Ce samedi 18 janvier, l’association Shamika a organisé une conférence publique pour la sensibilisation sur la prévention des risques liés à la grossesse et à la santé mentale, notamment concernant le deuil périnatal. Ce sujet, souvent passé sous silence dans le pays, laisse les personnes concernées sans soutien approprié.
Fondée par Naomi Leila Irakoze, l’association Shamika a été lancée après avoir vécu une douloureuse expérience il y a cinq ans lorsqu’elle a perdu son premier enfant à la suite d’une fausse couche.
Lors de cette conférence, elle a partagé son histoire, marquée par la souffrance et la perte d’espoir d’avoir un jour des enfants. Aujourd’hui, mère de deux enfants, elle a expliqué comment le fait de témoigner de son parcours l’a aidée à guérir. Forte de son expérience, elle a créé Shamika pour mener des sensibilisations à ce problème ignoré au Burundi.
« Il faut une prévention des risques liés à la grossesse. Ils peuvent être prévenus dès le plus jeune âge. Nous voulons aussi parler de santé mentale, pour dire qu’il est normal de pleurer pour le décès d’un enfant, même s’il n’est pas encore né », a expliqué Naomi.
Elle a aussi insisté sur l’importance d’un comportement bienveillant de l’entourage envers les femmes touchées, notamment en évitant des paroles blessantes.
Cette conférence a été marquée par un débat animé auquel ont pris part deux experts : le gynécologue, Pasteur Mberimbere et le psychothérapeute, Athanase Ngendakuriyo. Ils ont abordé des questions cruciales sur la fertilité et le deuil périnatal.
Athanase Ngendakuriyo a expliqué que les femmes ayant perdu un enfant à la suite d’une fausse couche souffrent souvent de problèmes psychologiques. Il a souligné l’importance de raconter son histoire pour surmonter ces épreuves. « La santé mentale, c’est comme un kyste : si vous ne retirez pas le liquide à l’intérieur, vous ne guérirez pas », a-t-il déclaré.
Selon ce psychothérapeute, souvent, on consulte trop tard les médecins. « La santé mentale est connectée aux phénomènes sociaux et à ce que l’on vit au quotidien. Actuellement, il y a des personnes victimes de l’inconscience et qui ne réalisent leur situation que longtemps après ».
Pour lui, les barrières culturelles doivent être franchies pour enseigner aux enfants la reproduction sexuelle dès leur jeune âge. « Nos familles doivent oser parler de ces sujets tabous. Sans sensibilisation, les jeunes découvrent par eux-mêmes ».
Cet expert en santé mentale a qualifié ce phénomène d’une bombe à retardement. « Il est essentiel que nos familles et nos enfants surmontent les barrières culturelles pour aborder ces sujets tabous. Il faut sensibiliser les enfants en leur fournissant les informations nécessaires pour comprendre ce qui se passe autour d’eux », a-t-il appelé.
Dr Pasteur Mberimbere a quant à lui insisté sur l’importance des consultations prénatales pour évaluer la santé des futures mamans et prévenir les risques de grossesse. « Souvent, les Burundais consultent trop tard. Ceux qui viennent à nous sont souvent des personnes ayant évolué à l’étranger », a-t-il expliqué. Concernant les fausses couches, il a précisé que ’’50 à 60 % des cas sont causés par des anomalies chromosomiques du fœtus’’. Il a ajouté que dans les pays développés, des tests prénatals sont réalisés pour évaluer la santé du bébé à naître.
Les deux intervenants ont souligné l’importance d’impliquer les hommes dans ces questions. « Souvent, seules les femmes s’en occupent », ont-ils déploré. Athanase Ngendakuriyo demande qu’il n’y ait pas de jugement porté contre les couples sans enfants, car « cela blesse profondément les victimes ».
En ce qui concerne la contraception, Dr Mberimbere a reconnu que certaines méthodes, comme les injections contraceptives, peuvent retarder la conception, mais il a souligné que ’’dans 70 % des cas, elles n’ont aucun impact sur la fertilité’’.
Face à ces enjeux, Shamika s’engage à sensibiliser davantage le public. Naomi Irakoze a expliqué que l’association prévoit de collaborer avec des écoles, des clubs scolaires et les médias pour toucher un plus grand nombre de Burundais.
Ces échanges ont permis de mettre en lumière un problème souvent négligé et de poser les bases d’une prise de conscience collective. Shamika compte poursuivre ses efforts pour que le deuil périnatal et la santé mentale ne soient plus des sujets ignorés au Burundi. Les participants ont également eu l’occasion de poser et laisser des questions, permettant à Shamika de s’appuyer sur ces interrogations afin de mieux comprendre les défis que pose ce problème dans la société burundaise.
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