Le projet de loi sur la presse voté à l’Assemblée nationale mercredi 3 avril était au centre des débats dans le Club de la Presse : «On voudrait ridiculiser le gouvernement qu’on ne s’y prendrait pas autrement », a souligné Innocent Muhozi, le directeur général de la Radiotélévision « TéléRenaissance ». C’est un projet « archaïque » et « rétrograde» qui ne pourra pas fonctionner même s’il venait à être promulgué, a-t-il poursuivi, avant d’ajouter que « dans ces conditions, le gouvernement aura du mal à gérer la situation. »
De l’avis d’Alexandre Niyungeko, président de l’union burundaise des journalistes (UBJ), « le projet est de nature à discréditer l’Assemblée nationale. Et pour cause, c’est un projet rétrograde à plusieurs égards qui, de ce fait, ne devrait pas être adopté par une assemblée responsable. Je ne comprends pas que l’on veuille revenir sur des acquis, comme la protection des sources. Il y a une marche à reculons. Cette loi est purement et simplement inapplicable. On ne pourra pas la respecter en l’état même si notre intention n’est pas d’envenimer les relations avec le gouvernement. Par ailleurs, on a besoin que la loi de 2003 soit révisée et au niveau du nouveau projet de loi je ne mets pas tout dans la poubelle. »
Pour Robert Minangoy, coordinateur du projet PACAM, « le vote à l’Assemblée nationale est d’autant plus surprenant que le climat entre les médias et le gouvernement s’était considérablement amélioré depuis le début du mois de mars dernier, avec la libération, certes provisoire, du journaliste de Bonesha FM et correspondant local de radio France Internationale (RFI, section swahili), Hassan Ruvakuki. Si on veut des élections démocratiques, il faut aussi une presse libre.
Quant à la carte de presse, en France, c’est une commission dépendant de la profession qui la délivre et non une structure étatique. Pour l’avoir, il faut prouver que 80% des revenus proviennent de la profession. La formation universitaire n’est pas non plus une exigence du métier. Pour la suite du dossier, je suis inquiet de savoir comment les journalistes vont se comporter. On a l’impression qu’il va y avoir « une rébellion » des journalistes. Les relations avec le pouvoir risquent de se compliquer. »
Pour Valérie Muco, journaliste à la radiotélévision nationale du Burundi, ce projet de loi est « régressif » par rapport à la démocratie qui est déjà encrée dans l’esprit du Burundais. « Je souhaite que ce projet de loi soit enterré par le sénat », a-t-il conclu.