Le secteur du lavage de véhicules traverse une saison morte à Mulongwe. Comme si ce phénomène ne suffisait pas, ces laveurs des véhicules s’entredéchirent aujourd’hui.
<doc4800|right>Sur la berge de la rivière Mulongwe qu’ils ont investie, un groupe opère en amont du pont, un autre en aval. Entre les deux, plus de contacts amicaux. Seules fusent des invectives vite absorbées par le tumulte du courant d’eau et anéanties par la structure du pont. C’est un feu qui couve jusqu’ici, mais le pire est à craindre dans cette cité sans maison de lavage automatique des véhicules.
« A la base de cette situation malsaine, un problème de leadership qui a abouti à l’implosion d’un groupe naguère uni », indique Tshiyoyo Mashauri. Ce dernier, ancien soldat démobilisé, appartient au groupe dit de Kasenga, celui qui opère en aval. Il affirme que tout est parti avec l’apparition du nommé Bishama sur ce site. Le jour qu’on l’a aperçu sur ces lieux, poursuit-il, Bishama a rassemblé autour de lui tous les laveurs des véhicules présents. Il ajoute qu’il s’est autoproclamé leur président et a entreprit de les organiser en association. « Cotisation, mutualisation, perception de la « taxe »… Un rançonneur, quoi ! », renchérit Mapito Mkombozi, élève en 6ème année des humanités Sociales. D’où la révolte de ceux qui évoluent aujourd’hui sur la plage de Kasenga.
Par ailleurs, l’environnement sociopolitique du pays aidant, d’autres animateurs de cette économie informelle ont ainsi vu le jour en aval de la même rivière exploitée. Contrairement au groupe de Mulongwe qui reconnaît l’autorité de Bishama, c’est en quelque sorte la jungle, à Kasenga. Pas de chef, juste un semblant de loi tacite qui régit le secteur. Ici, plus qu’ailleurs, une fébrile agitation s’empare de ces jeunes garçons avant qu’ils ne se lancent au- devant de tout véhicule qui se présente. Toujours agités, tenant un chiffon dans une main, du savon dans l’autre, ils proposent leur service. Dans un camp comme dans l’autre, un minibus est nettoyé moyennant 2.000 Fc au moins ; 1.000 Fc pour la voiture ; 400 Fc pour la moto ; entre 200Fc et 300 Fc pour le vélo et 3000 Fc pour le camion. Pendant la bonne saison, celle des pluies, il arrive que ces « cleaners » reçoivent jusqu’à 5 clients de toutes catégories par jour.
Inquiétudes
La saison sèche n’occasionne pas le moindre souci sur la quantité des eaux de la Mulongwe qui diminuent, certes. Cependant, la crotte ramenée des routes de Bukavu et de Bubembe diminue aussi et l’affluence des clients d’autant. Maintenant que les pluies ont cessé, il y a plus de poussière sur ces pistes. Et la poussière a un « avantage » pour les automobilistes au détriment des cleaners. « Il suffit juste de passer un chiffon sur la carrosserie pour l’enlever », se console Murhabazi Faustin, conducteur chez Congo Oil.
Pire, l’activisme de Bishama inquiète. Le « président » des nettoyeurs des véhicules de Mulongwe, que nous n’avons pas pu joindre, aurait multiplié des descentes musclées sur le terrain… Ses détracteurs ne le reconnaissent pas comme un des leurs. « Il n’a jamais touché au chiffon, ni trempé ses pieds dans les eaux glaciales de Mulongwe pour sa survie », dénoncent-ils. Les deux camps reconnaissent que M. Bishama – toléré par les uns et rejeté par d’autres – se fait, désormais, accompagné par des policiers dans ses rondes. Il perçoit dans son fief des cotisations abusives allant jusqu’à 40% sur la recette des laveurs de véhicules.