Dans le Cid, Don Diegue disait: « Œuvre de tant de jours en un jour écartée! » C’est ce que répète, c’est ce que ressent François Habonimana, le malheureux propriétaire de la maison, qui allait abriter la permanence du parti Congrès national pour la liberté, CNL, incendiée.
Plongé dans une angoisse, une désolation, une incompréhension, ce citoyen de la commune Nyabiraba ne demande à qui veut l’entendre qu’une chose : la réparation. L’espoir d’un avenir meilleur a été réduit en cendre. « J’ai beaucoup investi dans la construction de cette maison. J’espérais en tirer de l’argent. Mes enfants vont mourir de faim. » Sa maison n’a pas été brûlée par un pyromane, encore moins un psychotique. L’enquête menée par les journalistes d’investigation d’Iwacu montre clairement que c’était intentionnel, qu’une main criminelle a allumé délibérément l’incendie. Par ailleurs, le Tribunal de Grande Instance de Bujumbura vient de condamner à deux ans de prison 9 militants du CNL pour « complicité à l’incendie volontaire. »
La commune Nyabiraba est en train de s’engouffrer inexorablement dans un tunnel sans issue. En effet, après l’incendie, la population paraît divisée. Une partie, surtout les membres du CNL, semblent ne pas croire au verdict de la Justice : « La permanence a été brûlée juste après que les policiers ont embarqué les militants qui veillaient. » Ils ne comprennent pas pourquoi un tel crime a pu se produire à quelques mètres d’une position militaire. Plus grave, un extrait audio a circulé sur les réseaux sociaux où une voix d’homme menace François Habonimana de détruire sa maison si jamais elle était louée pour abriter la permanence du CNL. Ces habitants sont convaincus que la voix est celle de l’administrateur communal. Même si ce dernier réfute les accusations, le propriétaire de la maison affirme le contraire: « Je ne sais pas qui l’a enregistré, mais il m’a un jour téléphoné et il a tenu ces propos.» Ils sont convaincus que le pouvoir est dans les mains des Imbonerakure. D’ailleurs le chef de cette ligue des jeunes du parti au pouvoir peut ordonner à un policier d’emprisonner les gens. «En tant que membre du comité mixte de sécurité, j’ai le droit d’arrêter toute personne que je soupçonne de troubler la sécurité du pays».
In fine, manque de confiance à la justice, aux forces de l’ordre, à l’administration, quelle sera la suite ? En attendant la réponse, que les supplications de François Habonimana soient entendues et exhaussées.