Lundi 23 décembre 2024

Environnement

Où sont les Setemu ?

05/04/2014 6

Jadis garants de la propreté et de la salubrité de la capitale et des lieux publics, les Services Techniques Municipaux, Setemu, sont aujourd’hui pointés du doigt comme ne remplissant pas leur mission. Une accusation rejetée par la direction de ces services qui situe le problème au niveau de la mairie.

Le matériel offert grâce à un don japonais n’est pas entretenu faute de moyens … ©Iwacu
Le matériel offert grâce à un don japonais n’est pas entretenu faute de moyens … ©Iwacu

Bujumbura peut avoir toutes les qualités, sauf celle d’être propre. Les marchés, les rues, les parkings, en bref les lieux publics, sont pour la plupart dans un état de propreté déplorable. La question des déchets et des immondices préoccupe. Et, dès qu’il pleut abondamment, certaines rues de la capitale deviennent impraticables, l’eau de pluie déborde des canalisations et envahit les routes. Pour beaucoup, un seul coupable : les Setemu.

La Mairie, premier client des Setemu

Selon Gordien Ngendakumana, chef du département audit, planification et études, les Setemu disposent d’une autonomie de gestion, car tout travail qu’ils effectuent est rémunéré, et ils n’ont aucune subvention de l’Etat. Sauf une somme donnée annuellement par le ministère des Finances (variant entre 70 et 150 millions) pour l’entretien des stations d’épuration des eaux usées, « 80% des travaux que nous effectuons sont faits pour la mairie qui nous rémunère », indique M. Ngendakumana. En effet, précise-t-il, au départ, la Mairie et les Setemu s’entendaient, au début de l’année, sur les travaux à effectuer, sous la surveillance des agents de la Mairie, et dont la facture était payée par celle-ci à la fin des travaux.

Hélas, ces activités ont cessé depuis bien longtemps à cause du manque de moyens financiers, la Mairie s’étant désengagée dans le payement des frais des services offerts par les Setemu. A titre illustratif : la Mairie payait par m3 d’immondices collectées et il y avait un agent qui contresignait les quantités. A partir des années 2000, le mode de paiement a changé en introduisant le payement forfaitaire de 12 millions Fbu par mois. Pour le moment, ce système est lui-même suspendu.

« Aujourd’hui, la mairie ne paie plus et nos services sont arrêtés. Pourtant, nous avons du matériel offert grâce à un don japonais, mais qui n’est pas entretenu faute de moyens », ajoute Gordien Ngendakumana.

Pourtant, selon la chargée de communication à la Mairie de Bujumbura, Candide Kazatsa, « il y a un contrat avec les Setemu pour l’enlèvement des immondices autour des marchés de la capitale. » Elle précise que cela fait entrer des fonds dans cette entreprise. En plus de ces contrats, quand il y a des travaux à réaliser ou des réparations d’infrastructures routières, la Mairie fait des bons de commande chez les Setemu et paie toutes les factures y relatives.

Gordien Ngendakumana : « Aujourd’hui, la mairie ne paie plus et nos services sont arrêtés » ©Iwacu
Gordien Ngendakumana : « Aujourd’hui, la mairie ne paie plus et nos services sont arrêtés » ©Iwacu

Des solutions de rechange …

« Dans les années 1990, la ville était encore petite, et les Setemu bénéficiaient d’appuis logistiques à travers les coopérations internationales. Mais, avec la crise de 1993, la situation a changé, les appuis ont cessé. Aussi, la ville n’a cessé de s’agrandir rendant ainsi impossible d’enlever les déchets de tous les quartiers de la ville de Bujumbura », indique Mme Kazatsa.

Face à cette situation, les Setemu ont imaginé d’organiser les sociétés privées réunies en association pour faire leur travail. Ces associations signent des contrats avec les ménages pour ce fait. En échange, chaque société doit payer aux Setemu une somme pour l’entretien des décharges publiques (700 Fbu/m3) et des stations d’épurement (1600Fbu/m3).

Cependant, la réticence grandit chez les ménages, à cause du montant élevé, jugent-ils. Mais, d’après Mme Kazatsa, sa fixation se fait entre l’association concernée, l’administration et la population. Cependant, face à cette réticence des ménages, la Mairie mène des sensibilisations auprès de la population pour l’amener à adhérer à ce programme sans grogne.

Est-ce la fin des Setemu ?

L’article 3 du décret N°100/162 du 12 juillet 1983 portant création et organisation de la Régie des Services Techniques Municipaux stipule que l’Etablissement a pour objet l’étude, la réalisation et l’exploitation pour le compte de la Mairie de Bujumbura de tous services techniques, en particulier des travaux de drainage et de voirie, d’évacuation des eaux usées, d’enlèvement des immondices. Les Setemu sont également chargés, du moins sur papier, de construction et de la maintenance des immeubles de l’Etat. C’est dans ce cadre qu’ils ont été chargés de la construction du nouveau marché public. Au départ, en 1979, les Setemu étaient un service d’assainissement de la Regideso. Ils furent réellement créés en 1983, sous la double tutelle des ministères des Travaux publics et de l’intérieur. En juillet de la même année, les Setemu furent sous la seule tutelle du ministère de l’intérieur.

La Mairie a décidé de réorganiser ce secteur. En commençant par sélectionner les différentes sociétés et associations de collecte de déchets sur base de nouveaux documents administratifs (agrément, statuts, registre de commerce, NIF, attestation de non faillite, attestation de non redevabilité à la Mairie et Setemu). Mais également sur base de capacité technique et de certaines conditions, notamment avoir un siège social, avoir au moins un camion couvert, avoir un matériel suffisant de chargement et de déchargement, etc. Plus encore, les sociétés devaient présenter une caution de garantie de 2 millions de FBU, et avoir un compte dans une banque de la place. Sur les 26 sociétés qui ont déposé les documents requis, 18 ont été retenues, selon le conseiller économique et socioculturel, au cabinet du Maire.

Et cette réorganisation ne s’arrête pas là. Dorénavant, les sociétés doivent résilier leurs contrats avec leurs anciens clients. Et pour cause, elles ont été dispatchées dans les différentes communes de la capitale. Mais les sociétés concernées ne l’entendent pas de cette oreille. Pour elles, le commerce doit être libéral, et les sociétés n’ont qu’à chercher elles-mêmes leurs clients.

Des sanctions sont prévues pour les sociétés qui n’honoreront pas leurs responsabilités. D’abord les 2 millions de caution seront saisis en cas de non payement à la Setemu. Et de surcroît, si une société ne travaille pas là où elle a été affectée, elle se verra dans l’obligation de fermer ses portes.

Forum des lecteurs d'Iwacu

6 réactions
  1. Richard

    Je me pose cette question, est-ce que le Burundi évolue au 21ème siècle ou au 19 ème. Il y a une semaine que vous nous disiez que la Mairie a collecté 8.000.000 d’impôt sans nous préciser l’argent collecté à la signature de chaque document administratif et les 500 fr Bu d’aide aux indigents.
    J’aimerais que la porte parole de la Mairie nous explique l’intérêt de payer des impôts dans la Ville de Bujumbura. Les impôts ne devraient pas uniquement assurer la belle vie du Maire de la Ville et de ses agents mais plutôt au service publique dont le transport, la propreté, la sécurité des biens, etc.
    Je pense que le manque de sérieux de certaines autorités Africaines ne permettra jamais à l’Afrique d’avancer.
    Donc, le Burundi est malade et n’a pas d’autorités visionnaires. La ville de Kigali devrait inspirer les pays limitrophes dont le Burundi. Ce n’est pas en mangeant jusqu’à l’éclatement de ton ventre que tu deviens un bon chef. Je reste convaincu que la seule fois de développer une mairie est de permettre à la population d’élire nos maire et non de les désigner car ils ne sont comptable de rien ,uniquement du parti au pouvoir qui les a promus à ce poste juteux.
    Quand un étranger arrive à Bujumbura et qu’il voit la saleté, les véhicules de transport pourris , il se demande s’il est dans une capitale ou dans un village sans notable.
    La mairie de Bujumbura n’honore pas le Burundi et n’est pas digne d’être une capitale d’un pays indépendant depuis 50 ans;
    Pour terminer, j’aimerais une réponse à mon interrogation, pourquoi en pleine guerre , la ville de Bujumbura avait des feux clignotants dans les grandes carrefours mais actuellement où on vient de passer bientôt 10 ans de stabilité, ces feux ont disparu et la conduite sur Bujumbura se fait dans le désordre jamais connu dans aucune autre ville que Bujumbura

  2. Venant

    En matière de police municipale, nous avons beaucoup de choses à apprendre des autres. J’ai de la misère à comprendre que la mairie de Bujumbura et les Setemu constituent deux entités distinctes. Cela n’a vraiment aucun sens. Imaginez-vous une seconde que vous êtes maire d’une ville et que vous n’avez aucun pouvoir d’offrir les services techniques dont les citoyens ont besoin. Alors, vous êtes maire pour faire quoi? Eh bien, rien!!! Vous n’avez pas de raison d’être puisque vous ne servez à rien. Cette situation a été créée à l’époque de Bagaza pour éviter que le directeur général des Setemu ne dépende du maire, ce qui est une aberration.

    Il faudra, tôt ou tard, que le statut de la ville de Bujumbura dont la population ne cesse de croître soit revu pour que:

    1. Le gouvernement accorde plus de pouvoirs à la mairie de Bujumbura;

    2. Des partis politiques, différents de ceux qui sont en compétition pour gouverner le pays, voient le jour, élaborent leurs programme de développement de la ville, battent campagne et entrent en compétition pour gouverner la ville. Le chef du parti qui gagne les élections deviendrait automatiquement le maire de la ville. Il prendrait la présidence d’un comité exécutif (élus) chargé de prendre les grandes décisions sur les orientations et l’administration de la ville.

    3. L’autonomie de gestion accordée aux Setemu soit supprimée et que l’organigramme de la mairie comporte une direction générale chargée de coordonner tous les services techniques. Cette direction générale devrait coiffer plusieurs directions, chacune s’occupant d’un service spécifique comme l’assainissement, la production et la distribution d’eau potable, la voirie, les sapeurs pompiers, les finances, la communication, etc. Un corps de fonctionnaires municipaux serait donc constitué pour fournir les conseils nécessaires aux élus qui sont chargés, eux, de prendre des décisions.

  3. Munyamulenge

    Bujumbura de l’Epoque Bagaza était propre,comme Kinshasa des années 1970-80.Avec des plans directeurs d’urbanisation bien respectés ,ces deux villes faisaient la fierté des capitales africaines. Aujourd’hui, c’est Buja-KIN poubelle. Kigali à cette époque, ressemblait à un bidon-ville, sans plan directeur(master plan),les constructions se faisant dans l’anarchie totale, sans normes à suivre. Mais depuis la prise du pouvoir par le FPR en 1994,avec un leadership visionneur, Kigali est entrain de se métamorphoser, avec des tours ressemblant à celles de New-York, avec des services d’eau et assainissement de la Mairie de Kigali, qui fonctionnent à la merveille, avec un système de transport urbain impeccable, avec des bus neufs. Même la ville de Goma(RDC),voisine de Gisenyi, a fait appel à une société de transport de Gisenyi ,lors d’un colloque international sur les minerais. Evidement, les congolais ont été furieux de cette location des bus du voisin (ennemi) ,comme l’avait rapporté le journal J.A ,en Mars 2014.
    Conseil gratuit :Il faut être humble, et apprendre du voisin ce qui marche bien. Le pouvoir de kigali, devra aussi apprendre, le débat démocratique à la burundaise, évidement, avec lignes rouges infranchissables (politiques divisionniste et génocidaire).Bravo à la ville de Kayanza qui oblige les motards, le port des casques, comme le fait depuis une dizaine d’années, la ville voisine d’outre-Akanyaru.

  4. Esprit

    La ville de Bujumbura est à l’image de ses dirigeants. C’est normal, ils n’ont pas d’ordre dans leurs têtes, il n’y en aura pas dans leur ville. La propreté c’est d’abord un esprit.

  5. J Paul

    Bonjour SETEMU Nyakuri!

    • Young businessman!

      Vous voulez encourager la mediocrité dans le business?
      LaisseZ le business aux hommes d’ affaires! Laissez- les choisir leurs client! Cela sent des magouilles!
      Encouragez plutot une competion et voyez comment les caisses de l’ Etat se remplissent par la creation d’ emplois et paiement des taxes!
      Ainsi vous pourrez controler ceux qui honorent leurs contrats surtout en qualité des services qu’ ils offrent au public.
      La mairie aura plus de temps ( et moyens iinanciers d’ ailleurs) de surtout parler aux populations urbaines de comment ils percoivent la qualité de service offerts par ces sociétés! Creer plutot une unité mobile d’ inspections qui travaille avec les gens locaux. Si vous voulez que notre chère patrie avance et que beaucoup aient du travail et que l’ Etat fasse entrer les taxes au trsor public, le services publics dervront apprendre a ne pas s’ ingerer dans le fonctionnement des entreptises priveés, mais que ces dernieres ecoutent plutot leurs clients et aient peur de les perdre. Dans cette manière ces sociétes se sentiront plus interpellés de livrer les services de qualités si sans cleints elles n’ existeraient pas!
      Vous n’ aurez meme pas besoin d’ imposer ces sanctions car la meilleur punition d’ une entreprise est la perte de la clientelle et pire de sa reputation. C’ est ce que les autres ont fait et continuent de faire.
      Si on reussit dans cette maniere vous verrez meme d’ autres types de business voir le jour grace a la competitivité que l’ etat encourage et la democratie dans le cadre d’ etre client de qui l’ on veut!
      a bon enteur salut!
      Un burundais qui veut son pays prosperer!

A nos chers lecteurs

Nous sommes heureux que vous soyez si nombreux à nous suivre sur le web. Nous avons fait le choix de mettre en accès gratuit une grande partie de nos contenus, mais une information rigoureuse, vérifiée et de qualité n'est pas gratuite. Nous avons besoin de votre soutien pour continuer à vous proposer un journalisme ouvert, pluraliste et indépendant.

Chaque contribution, grande ou petite, permet de nous assurer notre avenir à long terme.

Soutenez Iwacu à partir de seulement 1 euro ou 1 dollar, cela ne prend qu'une minute. Vous pouvez aussi devenir membre du Club des amis d'Iwacu, ce qui vous ouvre un accès illimité à toutes nos archives ainsi qu'à notre magazine dès sa parution au Burundi.

Editorial de la semaine

Que la compétition politique soit ouverte

Il y a deux mois, Iwacu a réalisé une analyse de l’ambiance politique avant les élections de 2020 et celles à venir en 2025. Il apparaît que la voix de l’opposition est presque éteinte. Il n’y a vraiment pas de (…)

Online Users

Total 3 203 users online