Ils sont 36 employés licenciés à la Régie des Productions Pédagogiques (RPP), à cause des problèmes économiques, selon le directeur général de cette entreprise. Ces travailleurs dénoncent un licenciement abusif et illégal.
<doc4075|left>« Les critères de notre licenciement sont contraires à la loi », annonce Domine Niyonsaba, présidente du Syndicat des Travailleurs de la Régie des Productions Pédagogiques (STERPP). Elle est aussi parmi les employés licenciés. Pour elle, le directeur général de RPP a sciemment violé les articles 70 et 258 du code du travail. L’article 70 stipule que les critères de licenciement pour raisons économiques sont fixés par conventions collectives ou à défaut par ordonnance du ministre ayant le travail dans ses attributions. Cet article précise les critères : la qualification et l’aptitude professionnelle, l’ancienneté de service, l’âge ainsi que les charges familiales. Quant à l’article 258, « tout licenciement ou tout acte interprétatif de licenciement d’un représentant du personnel au conseil d’entreprise ou de ses suppléants, envisagé par l’employeur ou son représentant, doit être soumis à l’accord de l’Inspecteur du Travail. »
La présidente du STERPP déclare que les critères de licenciement considérés sont injustes : « Il a arrêté les critères par service au lieu de considérer les employés dans leur ensemble. » Le D.G. a aussi, selon elle, considéré la qualification en premier lieu : « Or, il peut renvoyer un qualifié et ne pas inquiéter un non qualifié. » Il a également tenu en considération l’aptitude professionnelle : « Cependant, si vous n’êtes pas l’un de ses protégés, il ne peut pas vous envoyer renforcer vos capacités professionnelles. »
<doc4077|left>D’après Domine Niyonsaba, la faillite de RPP a été provoquée pour nous licencier. « A son arrivée en 2008, il a ordonné que les dettes de l’Etat envers notre entreprise soient considérées comme des créances non recouvrables », explique-t-elle. En outre, elle se demande comment la RPP a donné des gratifications aux employés, en janvier 2012, alors que le D.G affirme qu’elle connaissait des problèmes financiers. Et de préciser : « Paraît-il que notre DG veut que RPP soit privatisée afin d’être parmi les actionnaires. »
« J’ai scrupuleusement respecté la loi »
Déo Rurimunzu, directeur général de RPP, nie toutes ces allégations. Il affirme que l’article 24 du code du travail détermine les critères qu’il a arrêtés : « Aptitudes professionnelles, charges familiales, qualification professionnelle. » M. Rurimunzu indique que ceux qui soutiennent de tels propos sont de mauvaise de foi, car selon lui, il a tenu beaucoup de séances d’explication de sa décision. L’article 24 du code du travail stipule que « l’employeur peut, s’il l’estime utile, faire procéder à un examen médical d’embauche(…) »
Et de préciser que l’on ne peut pas considérer le personnel dans son ensemble quand on veut le licencier : « C’est par poste et par service. Sinon,on peut être docteur sans savoir utiliser la machine. » Déo Rurimunzi assure ne pas avoir violé les articles 70 et 258 du code du travail : « J’ai mis en application les décisions et recommandations du conseil d’administration. » Le D.G. de RPP précise que, parmi les huit représentants du personnel, trois seulement seront licenciés : « J’attends l’autorisation de l’inspecteur du travail avant de les renvoyer. »
Rurimunzu nie avoir annulé les dettes de l’Etat envers sa société en 2008 : « Ce sont des informations erronées et sans preuves, car je n’en ai pas le droit. » Il ajoute qu’en cas de privatisation, il n’a pas le droit d’être parmi les actionnaires.
<doc4076|right>« Plutôt baisser les salaires que réduire le personnel »
Cette compression du personnel de RPP a été mal justifiée, selon le président de la Centrale des Syndicats du Burundi (CSB), Tharcisse Nibogora. Pour lui, RPP ne pouvait pas avancer la perte de monopole du livre alors qu’elle est unique au Burundi, dispose d’un personnel qualifié et expérimenté qui peut produire des documents de qualité. Et d’ajouter que l’entreprise dispose d’équipements performants et reçoit régulièrement des aides extérieures.
La faillite de RPP, poursuit Nibogora, est causée par la mauvaise gestion de l’entreprise, et surtout de son imprimerie. Il considère, d’ailleurs, ces licenciements comme abusifs, car on n’a pas tenu en considération l’ancienneté et la compétence professionnelle : « On a visiblement violé l’article 70 du code du travail. »
Le président de la Confédération des Syndicats du Burundi (COSYBU), à son tour, signale qu’à cause de cette mesure, il y aura carence de livres dans les écoles, seront chers, et partant la qualité de l’enseignement baissera. En outre, ajoute-t-il, ces gens licenciés viennent de perdre leur emploi et leurs familles connaîtront des difficultés financières. « Il fallait un dialogue entre la direction et les employés. Afin de privilégier la baisse de salaire et non la compression le personnel. »
Tharcisse Gahungu estime qu’il faut plutôt limoger les dirigeants qui ruinent les entreprises de l’Etat, à commencer par celui de RPP : « C’est paradoxal que l’Etat affirme avoir l’ambition de créer des emplois et renvoie ceux qui travaillent déjà. »