Dans sa présentation du rapport de mise en œuvre du plan d’action du gouvernement pour le 2ème semestre exercice 2023 devant le Parlement, le Premier ministre a fait le point sur la relance des travaux de construction du barrage hydroélectrique sur la rivière Kaburantwa en commune Mugwi à Cibitoke.
C’est ce lundi 2 octobre, devant un parterre de parlementaires que le Premier ministre Gervais Ndirakobuca a fait savoir qu’au jour d’aujourd’hui, le taux d’exécution des travaux de construction de ce barrage sont à 94%. C’est une avancée pour cette centrale dont les travaux peinent à s’achever pour pouvoir fournir ses 20 MW.
Selon le Premier ministre, des turbines et d’autres accessoires devraient être installés dans l’emplacement de cette centrale. « Cela a été fait mais le barrage n’a pas encore été mis en service. Pour cause, l’entreprise d’exécution des travaux n’a pas fourni les équipements et le personnel à temps », regrette-t-il.
Et ce n’est pas tout comme contretemps. A peine les contrats avec la société Angelique International Limited, le maître d’œuvre, signés et avant même le début effectif des travaux, indique le Premier ministre, cette entreprise a demandé un avenant au contrat équivalent à 10 millions de dollars.
« Le contrat initial était de 76 millions de dollars. Le contrat revu était de 86 millions de dollars. La banque indienne Exim Bank a fait savoir que le nouveau contrat était non révisable », a fait savoir le Premier ministre.
Et là, de sérieux problèmes ont commencé : « Il y a eu entretemps la pandémie du Covid, les employés ont été frappés par cette maladie et l’entreprise s’est retrouvée sans argent pour continuer les travaux » justifie-t-il.
Même si les travaux étaient relativement avancés, avec un taux d’exécution dépassant les 90 %, explique le Premier ministre, le temps se faisait long et la banque qui avait accordé le crédit, a commencé à exiger le remboursement du crédit et des arriérés s’accumulaient.
« Exim Bank a refusé de payer les factures de l’entreprise Angelique International Limited et comme conséquences les travaux se sont arrêtés ». Au deuxième trimestre, fait savoir Gervais Ndirakobuca, les arriérés étaient de plus de 8 millions de dollars.
Selon le Premier ministre, le gouvernement a décidé d’engager des négociations avec cette banque pour faire comprendre qu’il serait impossible de procéder au remboursement du crédit contracté alors que le barrage n’est pas encore fonctionnel, sans que les Burundais ne bénéficient de cette centrale hydroélectrique.
Que de contretemps !
« Cette banque a exigé d’avoir d’abord son dû et voir la suite après. Le gouvernement burundais a déjà payé la moitié. Nous leur avons signifié que nous ne pouvons pas payer la totalité pour une centrale qui n’a pas encore produit l’électricité. Mais le taux d’exécution des travaux de construction de ce barrage est satisfaisant », a tenu à rassurer.
Il y a toujours un hic : « L’entreprise qui a repris les travaux de construction de cette centrale hydroélectrique sur la rivière Kaburantwa en commune Mugwi de la province de Cibitoke, demande 15 millions de dollars pour le finissage ».
D’après le Première ministre, ce barrage a connu beaucoup d’aléas. Pour ce projet, note-t-il, les gens se sont contentés des vieilles études faites à l’époque de la première République de Jean-Baptiste Bagaza, et n’ont pas fait des réajustements nécessaires comme pour la route de 21 km macadamisée reliant ce barrage à l’axe principal évalué à l’époque à 3 millions de dollars.
C’est en 2011 que le projet de construction de cette centrale hydroélectrique, Kabu-16, a été adopté par l’Assemblée nationale. Les travaux devraient commencer vers la mi-novembre 2012 pour s’échelonner sur 34 mois mais ils n’ont débuté qu’en 2017. A un certain moment la fin des travaux de ce projet était prévue pour le 31 mars 2023.
Mais ces travaux n’ont fait que piétiner suite aux différents contretemps comme le refus d’envoi des équipements suite au bras de fer sur leurs prix, il y a eu le Covid, le manque du personnel, des études accusant des lacunes, des demandes de révision des prix et des rallonges des délais d’exécution des travaux initialement convenus.
Mais il y a eu surtout des retards dans le remboursement du crédit et des arriérés d’intérêts. Et comme corollaire, Exim Bank a suspendu les paiements à l’entreprise Angelique International Limited qui avait gagné la confiance du gouvernement burundais pour l’exécution de ce projet de construction de la centrale hydroélectrique, Kabu 16.
Je viens de lire dans le journal Burundi Eco d’avril 2023 un article sur le même sujet. Il montre la même photo du barrage et donne presque les mêmes informations reprises dans Iwacu. Mais avec un plus, qui vaut la peine de savoir: Burundi Eco rapporte les propos d’un responsable du ministère de l’Hydraulique, de l’Energie et des Mines qui affirme que le Burundi et le Rwanda ont obtenu en même temps les mêmes prêts, aux mêmes institutions financières; ils ont confié les travaux à une même entreprise Angelique International Limited. Tout va bien jusque-là. Mais lisez bien, je cite: « mais la centrale hydroélectrique rwandaise découlant de ce prêt fonctionne depuis 2017 »!
Bien sûr que les pays ne fonctionnent pas de la même façon, faire des comparaisons dans l’exécution des projet peut être périlleuse, mais là je suis resté bouche bée, avec beaucoup de questions.
(Titre de l’article dans Burundi Eco: Kabu-16 : Les travaux de construction avancent à pas de tortue).
L’indépendance énergétique constitue la condition sine qua non de tout développement d’un pays.
Sans vouloir être redondant, j’ai l’impression qu’au cours de l’histoire du Burundi, il y a toujours eu des bâtons dans les roues dans la majorité des projets de développement électrique du pays. Sabotages internes et/ou externes, corruption, confiance aveugle, mauvaise planification des ressources, incompétence, manques de suivis appuyés, absence de contrôle de la qualité aux différentes étapes et stades d’exécution, contrats mal négociés, etc. D’ailleurs, en y repensant, rares ont été les projets publics qui se sont déroulés sans anicroche, peu importe l’époque ou le régime qui était aux commandes!.. Sauf sous Bagaza!… Il faut le reconnaître.
Il va falloir que les décideurs prennent conscience du problème et décident s’il doivent continuer de se fier à des dons ou s’ils doivent recourir à des ressources internes (patriotiques et/volontaires) pour prendre en charge ce type de projets. Les gens qui sont capables de se mobiliser pour des cotisations finançant les élections ou pour des travaux communautaires seraient capables d’apporter du soutien, sous n’importe quelle forme, pour réaliser de bout en bout ces projets jusqu’à leur aboutissement.
Mais il faut y aller avec modestie : commencer avec de petits projets pour prendre de l’expérience et développer le savoir-faire, ensuite y aller avec ambition. Il suffit d’un peu de motivation… par d’un peu de Bon Motivateur!… mais avant, il faut mettre en place des conditions qui minimisent les risques et qui dissuadent le recours aux anciennes pratiques conduisant au mêmes conséquences.
Sur la photo, le barrage a l’air plutôt fatigué si pas en ruine. C’est normal car le temps, plus de 5 ans déjà, use les infrastructures en chantier non entretenues. D’ici à la réception de l’ouvrage, si on arrive à négocier les rallonges monétaires (qui s’allongent d’avantage avec le temps), nous risquons d’avoir sur les bras un barrage extrêmement cher et déjà trop vieux.
On ne peut pas s’arrêter a si bon chemin, le gouvernement nous vante la coopération avec les chinois. C’est le moment de la mettre en pratique.
Les banques on sait comment ca marche surtout quand le client n’inspire pas confiance au niveau solvabilité.
Au lieu de se contenter de 100 laptops ou un truc comme ça, le gouvernement doit demander aux chinois pour nous aider sur ce projet structurant quite a ce qu’ils participent a l’exploitation pour une certaine période
Sinon Bagaza même s’il a fini dictateur, il avait eu des idées pour développer le pays. Les autres n’ont fait que copier sans actualisation. Problème de gouvernance/competence manifestement.
Lors du Conseil des ministres du 5 avril 2023, le ministre de l’Hydraulique, de l’Energie et des Mines a presente une note sur KABU 16 et il me semble que les reponses/promesses du premier ministre ne reflectent pas ce qui a ete convenu apres analyse de la note.
« A l’issue de l’analyse de la note, le Conseil des Ministres a formulé les observations et les
recommandations suivantes :
– Demander un délai de grâce à Exim Bank d’Inde, en faisant valoir les arguments ci-après :
o Lors de la négociation du crédit, il avait été convenu que le remboursement se ferait
avec le début de l’exploitation du barrage ;
o La pandémie Covid-19 constitue un cas de force majeure qui a handicapé
l’avancement normal des activités ;
o Le remboursement ne devrait pas commencer alors que le décaissement du crédit
emprunté n’est pas achevé.
– Négocier des fonds additionnels auprès de Exim Bank d’Inde pour les travaux qui restent,
ainsi que le déblocage du montant du crédit restant ;
– Chercher une maison de surveillance habilitée pour analyser et étudier le fondement des
réclamations de l’Entreprise qui exécute les travaux;
– Suspendre les travaux liés au bitumage de la route qui accède au barrage afin de réduire
la facture des travaux qui restent,;
– Explorer toutes les voies possibles pour que tout le matériel commandé en Inde pour ce
Projet soit livré ;
– User de tous les moyens possibles pour que la construction du barrage se termine le plus
rapidement possible…. »
https://www.presidence.gov.bi/wp-content/uploads/2023/04/Communique-Conseil-05-avril-2023.pdf
Ce n’est pas la première fois qu’ils font confiance à une entreprise pour finir par exprimer des regrets.
Dans le domaine des barrages, il y a une qui a promis de construire un barrage hydroélectrique à Mpanda pour 54 milliards. Le contribuable a payé. Visiblement, il y a des invariants dans l’attribution des marchés.
Ils avaient également fait confiance à cette fameuse entreprise « Sino Africa Trading and Investment » à laquelle le site de l’ancien marché central avait été concédé pour une durée renouvelable de 50 ans. Heureusement que des voix se sont élevées pour que le gouvernement rétropédale.
https://fr.igihe.com/les-irregularites-contenus-dans-le-projet-de.html
Pour une infrastructure aussi complexe, comment expliquer que les concepteurs ont tout bêtement copié un projet qui date de l’ère Bagaza. Sans même penser à mettre à jour les coûts selon les normes actuelles. On a perdu le barrage de Mpanda, on risque aussi de perdre celui-là. C’est de la négligence et de l’incompétence au plus haut point. C’est aussi à voir, s’il n’y a pas corruption dans la machinerie.
Mpanda gate and now kaburantwa gate.😇😭