Le secrétariat du Comesa a finalement décidé de délocaliser le sommet de Bujumbura à Lusaka. Chronique sur une saga qui n’en finit pas de dévoiler son lot de rebondissements.
Des circonstances imprévues. C’est le motif expliquant la délocalisation du sommet du Comesa initialement prévu du 1 au 10 juin à Bujumbura. Cela ressort d’une correspondance du secrétaire général, Sindiso Ngwenya, adressée à Jean Marie Niyokindi, ministre burundais du Commerce et de l’Industrie. Datée du 21 mai, cette notification est venue confirmer le report effectif du sommet de Bujumbura.
Tout remonte au vendredi 18 mai. Le Comesa, via son site, a annoncé que le 20ème sommet aura lieu à Lusaka en juillet prochain. La date exacte étant à connaître ultérieurement. Face à cette situation, les autorités burundaises se sont montrées imperturbables. Toujours droit dans leurs bottes.
Les préparatifs se sont poursuivis comme si de rien n’était. «Les fonctionnaires de l’organisation n’ont aucune prérogative de changer le lieu du déroulement, cela incombe aux chefs d’Etat de la Comesa», a lâché le secrétaire général du gouvernement Philippe Nzobonariba.
Par la même occasion, M. Nzobonariba a indiqué que le gouvernement n’avait pas encore reçu de notification de ce report.
Dans la foulée, il a écrit une lettre pour la réquisition des véhicules de l’Etat dans la perspective du sommet. Il précisait que ces véhicules allaient leur être restitués le 11 juin, au lendemain de la fin de ce sommet.
La notification à laquelle il faisait allusion est tombée le 21 mai. Il était clairement mentionné que la décision se réfère à l’article 6(3) du règlement intérieur de la conférence des chefs d’Etat. Et qu’elle avait été prise sur ordre du président de ladite conférence.
La ville de Bujumbura brille sous les couleurs du Comesa. Des panneaux et banderoles augurant la tenue du sommet ont été accrochés sur certaines grandes artères de la capitale. Des drapeaux représentant les différents pays du Comesa flottent le long de la route menant à l’aéroport international de Bujumbura.
Bujumbura ne s’avoue pas vaincu
Sur les réseaux sociaux, une bataille a fait rage. Les thuriféraires et les détracteurs ne s’accordaient pas de répit. De ce duel, jaillira des révélations qui permettront plus ou moins de comprendre cette rocambolesque affaire.
L’opinion prendra connaissance de l’existence d’une note verbale du 18 mai du ministère des Affaires étrangères burundais. Cette dernière protestait contre une décision jugée unilatérale du secrétariat du Comesa datant du 15 mai. «Le ministère est encore une fois surpris et déçu par la communication unilatérale du 15 mai du secrétaire général tant de par son faux contenu sur la situation prévalant au Burundi que par ses procédures de donner la communication. » pouvait-on lire dans cette note.
Dans cette même correspondance, le ministre Nibigira tranquillisait les Seychelles qui craignaient pour la sécurité de sa délégation. Signalons que c’est ce pays qui a écrit pour demander la délocalisation.
Selon le chef de la diplomatie burundaise, l’attaque de Ruhagarika ne pouvait en aucun cas servir d’entrave à la tenue du sommet. La preuve avancée est que le référendum avait été paisible.
L’ombudsman burundais, Edouard Nduwimana, s’est aussi invité dans les débats : «L’accueil du sommet est un droit et non une faveur destinée à prouver au monde que nous avons la paix.» Et d’ajouter que l’attaque du Bataclan qui avait entraîné la mort de 130 personnes en novembre 2015 à Paris n’avait pas empêché la tenue de la Conférence sur le climat.
«Les explications sont à chercher ailleurs », a tweeté le médiateur burundais. Avis partagé par un spécialiste qui a requis l’anonymat. Il estime que cette délocalisation peut être interprétée comme un message de la communauté internationale envers Bujumbura. «Ce sommet allait être comme une bouffée d’oxygène pour la diplomatie burundaise. C’est pourquoi le gouvernement essaie de se débattre jusqu’à la dernière minute». Un baroud d’honneur en attente d’un rebondissement miraculeux.