L’association Aluchoto alerte sur la torture systématique de détenus dans plusieurs prisons du pays. Ces victimes subissent un racket communément appelé « bougies », une privation de nourriture et des violences physiques organisées par des codétenus sous l’autorité informelle d’un chef connu sous le nom de “Nyumbakumi”. C’était lors d’un point de presse organisé ce vendredi 24 avril que l’association a mis en garde l’opinion publique contre ces graves violations des droits de l’Homme, pourtant connues.
”Nous avons recensé 98 personnes déjà torturées dans différents cachots situés dans les provinces de Gitega, de Bubanza, de Bururi, dans les communes de Bujumbura Mairie et de Bujumbura Rural, ainsi qu’à Cibitoke”, a dénoncé Vianney Ndayisaba, coordonnateur de l’association de lutte contre le chômage et la torture, Aluchoto.
Le mode opératoire est toujours le même : dès leur arrivée, les nouveaux détenus sont pris à partie par des codétenus qui les soumettent à des violences délibérées afin de leur extorquer une somme d’argent destinée à “acheter une bougie”. Cette pratique, fruit d’une hiérarchie informelle, s’apparente à une forme de racket et de maltraitance institutionnalisée à l’intérieur des établissements pénitentiaires. Les montants exigés varient entre dix mille et cent mille francs burundais.
« Les nouveaux prisonniers sont torturés par d’autres détenus s’ils ne parviennent pas à s’acquitter d’une somme de dix mille ou même pouvant atteindre cent mille FBu », déclare Vianney Ndayisaba, coordonnateur de l’Aluchoto.
Au-delà de la violence physique, cette extorsion prive les détenus de la nourriture que leurs familles apportent lors des visites, aggravant ainsi leur état nutritionnel déjà précaire.
« Quand sa famille lui apporte de la nourriture, les autres prisonniers lui interdisent tout accès à cette alimentation et la consomment eux-mêmes », a-t-il fait savoir.
Selon lui, dans la majorité des cas signalés, les victimes ont subi des blessures suffisamment graves nécessitant une prise en charge hospitalière. Le rapport de cette association précise que la maltraitance infligée s’inscrit clairement dans la catégorie des atteintes aux droits fondamentaux protégés par la Constitution et par les instruments internationaux ratifiés par le Burundi.
Nyumbakumi, l’ombre qui gouverne le cachot
L’organisation a également identifié un meneur parmi les détenus, surnommé « Nyumbakumi », il joue un rôle actif dans la coordination de ces pratiques barbares.
« Il y a une personne nommée “Nyumbakumi”, chef des prisonniers, qui conduit les autres pour torturer les nouveaux venus », a indiqué le coordonnateur de l’Aluchoto.
Parallèlement à la torture institutionnalisée, cette association a dénoncé une situation de surpopulation carcérale critique.
Dans de nombreuses prisons communales, le taux d’occupation dépasse largement les capacités réglementaires des bâtiments, forçant les détenus à dormir dans des conditions indignes. « La sursaturation carcérale observée dans les prisons communales et provinciales, où les conditions dans lesquelles dorment les prisonniers dépassent l’imagination », a déploré le coordonnateur de l’Aluchoto.
Face à ces dérives, cette association met en avant son action de plaidoyer pour la libération de détenus jugés pour des délits mineurs.
Grâce à ses interventions auprès des tribunaux et des autorités carcérales, Aluchoto a obtenu la remise en liberté de 104 prisonniers condamnés pour de petites dettes ou pour des infractions ne justifiant pas un maintien en détention.
Comme solution à ces graves dysfonctionnements et prévenir de nouvelles exactions, Aluchoto appelle les institutions burundaises à renforcer l’encadrement et le contrôle des lieux de détention, à sanctionner les auteurs de torture et à garantir l’exécution effective des décisions de justice.
Au-delà des abus physiques, l’association signale un autre manquement grave : le non-respect des décisions de justice définitives.
Par exemple, sur le cas des parcelles des particuliers, souvent les responsables administratifs ou les hommes influents interviennent après le prononcé du jugement pour empêcher son exécution, notamment en détournant des parcelles attribuées légalement. « Quand le jugement définitif a été rendu, il y a des gens qui viennent pour boycotter, notamment en détournant ces propriétés. Ces violations sont souvent effectuées par des autorités ou des personnes influentes », a déclaré Vianney Ndayisaba.
« Le Burundi est un pays doté de lois, d’un système démocratique et d’une justice ; le pays ne peut pas se développer sans le respect des lois et de la justice », a insisté le coordonnateur de l’Aluchoto.
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