La Cour de Justice de l’EAC a décidé, jeudi 24 mai, de réexaminer l’affaire du mandat de 2015 du président Nkurunziza. Les organisations de la société civile de la sous-région se disent satisfaites. Les avocats de l’Etat burundais parlent d’un non-évènement.
En première instance, en 2015, la Cour de Justice de l’EAC avait expliqué qu’elle ne disposait pas de prérogatives pour se pencher sur la décision de la Cour Constitutionnelle burundaise donnant le feu-vert au président Pierre Nkurunziza de briguer un autre mandat en 2015.
Avec la décision de la Chambre d’Appel de ladite Cour du 24 mai dernier, il s’agira d’analyser si la Cour constitutionnelle du Burundi a violé ou pas les articles du Traité de la Communauté de l’Afrique de l’Est, notamment l’article 6 qui oblige les Etats membres de l’EAC à respecter les lois nationales et internationales dûment en vigueur.
L’affaire remonte à juillet 2015. Les organisations de la société civile de la sous-région (EACSOF), aidées par l’Union Panafricain des Avocats (PALU) déposent une plainte devant la Cour de Justice de l’EAC. Elles veulent prouver que le processus électoral burundais en cours à l’époque est un forcing électoral. Dans leur argumentaire, elles dénoncent l’arrêt de la Cour Constitutionnelle qui a permis au président Nkurunziza de briguer un autre mandat. D’après elles, il a été arraché dans l’intimidation et des menaces de mort ont été proférées contre les juges de cette Cour. Et de demander à cette Cour sous-régionale d’arrêter le processus électoral.
Au premier degré, en 2016, elles sont déboutées. Toutefois, elles font appel et le jugement de la semaine dernière les laisse espérer un bon jugement quant au fond de l’affaire.
Un changement de donne sous condition
Pour Bujumbura, c’est un « non-événement. » Dans la foulée de cette décision de la Chambre d’Appel, Me Nestor Kayobera, avocat de l’Etat Burundais, s’est montré optimiste en affirmant que le Burundi n’a jamais perdu un procès devant la Cour de Justice de l’EAC.
Et de conclure que s’il advenait que le pays perde ce procès, il serait difficile de mettre en exécution le jugement sur un litige datant de 2015. De plus, fait-il remarquer, le référendum du 17 mai dernier pour une nouvelle Constitution est passé par là.
« Les jugements des tribunaux régionaux ne sont pas faciles à mettre en application sans une volonté politique de la part de l’Etat qui a ratifié le Traité mettant en place cette Cour », concède un membre de l’EACSOF.
Il soutient que même s’il n’existe pas une police régionale qui viendra mettre en exécution la décision rendue en leur faveur, les conséquences diplomatiques ne manqueront pas. « Avec un pays à la fois enclavé et isolé comme le Burundi, on a toujours besoin de ses voisins. » Et d’enchaîner : « Bujumbura peut se moquer de l’Union Européenne et d’autres pays éloignés, mais il ne saurait se mettre à dos toute la Communauté est-africaine. »
Aucun régime ne saurait durer, conclut-il, en continuant à vivre en autarcie dans ce siècle où le monde est devenu un village planétaire et dans lequel les relations entre les Etats, les blocs régionaux sont devenus incontournables pour se développer.