Le bois et le charbon de bois sont les principales sources d’énergie au Burundi. Les environnementalistes suggèrent l’utilisation de sources d’énergies alternatives au charbon pour préserver l’environnement. Ces dernières existent en quantité abondante et bon marché.
Plus de 95 % des ménages au Burundi utilisent le bois de chauffage ou le charbon de bois pour leurs besoins en énergie. Ainsi, plus de 64 hectares partent en fumée quotidiennement, selon une étude du PNUD Burundi.
Les usagers du charbon pour la cuisson ne décolèrent pas suite au prix du charbon qui ne cesse d’augmenter, depuis quelques mois. J. N., un employé de maison dans le quartier Ngagara : « Aujourd’hui, le charbon que j’achetais entre 2.500 BIF et 3.000 BIF s’achète actuellement à 5.000 BIF, une hausse partie du simple au double dans moins d’une année ».
Et R. B., rencontrée sur l’un des points de vente du quartier Bwiza fait savoir que le prix du charbon a considérablement augmenté : « Un sac qui était vendu à 25.000 francs burundais en 2016, se vend actuellement à 40.000 francs burundais ».
« Le bois devient de plus en plus cher, beaucoup de grossistes me disent qu’ils doivent s’approvisionner dans les provinces lointaines et le prix de transport augmente. Ce qui se répercute sur le prix d’achat », souligne l’un des grossistes interrogés.
De plus, indique-t-il, de nombreuses attestations pour le transport et la vente du bois et ses dérivés exigées, le rendent plus onéreux. Pour lui, il faudrait l’implication de tout citoyen pour un fort reboisement afin de pallier ce fléau.
Des initiatives de reboisement pour sauver l’environnement
La multiplication des saunas et des boulangeries du jour au lendemain en mairie de Bujumbura, est aussi l’une des causes du déboisement. Interrogés, leurs propriétaires indiquent que malgré la cherté du bois de chauffage, ils n’ont pas d’autres choix.
L’un d’eux a confié à Iwacu qu’il utilise au moins un camion par semaine et assure qu’il n’a jamais pensé à utiliser d’autres sources d’énergie arguant que ces dernières dégagent trop de fumée et une mauvaise odeur.
Les utilisateurs des substituants au charbon n’en reviennent pas. Ils affirment qu’avec les briquettes, il n’y a plus de fumée et ils utilisent peu d’argent par rapport au charbon.
« Avec les briquettes combustibles, je parviens à épargner au moins 40 % de l’argent que j’utilisais à l’achat du charbon avant», assure E. K., une jeune Maman du quartier Mutakura, qui utilise les briquettes depuis deux mois.
Des programmes de reboisement ont été initiés dans le but de pallier ce problème, « Environ 45 millions d’arbres ont été plantés dans tout le pays pour l’année 2018 dans le cadre du projet Ewe Burundi urambaye », a annoncé le chef de la Force de défense nationale et président du comité national dudit projet, Prime Niyongabo.
« Utilisons les substituants au charbon pour réduire le déboisement »
Le déboisement augmente également au rythme de la pression démographique. « Plus de 90 % de la population n’utilisent que les ressources naturelles, le bois et le charbon de bois », fait savoir Léonidas Nzigiyimpa, représentant légal de l’association Conservation et Communauté pour le Changement.
Pour lui, la législation en matière de protection de l’environnement existe et est très riche. Il cite notamment le code forestier qui préconise l’aménagement des boisements, des forêts naturelles et des aires protégées.
Il ajoute qu’il manque une mise en application effective, car les textes de lois sont là. « Il faut une implication de tout un chacun, surtout toutes les entités administratives », insiste-t-il. Cet activiste de la protection de l’environnement trouve que la population devrait être la première à préserver l’environnement : « Ce sont les populations qui sont les premières victimes de ces actes épouvantables ».
Il propose aux burundais d’utiliser des substituants au bois et ses dérivés comme le charbon pour la cuisson afin de réduire le déboisement. Il recommande en outre au gouvernement, de sensibiliser et de dispenser des séances de formation à l’endroit de la population sur l’intérêt de limiter le déboisement.
M. Nzigiyimpa espère que le projet « Ewe Burundi urambaye », contribuera au reboisement du pays.
Les substituants au charbon existent en quantité abondante
Kaze Delphin, directeur général de Kaze Green Economy (KAGE) qui est une entreprise qui produit des combustibles pouvant substituer le charbon et le bois de chauffage, rassure que le prix des briquettes combustibles est moins cher par rapport au charbon ou au bois de chauffage.
Selon lui, celui qui utilisait 5.000 francs burundais à l’achat du charbon pour la cuisson des aliments n’utilisera plus que 2.500 francs burundais et 3.000 francs burundais avec les briquettes combustibles. « Soit une réduction d’au moins 50 % ».
M. Kaze indique qu’il pourrait produire plus, si les commandes augmentent. D’ailleurs, ajoute-t-il, on produisait 40 kilogrammes par jour en 2018, mais actuellement, avec nos nouvelles machines, on peut produire jusqu’à 20.000tonnes par jour. « De plus, les matières sont disponibles en quantité abondante ».
Et pour Jinny Ange Ndayiteho, chef de service planification et exploitation de la tourbe au sein de l’Office nationale de la tourbe (ONATOUR), les études sont en cours pour la réduction de la fumée au grand maximum.
« Les clients se lamentaient de la fumée dégagée par la tourbe lors de la cuisson, mais avec les briquettes combustibles, il n’y aura plus de fumée », indique M. Ndayiteho.
Il confie que les estimations des ressources en tourbe s’élèvent à 57 millions de tonnes. Elles sont concentrées dans les marais des plateaux, Gitanga entre les communes Matana et Ryansoro (763 mille tonnes), Gisozi en province Mwaro (336 mille tonnes), Matana en province Bururi (310 mille tonnes) et dans la vallée de l’Akanyaru (Buyongwe) en province Ngozi (19 millions de tonnes).
Il déplore que certaines superficies des tourbières, surtout au nord, soient accaparées par la population pour des infrastructures publiques comme l’irrigation. Ce qui se répercute sur la quantité des réserves de tourbe, passant ainsi de 57 millions de tonnes à 20.609.000 tonnes.
Mais, poursuit-il, la quantité disponible est suffisante et assure qu’elle pourrait augmenter la production en fonction de la demande de leurs clients.
Trois questions au professeur Jacques Nkengurutse/ « Des substituants au charbon existent et à moins cher, il faut une sensibilisation »
Comment se présente la situation de l’utilisation du bois et du charbon de bois au Burundi ?
Le charbon et le bois de chauffage sont les principales sources d’énergie, à plus de 90%. Pourtant en 2020, le Burundi avait besoin des forêts qui s’étendent sur 38% du territoire pour couvrir ses besoins énergétiques alors qu’il disposait uniquement 10 %, soit un déficit de 28 %.
De plus, généralement si vous carbonisez le bois pour obtenir le charbon, pour obtenir 10 kilogrammes de charbon, vous devez avoir 100 kilogrammes de bois. Il faut penser à maximiser la rentabilité et réduire les pertes même en carbonisant le bois.
Que pourraient être les conséquences si le déboisement continue à cette allure ?
Les conséquences du déboisement sont énormes, entre autres les érosions, l’exacerbation des changements climatiques et les effondrements. Il faut une préservation de l’environnement à tout prix.
Existe-t-il d’autres alternatives au charbon ?
Il existe plusieurs alternatives au charbon, dont l’électricité, l’énergie solaire, le gaz, et bien d’autres. Il ne manque que la sensibilisation, afin d’amener la population au changement de mentalités. Et comparativement au charbon, elles ne sont pas du tout chères. Par exemple, le gaz est exonéré par le gouvernement, depuis deux ans. Ce qui a permis que son prix chute jusqu’à 12 % et cela le rend bon marché par rapport au charbon.
Le manque d’information est la principale barrière à l’utilisation d’autres sources d’énergie.