A Kanyenkoko, dans la ville de Rumonge, au centre nommé Art in life, de jeunes handicapés et valides apprennent des métiers ensemble. Deux catégories qui apprennent à se connaître et se comprendre.
Les lundis, les mercredis et les vendredis, de jeunes handicapés et valides y apprennent des métiers d’art : le dessin, la peinture et la couture. Ce qui étonne les visiteurs du centre, c’est l’échange en langage de signes qui sautent aux yeux juste à l’arrivée. Tous ceux qui suivent la formation connaissent ce langage ou sont en plein apprentissage. « Ici des sourds-muets, malvoyants, albinos apprennent le dessin, la peinture et la couture », fait savoir fièrement Danny Kasembe Bindariye président du Centre. Pour le moment, Kasembe confie que 16 sourds-muets et 18 autres jeunes qui ont divers handicaps sont en train d’être formés au centre. « Des jeunes valides aussi qui veulent apprendre un métier sont les bienvenus à Art in life », affirme Kasembe.
Gateka Larma, 20 ans et valide, a gratuitement appris le langage des signes et la couture à ce centre. « Après avoir compris leur langage, les sourds-muets sont mes amis, j’ai connu leurs noms, leurs domiciles, on se connaît », affirme-t-elle fièrement. D’après elle, le voisinage s’étonne de la voir tisser des amitiés avec ces catégories de personnes handicapées. Or, observe-t-elle, ses voisins pourrait faire comme elle, en ayant le courage d’apprendre le langage des signes. En plus de l’amitié, il gagne de l’argent : « Aujourd’hui, je peux coudre un tissu et gagner 2000 à 3 000 BIF. » Elle considère qu’elle a eu une chance d’apprendre un métier sans rien dépenser. A ce centre, précise-t-elle, tous les valides qui y sont formés apprennent le langage des signes. «Nous communiquons parfaitement, sauf ceux qui traînent les pieds pour apprendre».
Initiative saluée
Le but du centre, affirme Danny Kassembe, membre fondateur, est de donner des compétences à ces jeunes « pour qu’ils puissent travailler pour leur développement et leur éviter une vie de mendiant». Pour lui, cette catégorie de personnes a des compétences même s’il y a encore des gens qui estiment qu’elles méritent d’être laissées à elles-mêmes. Il se réjouit qu’à Art in life, des jeunes handicapés ont la chance d’apprendre des métiers.
« Ici j’échange facilement avec mes amis camarades, avant je restais à la maison avec mes parents, et c’était difficile d’échanger avec eux », se réjouit Moustapha Nduwimana, sourd-muet, 22 ans. Il suit sa formation à Art in life depuis février 2021. Il espère vivre de son métier dans l’avenir : « Je sais déjà dessiner, bientôt, je serai en mesure de mettre des écrits sur des tissus, sur les motos, maisons, etc.» D’après lui, avant de couvrir le centre, il passait tout son temps à la maison sans rien faire. Il soutient qu’il n’a pas encore jusqu’à maintenant vendu un dessin ou un tableau contre de l’argent, mais ne doute pas qu’il y parviendra.
Jacqueline Munezero, une autre sourde-muette, est en train d’apprendre la couture. Elle aussi affirme être plus à l’aise au centre qu’à la maison et dans son voisinage : « Là-bas, ils veulent utiliser un langage des signes non conventionnel pour me parler. » Maintenant, elle confie être capable de coudre un tissu sans aide d’une autre personne. Pour cette fille de 21 ans, son avenir serait garanti si elle pouvait avoir une machine à coudre et d’autres matériels connexes pour elle.
Le centre face aux défis
Bien que le centre vienne de passer deux ans à former des personnes vivant avec handicapes, il fait face à mille et un défis. « On n’a pas encore bénéficié d’un appui », regrette Danny Kasembe Bindariye, chef de centre. Il fait savoir que ce centre est caractérisé par un manque criant de matériels tels que les tableaux pour dessin, les craies de dessin, les bancs, le tableau noir, etc. Sans désespérer : « Cela viendra petit à petit. » Ses formés, eux, déplorent le fait que le bâtiment qui abrite le centre est loué. «Nous demanderions au gouvernement de nous donner un espace où nous pourrons travailler gratuitement », supplie Larma Gateka. « Nous manquons aussi des tissus pour apprendre la couture et ils coûtent énormément cher », renchérit une autre bénéficiaire du centre. Ces jeunes handicapées et artistes demandent notamment à l’administration provinciale de Rumonge de penser à eux et de les appuyer dans la recherche des marchés : « Nous pouvons, par exemple, coudre des pagnes souvent utilisés au moment des fêtes nationales.»
Consolateur Nitunga, gouverneur de la province de Rumonge, lui, fait savoir que plusieurs catégories de personnes réalisent des projets de développement. « C’est le cas de ces personnes handicapées qui ont besoin d’être soutenues», souligne le gouverneur. Et de promettre que s’il découvre que ce centre vend de bons produits, il demandera aux services provinciaux d’acheter leurs produits. Il leur demande de viser l’excellence, car, a-t-il expliqué, « la qualité impose le coût».