A défaut de réhabilitation dans les délais, les routes nationales RN1 et RN7 pourraient bientôt être impraticables. Des nids de poule, des cassures, des affaissements, des effondrements, etc. Les usagers sont dans le désarroi.
Bujumbura-Jenda(RN7), le calvaire commence déjà après le camp Muha. Des manœuvres à tout instant, les véhicules s’arrêtent sans cesse pour céder le passage. On redoute un accident à chaque minute. Un aide-chauffeur, déverse toute sa rancœur : «Beaucoup de véhicules se retrouvent dans les garages à cause de ces nids-de-poule. »
Il faut attendre encore quelques mètres, puis atteindre la rivière Kamesa. Là, une situation encore plus préoccupante. Lundi 17 février, trois jeunes hommes appuyés sur les bordures du seul pont de cette rivière semblent abasourdis. Leurs regards se rencontrent sur une partie du pont qui «disparaît» petit à petit.
Avec la force des pluies, cette rivière qui redescend lentement d’une montagne à pente abrupte de Kanyosha, a emporté une partie de la terre en bas du pont. Le pont semble avoir glissé pour remplacer la terre partie, emportant avec lui environ trois mètres de la voie. «Elle s’effondre jour après jour. Dimanche, par exemple, elle ne montrait que des cassures», explique un homme de la localité.
La partie de la route qui reste est elle-même en phase d’affaissement. « Avec les passages des camions l’effondrement va aller très vite». Les véhicules se relaient sur la partie restante, la passerelle est trop étroite.
Des conséquences multiples
Outre le mouvement lent sur la partie qui menace aussi de finir dans l’eau, les conséquences de l‘effondrement s’avèrent lourdes. Depuis plusieurs semaines, les habitants des quartiers Kamesa (Kanyosha mairie) et Kinanira (Musaga) souffrent cruellement du manque d’eau potable. En cause, dans la foulée de la destruction de la route, un tuyau qui alimentait les deux quartiers s’est cassé. «La Regideso a dû fermer cette ligne à la source pour bloquer l’eau qui se déversait dans tous les sens», commente David, un jeune homme de Kamesa.
Depuis, pouvoir se procurer de l’eau potable est un véritable parcours du combattant. «On doit escalader la montagne pour puiser là-haut, à Mutendeli. C’est très fatigant», regrette Jeannette, une nounou de Kinanira. «Quand il pleut, c’est eau difficilement accessible est une manne ». Les habitants l’utilisent pour leur consommation. «Pour la cuisson, la lessive, la vaisselle , on se rabat sur l’eau de la Kanyosha». Jeannette redoute les maladies des mains sales.
Un chauffeur d’un bus, agence Buragane, se dit très inquiet : «Si la route n’est pas réhabilitée dans les plus brefs délais, nous risquons de vivre un cauchemar.» Il explique que si le pont s’effondre totalement, il n’y aura plus de communication entre plusieurs provinces du sud du pays avec Bujumbura. Ce qui impactera négativement l’économie burundaise. «C’est par ici que transite notamment le gros du sucre en provenance de la Sosumo et le thé. Si la route devient totalement impraticable, il y aura à coup sûr une flambée de prix de ces produits. Car les véhicules vont devoir emprunter un long trajet en passant par d’autres voies ». Pour l’heure, aucun travail de réhabilitation n’est encore engagé. Mais des employés de la Regideso sont à l’œuvre pour pallier la pénurie d’eau.
La RN1 n’est pas en reste
Après la RN7, direction Bugarama sur la RN1. Des véhicules poids lourds à tout instant, en direction ou en provenance de Bujumbura. De longs ou de petits véhicules de transport en commun, également. La circulation est intense. Mais arrivé devant une petite déviation au niveau du centre Muberure (commune Isare), à environ 4 ou 5 km de la mairie de Bujumbura, il faut s’arrêter, ou tout au moins ralentir. Un grand ravin en pleine route.
Il y a près d’un mois, à en croire les propos de la population environnante, cette partie commençait à afficher des signes d’effondrement. Au fil du temps, avec la pression des véhicules, la situation s’est empirée. A l’origine, des eaux de pluie en provenance de la montagne de Butuhurana ont détruit profondément la fondation du pont érigé par là. La route a fini par s’effondrer. Il faudra attendre deux semaines pour tracer un petit itinéraire de déviation. Entre temps, une nuit, un véhicule de type Prado ira se jeter dans le fossé…
Les temps sont durs pour les habitants des collines Giterama, Gahwamo et Tenga (collines environnantes) confrontés à une pénurie d’eau. La démolition de cette route a endommagé un tuyau qui passait par là desservant ces collines en eau potable. Gahungu, un habitant de Giterama, peine à raconter son calvaire : «Je dois quitter Giterama pour aller puiser à Butuhurana, un trajet de plusieurs kilomètres. C’est fatiguant, voyez mes mains déjà rugueuses à force de transporter de bidons sur cette longue distance.»
Ces habitants demandent que cet axe routier soit réhabilité au plus vite. « Même la petite déviation sera bientôt détruite, si rien n’est fait », avertit Gahungu, avant de prévenir : «nous souffrirons les premiers, mais c’est toute l’économie nationale qui sera en danger. Je crois que c’est la principale route où passe l’essentiel des marchandises qui se vendent au Burundi.»
«Le gouvernement est en train de chercher les fonds pour la réhabilitation de tous les axes routiers en piteux état », indique Jean Bosco Ntunzwenimana, ministre des Transports et des Travaux publics, sans plus de commentaire.