Des engins vétustes, des employés qui touchent une misère, un problème de soins de santé… les choses se compliquent de plus en plus à la Sobugea. La compagnie Kenya Airways enfonce le clou en réduisant ses vols sur Bujumbura.
«Nos équipements sont très insuffisants et vétustes. Cela nous cause beaucoup de désagréments et crée des problèmes avec les compagnies aériennes», soulignent les travailleurs de la Société burundaise de gestion des entrepôts et assistance des avions en escale (Sobugea) à l’Aéroport international de Bujumbura. D’après eux, les compagnies aériennes grognent. «Parfois, le travail qui devait être fait par des machines est effectué par des employés. Cela occasionne des retards car le chargement et le déchargement prennent du temps ». Du coup, les passagers qui ont des connexions ratent leurs avions. «Avec cette situation, la Sobugea perd sa crédibilité car elle n’est plus capable de satisfaire ses clients ».
Les travailleurs de la Sobugea donnent l’exemple d’un avion de la Monusco, avec plus 300 militaires à bord, qui a été immobilisé pendant 4 jours, il y a deux semaines, à l’Aéroport international de Bujumbura. D’ après eux, leur Air Start Unit (ASU), équipement de soutien au sol équipé d’un démarreur pneumatique qui est utilisé pour démarrer les moteurs d’avion, n’a pas pu fonctionner sur cet avion. «Il ne dégage pas assez de pression car il est vieux ». Pour faire démarrer cet avion, l’on a été obligé de louer un autre engin à Goma en République démocratique du Congo. « Cela arrive tout le temps et c’est une mauvaise publicité pour la Sobugea et pour le pays ».
«Un renouvellement des engins à tout prix!»
Télesphore Irambona, administrateur directeur général (ADG) de la Sobugea, explique que la cause de cet incident n’est pas la vétusté des engins. «Chaque équipement a sa capacité. Notre engin ne pouvait pas supporter la puissance de cet avion ». Et de souligner que la Monusco n’avait pas demandé pour savoir s’il y a des équipements adéquats. Ses employés réfutent : «La direction avait donné son accord.» Télesphore Irambona fait savoir que la Sobugea n’a rien perdu dans cette affaire. «C’est la Monusco qui s’est chargée de louer l’engin ».
Les employés demandent un renouvellement complet des engins. «On dirait qu’investir n’est pas la priorité de l’ADG». Selon eux, Télesphore Irambona est plus préoccupé par la construction d’un hangar qui servira à abriter les engins et à stocker d’autres matériels. «Ce hangar va coûter à peu près un milliard de Fbu. Abriter des engins qu’il n’a pas.
Cet argent devrait plutôt servir à acheter de nouvelles machines ». De plus, les travailleurs s’interrogent pourquoi l’ADG veut à tout prix construire dans une propriété appartenant à l’Autorité de l’aviation civile du Burundi (AACB). «Il est impensable qu’un locateur construise pour un bailleur ».
Télesphore Irambona ne comprend pas la préoccupation de ses employés : «La construction du hangar n’est pas un nouveau projet. » Et de signaler qu’il existe un plan d’investissement pour acheter de nouveaux engins.
Une kyrielle de problèmes
Depuis quelques jours, les travailleurs et la direction sont en train de dialoguer. En plus du renouvellement des engins, la question des soins de santé pose aussi problème. «Depuis le mois de mai 2018, l’employeur a pris la décision unilatérale de changer les conditions de traitement des travailleurs en matière de soins de santé», indiquent les employés. Désormais, il s’agit de les affilier à la Mutuelle de la Fonction Publique. «C’est sur injonction du Chef de cabinet civil du président de la République. Ce dernier se serait inspiré du rapport de l’Inspection générale de l’Etat qui aurait constaté que les charges médicales auraient sensiblement augmenté.»
D’après les travailleurs de la Sobugea, cette augmentation a été causée par la mauvaise gestion de la direction.
Depuis janvier 2015, expliquent-ils, la direction a changé de partenaire en quittant la Polyclinique centrale de Bujumbura pour aller à la Polyclinique Maison médicale. «La direction n’avait pas de contrat écrit avec cet établissement, ce qui occasionnait des surfacturations. D’où cette augmentation des charges médicales ». Ainsi, les travailleurs ne comprennent pas pourquoi ils doivent être sanctionnés. «Les statuts stipulent que nous devons être soignés à 100%. On devrait plutôt sanctionner les gestionnaires de la société ».
L’ADG n’y va pas par quatre chemins : «La décision a été prise par les autorités habilitées au regard de la conjoncture actuelle. Est-ce qu’il y a lieu de tergiverser lorsque le président de la République a pris une décision?» M. Irambona reconnaît que ses travailleurs ont des problèmes, suite au gel des annales et autres primes alors qu’ils avaient contracté des crédits.
Les travailleurs pointent aussi du doigt la violation de la loi dans l’attribution des marchés et la prolongation des contrats. «Il y a une mainmise invisible qui veut s’emparer de la Sobugea à vil prix en causant sa faillite ». La réponse l’ADG ne s’est fait pas attendre : «Est-ce qu’ils aiment la Sobugea plus que moi?»