Après des attaques à la grenade qui ont causé la mort d’au moins deux morts et plus d’une centaine de blessés la semaine dernière à Bujumbura, la spirale de la violence est loin d’être bouclée. Cette semaine a connu des assassinats ciblés et d’autres règlements de compte. Retour sur quelques cas inquiétants
Assassinats ciblés, règlements de compte ou conflits d’intérêts, les criminels semblent avoir trouvé le moindre prétexte pour sortir leurs AK 47 ou grenades. Ce phénomène inquiète les habitants de la ville de Bujumbura. Quoi que la vie ait repris son cours, des familles pleurent encore les leurs, fauchés par un jet de grenade, ou tués par balles…
Assassinats ciblés
Lundi 27 septembre. Un matin banal pour plusieurs habitants de la capitale économique. Habitant le quartier de Carama en zone de Kinama (nord de la ville commerciale Bujumbura), Chantal Hatungimana se prépare à aller au travail. Elle est directrice de rapatriement au ministère de l’Intérieur. Une personne non encore identifiée l’accoste et tire sur elle plusieurs balles alors qu’elle vient de quitter son domicile pour aller au travail. Donnée pour morte dans un premier temps, elle est vite évacuée dans un hôpital de la ville. Elle succombe quelques heures plus tard. Les informations non confirmées indiquent que la victime aurait un lien familial avec le patron de la primature, Alain-Guillaume Bunyoni.
Le criminel s’est évaporé dans la nature. Profitant de la panique générale due aux détonations, il a déposé son arme avant de prendre le large.
Quatre jours plus tôt, une autre attaque avait ciblé le domicile d’un colonel de l’armée burundaise du nom d’Aaron Ndayishimiye. L’épouse du commandant du 212e bataillon installé dans la réserve naturelle de Rukoko a été touchée grièvement. La domestique aussi. Elles ont toutes les deux été évacuées à l’hôpital où elles ont succombé aux blessures, quelques heures plus tard. Là encore, les auteurs de l’attaque n’ont pas été identifiés.
Le colonel a été cité par les responsables du parti CNL dans l’enlèvement mi-juillet de son représentant en commune de Mutimbuzi, Elie Ngomirakiza. Sa famille n’a aucune trace de lui depuis.
Attaques à la grenade
L’explosion d’une grenade a été entendue lundi 27 septembre dans la localité de Kibembe au quartier de Kizingwe-Bihara, en zone de Kanyosha. Bilan : un enfant tué
sur-le-champ et plusieurs autres blessés. Des témoins ont été interpellés par des cris de détresse et ont accouru. Les victimes ont tous été évacuées vers des structures sanitaires de la ville. La localité a vite été quadrillée par des policiers, des agents de renseignement ainsi que des jeunes membres du comité mixte de sécurité (à majorité du parti au pouvoir).
Un inconnu au quartier a été interpellé et présenté comme auteur du jet de la grenade. Le concerné a indiqué qu’il habite le quartier voisin de Gisyo et qu’il n’a rien à avoir avec l’attaque. Au moins 20 autres suspects ont été arrêtés, par la suite.
Une autre grenade a explosé mardi soir 28 septembre sur la colline de Vugizo en zone de Gatumba. Des habitants de la région parlent d’une dispute familiale qui aurait dégénéré dans une boutique tenue par un certain Joseph Barandekeye. « Nestor Ndayiragije alias Rasta s’est disputé avec des gens, a sorti une grenade et l’a lancée », a indiqué un témoin.
Le porte-parole du ministère de la Sécurité indique que deux personnes sont mortes sur-le-champ. « Il s’agit d’un motard prénommé Pascal ainsi que le boutiquier nommé Joseph Barandereye », a annoncé Pierre Nkurikiye qui a fait savoir que quatre autres personnes ont été blessées, dont l’épouse de Ndayiragije.
L’auteur de la déflagration a été appréhendé. Le rapport de la police indique qu’il a été acheminé vers le poste de police de Gatumba. «Mais à mi-chemin, le criminel s’est évadé en sautant du véhicule policier et dans sa poursuite, il a été touché par des balles de la police. Il est mort sur-le-champ. Un officier de police judiciaire a fait le constat».
Ce mercredi 29 septembre sur la colline de Mitakataka dans la commune de Rugazi à Bubanza, deux enfants ont été grièvement blessés. Ils jouaient avec deux grenades retrouvées dans une cage à pigeons. Innocemment, ils ont dégoupillé une grenade provoquant l’explosion. Dépêchés à l’hôpital de Mpanda, l’un des gamins est mort.
La police a arrêté le propriétaire des grenades. Il est détenu au commissariat provincial de Bubanza pour interrogatoire.
Signalons que Bujumbura a été le théâtre de trois attaques simultanées à la grenade le 20 septembre en plein centre-ville et au quartier Jabe. Le bilan officiel est de deux morts et plus d’une centaine de blessés. La veille à Gitega, deux personnes avaient été tuées et plusieurs blessées dans une attaque à la grenade dans un bar. Le procureur a lancé des mandats d’arrêt contre huit personnes accusées d’être le cerveau des attaques du 20 septembre dont les opposants Alexis Sinduhije et François Nyamoya ainsi que l’humanitaire Marguerite Barankiste.
Accusation démentie par les concernés qui rejettent ces accusations « infondées ». « Ni nos dirigeants, ni nos membres ne sont orientés vers la violence contre nos concitoyens, » a déclaré François Nyamoya, le secrétaire général du parti MSD. La lauréate du prix Aurore 2016 a condamné ce qu’elle qualifie de campagne médiatique mensongère, massive et malveillante. Elle dit avoir opté pour « une démarche judiciaire internationale contre toute partie reprenant ces allégations ».
Eclairage
Trois questions à Dr Gérard Birantamije, spécialiste en sécurité
« La circulation des armes au sein de la population civile est un vrai problème »
Comment expliquez-vous ce contexte sécuritaire ?
D’une part, il y a ce que je peux appeler « les comptes non soldés. » La crise du troisième mandat a produit un malaise généralisé au sein de la population. Ni le mandat en soi avec toutes les tentatives de dialogue et médiation, ni les élections de 2020 n’ont pas pu dissiper les malaises et l’insécurité qui se sont progressivement installés. Les revendications de rébellions contre le gouvernement en place n’ont jamais cessé, tout comme d’ailleurs la répression des présumés opposants et rebelles. D’autre part, l’entretien d’une milice et la politisation des corps de sécurité par les acteurs au pouvoir depuis plus d’une décennie et de manière plus saillante depuis la crise du 3e mandat, a fini par ériger des espaces et des acteurs incontrôlables, mais qui revendiquent les pouvoirs de l’Etat. C’est dans ce mélange incongru de revendication de maîtrise de sécurité, de rébellion et de contre rébellion qu’il faut plonger pour comprendre le contexte actuel très alarmant.
Attaques aveugles ou ciblées, force est de constater une forte circulation d’armes au sein de la population…
Une précision : il n’y a jamais d’attaque « aveugle ». Peut-être ce sont des attaques indiscriminées, comme le fait de larguer des grenades dans les bus, dans les marchés, les bistrots, etc. Mais ce n’est pas pour autant « aveugle » du point de vue de ceux qui mènent l’opération. Comment expliquer la forte présence d’armes au sein de la population ? Très bonne question. La présence des armes s’explique par plusieurs variables, mais je me limiterai à deux. La première est celle d’un processus de démobilisation et de réintégration raté. A la sortie de la guerre civile en 2009, les démobilisés n’ont jamais été réintégrés dans la vie civile. Ils ont été simplement démobilisés des groupes armés, mais ont été récupérés par les mêmes groupes armés devenus des partis politiques pour la cause de la paix. Pour preuve, le combattant a acquis une prééminence sur les autres populations civiles. Ils sont célébrés comme des acteurs de premier plan dans la vie du pays. Les journées du combattant, « Imbonerakure Day », illustrent bien cette partie ratée du DDR (Désarmement, Démobilisation et Réintégration). La deuxième variable concerne les armes elles-mêmes. La sortie de crise en 2003 ou en 2009 a toujours été teintée d’incertitude pour les combattants. La logique mise en route lors du DDR d’une arme pour quatre/cinq combattants cachait mal le besoin de cacher les armes pour parer à toute éventualité. N’a-t-on pas vu des caches d’armes mises à découvert ici et là dans le pays ?
En outre, le processus de désarmement de la population civile engrangée en 2008 par la commission nationale du désarmement de la population civile n’a pas visé d’emblée le désarmement des esprits. Le désarmement des esprits signifie d’abord asseoir la paix pour tous pour prétendre expliquer aux gens que la sécurité leur est garantie. Or depuis 2007 les Burundais ont vécu une insécurité rampante. Ce n’était pas la guerre, mais il n’y avait pas de paix non plus. Enfin, il ne faut pas oublier qu’il a été rapporté par de nombreuses sources qu’il y a eu plusieurs distributions d’armes aux Imbonerakure et des entraînements au maniement des armes. Le gouvernement a certes nié les faits depuis 2014, mais il n’y a jamais eu d’enquêtes diligentées par les parquets sur ces cas rapportés. Bref, l’insécurité sans cesse croissante, justifierait encore plus la présence des armes au sein de la population civile, si l’on reste, fût-ce, sur le plan individuel, dans le dilemme de sécurité.
Comment en finir avec ce climat?
Une chose importante : le gouvernement doit reconnaître qu’il y a un problème de sécurité. C’est à partir de ce constat que des solutions holistiques peuvent être trouvées que ce soit la démilitarisation de la société, le désarmement de la population civile ou encore la fin des rébellions réelles ou supposées. Et cela passe par des processus politiques et techniques négociés. Mais entre-temps, il incombe au gouvernement d’assumer sa responsabilité de protéger sa population.
Ivyo bitwiibutsa ibihe bibi vy’ama mines yahitana des innocents à Bujumbura ainsi que différentes ambuscades sur les différentes routes!! Turacafise ikibazo mu Burundi
Que se prépare t il au sommet de l État ??
Des ignobles individus lancent des grenades, il s en suit des morts et des blessés
Malgré les miliers, de policiers, soldats, Imbonerakures et le service de renseignement, à ‘heure à’ actuelle Aucun vrai coupable n à été arrêté…..
On a assassiné des prétendus meurtriers, de plus, sans passer par la Justice.
Qui dirige ce pays ?
Assiste t on a des règlements de compte….
Quand et qui dirigera le pays où le respect des règles de droit sera à nouveau établi
« …Mais entre-temps, il incombe au gouvernement d’assumer sa responsabilité de protéger sa population… »
Tous les acteurs politiques devraient s’asseoir ensemble sans faux-fuyant et analyser la question.
Les armes ne doivent pas circuler comme des régimes de bananes. Aujourd’hui c’est le citoyen lambda qui en subit les conséquences mais demain c’est un autre jour.