’échanges et de dialogue afin de se rassurer mutuellement.
Quant à la population, il importe qu’elle s’interroge pour prendre la meilleure option. Des personnes deviennent des fanatiques au point de passer à l’acte immédiatement sans en évaluer l’impact. Il faut penser, raisonner, puis réagir.
Quid des professionnels des médias ?
Ils ne sont pas en reste. Ils doivent faire preuve de professionnalisme. Diffuser des informations fouillées, vérifiées et recoupées. Eviter de tomber dans le piège des politiciens. Il ne devrait pas y avoir confusion entre acteurs politiques et professionnels de médias. En cas d’accusation gratuite, le démenti à lui seul ne suffit pas pour compenser le dommage causé.
Propos recueillis par Jérémie Misago