Au 2ème congrès ordinaire du CNDD-FDD, le choix est porté sur Pascal Nyabenda pour diriger le parti présidentiel. Un choix, d’après des sources dignes de foi, imposé par le camp Pierre Nkurunziza pour lui permettre de briguer son 3ème mandat contesté par certains généraux. Cependant, le discours de chien cabot tenu par M. Nkurunziza suscite des polémiques.
<doc3519|left>31 mars 2012, à la permanence nationale du parti Cndd-Fdd, sise en face de la place des Nations Unies, commune urbaine de Ngagara.
Vers 10 heures. Des militants (Bagumyabanga) et sympathisants du parti présidentiel sont au rendez-vous attendu depuis février 2012, fin du mandat de Jérémie Ngendakumana, président sortant. Sur 1600 congressistes attendus et venus de tous les coins du pays, 1568 ont répondu à ce grand événement : le président de la République lui-même, les présidents de l’Assemblée nationale et du Sénat, le 2ème vice-Président de la République, des ministres, gouverneurs et administrateurs communaux issus du Cndd-Fdd, des représentants provinciaux, etc. Côté diplomatie, les ambassadeurs de la Belgique, de l’Allemagne, de l’Egypte, de la Chine, certains corps consulaires, etc. ont marqué de leur présence.
Des partis politiques de la mouvance présidentielle (Uprona, FNL (d’Emmanuel Miburo), Sahwanya Frodebu Nyakuri, Sangwe Padder, UPD (de Zedi Feruzi), PPDRR, Radebu, etc. ainsi que les représentants du parti FPR aux affaires au Rwanda et le parti du président congolais joseph Kabila, sont venus manifester leur soutien. La sécurité, cette fois-ci, est assurée par la police et l’armée de la garde présidentielle. Les Imbonerakure (jeunes militants du Cndd-Fdd) assurant de temps à autre le protocole.
Le huis clos
Malgré l’ambiance qui règne dans cette grande salle des conférences, à l’ouverture des cérémonies, il ne sera pas permis à tout le monde de suivre tous les travaux. « Les divisions et les tensions sont tellement énormes que personne d’autre que des militants du Cndd-Fdd n’est tenu d’y rester », lâchent des partisans restés dans le jardin de la place des Nations Unies. Une façon de laver le linge sale en famille.
Vers 10h 50min. Des journalistes suivis des diplomates et des représentants des partis amis du Cndd-Fdd, sont priés de sortir. Pour les journalistes, le travail ne fait que commencer. Jusqu’à jeudi, 29 mars 2012, c’est Léonidas Hatungimana, actuel porte-parole du président Nkurunziza, qui est pressenti comme candidat à la présidence du Cndd-Fdd. Pourtant, des choses ont changé juste la veille des élections. Des sources au Cndd-Fdd, nous révèlent un certain Pascal, député élu dans la province de Bubanza, Joseph Ntakarutimana, ancien ministre de la Bonne gouvernance sous Pierre Nkurunziza et "un certain Victor" de la 2ème vice-présidence de la République…
Quand le terme « Mujeri » survient
14h 30 min. Des journalistes peuvent entrer. Les congressistes ont déjà terminé de « voter », les discours du président sortant et du nouveau ont été aussi prononcés. C’est le tour du président Pierre Nkurunziza. Dans un discours qui a duré une heure, le président de la République rappelle aux congressistes le rôle qu’a joué la population et son soutien infaillible pour la conduite de la guerre par le mouvement Cndd-Fdd : « Des parents ont sacrifié leurs enfants. »
<doc3517|left>Verbatim : traduction du kirundi
{Soyons de vrais militants, que l’acte suive la parole. Soyons guidés par l’idéologie de notre parti et restons toujours humbles. Soyez courageux parce que, vous qui devez servir les autres, vous ne pourrez pas le faire la peur au ventre. As-tu déjà vu « Mujeri » ? Connaissez-vous le chien qu’on appelle « Mujeri » ?
« Mujeri » est maigre. Parce qu’il n’a pas eu à manger. Il n’a plus que ses dents qu’il exhibe tout le temps alors qu’il n’a plus de force pour tenir sur ses pattes. En fonçant sur toi, il fait semblant de grogner. Et quand tu t’arrêtes, il replie sa queue et s’enfuit. Mais si tu essais de fuir, il s’empare de toute la viande que tu transportais et la mange{ (Rires et tohu-bohu dans la salle).}
Voici alors l’importance d’être patient. Ce qui peut te faire peur ne manque pas. Il y a la pauvreté, la famine, la calomnie, ceux qui te découragent. Beaucoup de choses peuvent te faire peur. Mais sache seulement que, face à ces multiples problèmes, qualifie-les de « Mujeri », et sois courageux (Applaudissements dans la salle).
Pour terminer, vous devrez savoir que notre parti comme tout autre parti au pouvoir, a beaucoup d’amis comme il a aussi d’ennemis. Ces derniers, vous les connaissez déjà. Mais s’ils essaient de vous faire du mal, répondez-leur par du bien.}
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<doc3518|right>Qui est le nouveau patron du CNDD-FDD ?
Pascal Nyabenda est né le 12 avril 1966 à Mpanda dans la province de Bubanza. Fils de Eliachim Banigwa (ancien administrateur de Mpanda) et d’Adèle Sinzobakwira alias Zabibu, il fera l’école primaire à Mpanda même et à Mitakataka. Il commence et termine les humanités générales à l’Athénée secondaire de Bujumbura. Diplômé à l’Institut Pédagogique (IP), le député élu dans la circonscription de Bubanza poursuit ses études en 2ème licence dans la faculté des Sciences de l’Education à l’Université du Lac Tanganyika. Il a été administrateur de sa commune natale avant de se réfugier en 1995 en République Démocratique du Congo (ex Zaïre). En 2003, quand la guerre éclate au Congo, il s’exile au Kenya et représente le mouvement Cndd-Fdd encore au maquis à Nairobi. Il est chef de section et mobilisateur politique. Il a été gouverneur de Bubanza et a succédé à Manassé Nzobonimpa. Membre fondateur du parti PP, Pascal Nyabenda dit avoir intégré le mouvement Cndd-Fdd dès sa naissance. Il est marié et père de trois enfants dont deux garçons et une fille.
Renforcer le parti ou Pierre Nkurunziza ?
« Au congrès du 31 mars 2012, il ne s’agissait pas d’élire le nouveau président et ses deux adjoints mais d’approuver ce qui avait été décidé par le camp du président du conseil des sages, Pierre Nkurunziza », lâche M.M., un congressiste sous anonymat. Selon lui, tout avait été décidé à l’avance même si la composition de la nouvelle équipe est connue quelques heures avant la tenue du congrès. Selon d’autres sources concordantes, certains généraux auraient refusé que Pierre Nkurunziza se porte, pour la 3ème fois, candidat aux présidentielles. L’ancien président du CNDD-FDD Jérémie Ndikumana étant aussi dans ce collimateur. Ainsi, Pierre Nkurunziza décide-t-il d’en découdre avec l’élite militaire. Il s’impose et le parti quitte la coupe militaire pour être géré par un civil, pour une fois dans l’histoire du CNDD-FDD. Il cherche un homme flexible, qui ne va pas le déranger. Alors que le nouveau président promet dans ses priorités de renforcer le parti, d’aucuns y voient une manœuvre d’ouvrir un boulevard à Pierre Nkurunziza, pour 2015.
