Toutes sortes de rumeurs circulent sur les combats qui se sont déroulés le 21 décembre à Uvira. Des militaires burundais ont été tués. Côté burundais, la communication militaire réfute complètement l’information. Des combattants Fnl de Nzabampema installés dans la zone revendiquent les combats et jubilent. Qui se sont battus et pourquoi. Deux reporters d’Iwacu se sont rendus sur terrain. Oui, il y a eu des combats et des morts. Récit.
Cité de Kiliba à une dizaine de kilomètres du chef-lieu de la ville d’Uvira. La vie reprend petit à petit. Boutiques et autres kiosques jalonnant la route Uvira-Kamanyola sont ouverts.
Pourtant, à cinq kilomètres vers l’Est où est implantée l’usine de sucre, la population regagne les maisons à compte-gouttes. Et pour cause, la journée de mercredi 21 décembre 2016 reste dans toutes les conversations. Des combats acharnés ont opposé toute la matinée et la soirée, d’un côté des militaires burundais à ceux de la Fardc (armée congolaise) et de l’autre des militaires burundais aux combattants du Fnl du Général Aloys Nzabampema.
Tout a commencé vers 7 h du matin, indiquent des sources de Kiliba Ondes. Des militaires burundais traversent la frontière au niveau de la localité de Vugizo en contournant le poste frontalier. « Ils étaient entre 150 et 200 soldats, lourdement armés », témoigne Jacques Bisimwa, un Congolais qui se trouvait dans ses champs, ce jour-là.
Objectif : attaquer la base arrière des combattants de Nzabampema. Ils veulent les prendre par surprise. Selon des sources à Rukoko qui ont gardé l’anonymat, cette opération n’est pas communiquée à l’État-major. Ils parlent d’une opération unilatérale décidée sur un coup de tête par un colonel dont les vaches ont été volées dans la commune Gihanga de la province Bubanza par ces hommes de Nzabampema. « Ce genre d’opération était annoncé à l’avance à l’armée congolaise », soutiennent ces sources.
Le guet-apens
Arrivés sur place, ils sont accueillis par des tirs nourris à la mitrailleuse des hommes de Nzabampema. Acculés, les militaires burundais se retrouvent coincés sur une espèce d’ilot se trouvant dans la localité de Vugizo. Ils décident de pilonner, en vain. Les combats débutent à 8 h et vont continuer jusque vers 12h. « Ils étaient encerclés de part et d’autre de l’ilot et ne pouvaient pas regagner la terre ferme », poursuit notre source.
Finalement, les soldats burundais trouvent une brèche et se replient vers Kiliba Ondes afin de regagner le sol burundais via la réserve de la Rukoko. Peine perdue, car ils sont repoussés par les Fardc qui les bombardent.
Les combats sont acharnés. Les échanges s’intensifient et les Fardc demandent des renforts qui arrivent d’Uvira et, surtout, des policiers en poste à Kiliba ondes et la Cité de Kiliba.
Les combats durent jusque vers 17 h. Les habitants de Kiliba se réfugient vers la Cité à plus de 6 kilomètres.
Mukanda Mulonda, dont le fils a reçu une balle perdue à la jambe, confie qu’il y avait des cris et des bruits d’armes automatiques, toute la journée. « Nous avons décidé de fuir lorsque les tirs se sont rapprochés de notre localité et c’est à ce moment que mon enfant a été touché à la jambe par une balle. »
Le bilan est lourd. Certaines sources sur place parlent d’une dizaine de tués côté burundais. D’autres évoquent une vingtaine, voire plus. D’après les habitants de Kiliba, dans leur fuite, les militaires burundais ordonnent aux civils congolais qui se trouvaient dans les champs de transporter les corps sans vie des militaires tués et d’un civil. « J’en ai dénombré au moins cinq et une dizaines de blessés » témoigne un habitant sur place. D’autres encore affirment que le bilan pourrait être plus lourd : « Nos champs dégagent l’odeur de la mort. Probablement qu’il y a d’autres corps en décomposition qui y gisent. » Et de demander à la Croix rouge de pulvériser leur champ afin qu’ils y retournent sans craindre des maladies.
Accusations
Côté congolais, des sources militaires et policières parlent de trois militaires et un policier gravement blessés ainsi qu’un enfant de Kiliba Ondes blessé par une balle perdue à la jambe. Ces informations sont confirmées par le colonel Simon Boande, chef de la position policière de Kiliba Ondes : « Ils ont transporté cinq corps et nous en avons récupéré cinq et celui d’un civil qui ont été conduits à la morgue de l’hôpital général de référence d’Uvira par nos militaires. »
Les mêmes informations sont confirmées par le commandant du 3305ème régiment, secteur opérationnel de la plaine au sein de l’armée congolaise. Il affirme qu’un militaire et un civil congolais ont été légèrement blessés. « Tous ceux qui sont morts portaient des uniformes de l’armée régulière burundaise. » Par ailleurs, confirme-t-il, des habitants de Kiliba ont été pris de force pour transporter douze blessés vers le Burundi. Pour lui, il ne s’agit ni plus ni moins que d’une agression. « Comment comprendre autrement cette incursion ? Il s’agit tout simplement d’une provocation.»
Une semaine après ces combats, les habitants de Kiliba Ondes commencent à regagner leurs maisons, mais la peur reste palpable. Ils craignent une nouvelle incursion des militaires burundais pour se venger. « Depuis ces combats, certains ne passent plus la nuit ici et préfèrent aller à Uvira par crainte de représailles », souligne une sexagénaire.
Malgré cette situation, Tundwa Sangiza, chef de la cité de Kiliba, tranquillise la population. Il estime que la situation est sous contrôle.
Toutefois, il exhorte les habitants à être vigilants et à signaler toute présence suspecte, tout en rassurant la population que sa sécurité sera assurée. « Nous avons pour cela demandé aux Fardc de renforcer leurs effectifs et d’augmenter leurs positions. »
Divergence de vues
Côté Burundais, le discours est tout autre. Des sources proches des militaires en position près du poste frontalier de Vugizo parlent d’un grand coup asséné aux mouvements rebelles qui pullulent à Kiliba ondes et réfutent une opération unilatérale : « Nos militaires sont entrés sur le sol congolais et ont attaqué la base arrière d’Aloys Nzabampema. Ses hommes ont fui vers les positions des Fardc qui les ont massacrés. » D’après ces sources, contrairement à ce qui circule sur les réseaux sociaux, de centaines de rebelles ont été tués et par les éléments de la Fdn et par les militaires congolais.
Toutefois, des questions restent en suspens par rapport au sort des cadavres qui sont entreposés à la morgue. Selon des sources proches de l’hôpital général de référence d’Uvira, cinq corps y sont toujours gardés. « La morgue compte quatre chambres, dont une est hors d’usage. Trois cadavres occupent une chambre, deux autres une autre chambre. La dernière est occupée par le civil tué », indique une source sous anonymat.
Actuellement, poursuit-elle, ceux qui perdent les leurs à cet hôpital n’ont pas où les conserver : « Les gens commencent à se plaindre. » Et de demander que les corps des Burundais soient récupérés au plus vite.
A ce propos, des informations dignes de foi indiquent que des militaires se sont rendus au poste frontalier de Vugizo muni de caisses de bière, le jour de Noël, pour tenter de négocier avec des militaires de la Fardc la récupération des corps sans succès. « Ils ont envoyé des émissaires chercher les chefs militaires du côté congolais, mais ceux-ci ont décliné l’invitation », révèlent nos sources.
Contacté, le colonel Gaspard Baratuza, porte-parole de la Fdn, réfute toutes ces informations. Selon lui, s’il y a eu de combats, ils se sont sans doute passés entre les Fardc et les déserteurs de la FDN, ces derniers portant également des tenues militaires burundaises : « C’est la conséquence de ce qui s’est passé lors du coup d’Etat manqué en 2015, des militaires ont fui, certains au Rwanda et en Belgique, d’autres en RDC. Ils sont partis avec leurs effets militaires. »
D’après le colonel Baratuza, les militaires congolais ont été surpris en voyant des hommes en tenue militaire de l’armée burundaise sur leur sol le 21 décembre dernier. « Ils ont appelé le commandant de la première région militaire côté burundais pour des éclaircissements et celui-ci leur a répondu qu’aucun militaire burundais n’avait été envoyé sur leur sol. C’est là qu’ils ont ouvert le feu sur ce groupe. »
Pour lui, les médias comme la Radio Okapi et la RFI, qui ont relayé ces fausses informations, sont tombées dans le piège tendu par ceux qui veulent semer la confusion entre l’armée congolaise et burundaise. « Ce sont des mensonges véhiculés par certains activistes de la société civile congolaise pour monter l’une contre l’autre nos deux armées. »
Et d’affirmer que les deux armées ont une convention claire au cas où un ennemi commet une bavure et fuit sur l’autre territoire. « Nous le traquons et le remettons aux autorités du pays ami. » Et de conclure que si ces affrontements avaient eu lieu, la Monusco en aurait parlé à Kinshasa : « S’ils ne l’ont pas encore fait, ce qu’il n’y a rien de vrai. »
Concernant l’information d’une opération unilatérale dont parlent certains, le colonel Baratuza la balaie du revers de la main : « L’armée burundaise a atteint une maturité de telle sorte que personne ne peut se permettre une telle aventure. Ce sont des mensonges véhiculés par certains activistes de la société civile congolaise pour monter l’une contre l’autre nos deux armées. »
Et de se demander la raison qui pousserait un militaire à poursuivre des voleurs de bétail sur le sol congolais, alors que les deux armées ont une convention claire au cas où un ennemi commet une bavure et fuit sur l’autre territoire. « Ceux qui répandent ces informations ont des visées non avouées de saboter l’amitié qui caractérise nos deux armées. » Et de conclure que si ces affrontements avaient eu lieu, la Monusco en aurait parlé à Kinshasa : « S’ils ne l’ont pas encore fait, c’est qu’il n’y a rien de vrai. »
Quant au FLN d’Aloys Nzabampema, il assure via son porte-parole, le colonel Félix Ntahonkuriye, que ses hommes avaient des informations faisant état d’une opération secrète imminente des troupes burundaises sur leurs positions.
« Nous avons organisé une patrouille de combat dans la localité de Vugizo pour vérifier ces informations et c’est ainsi que ces éléments de la FDN sont tombés sur nos hommes. »
La gêne
Contacté, Nzimoto Kamesi, 1er secrétaire d’Ambassade de la RDC au Burundi, n’a pas voulu faire de commentaire, estimant que l’ambassade n’avait pas encore été informée.
Toutefois, des sources concordantes expliquent qu’en principe les deux pays coopèrent étroitement en matière de sécurité et que les militaires burundais sont autorisés à exercer un droit de poursuite contre les rebelles.
Ces mêmes sources affirment que, pour le cas du 21 décembre dernier, certains officiers n’ont pas respecté cette convention en ouvrant le feu sur des militaires burundais, occasionnant des pertes du côté des FDN. Ceci expliquerait en partie la gêne que ressentent les officiels Congolais, notamment au sujet des cinq corps qui gisent à la morgue de l’hôpital général de référence d’Uvira.
Tout est clair et net.
1.Les 2 pays ont signé des accords de non agression et de collaboration
2.Les rebelles de Nzabampema, eux, sont immortels! aucune perte entre les 2 feux?(baranyika)!
3.L’Officier congolais qui a publié la nouvelle s’appelle « major Dieudonné Kajibwami »! Il doit être le fruit du CNDP ou du M23, donc un militaire en détachement comme tout le monde le sait. Et cela expliquerait ceci.
4.Nous insistons auprès de Iwacu de publier les noms des militaires décédés trouvés
dans la morgue à Uvira. Nous avons le droit de savoir si ces victimes sont des anciens militaires Burundais ou des membres effectifs et opérationnels jusqu’aujourd’hui.
5.A Iwacu de nous prouver son professionnalisme.
6.J’espère que Iwacu publiera mon commentaire cette fois ci. Je sais que mon point 3 pourra le lui en empêcher comme d’hab.
Le journaliste a essayé d’équilibrer son récit mais il y a une information qui semble restée incomplète et qui nous aurait éclairé. Trois groupes au combat mais à la fin on ne voit que les FDN et FARDC mais on voit pas le sors qu’aurait subi le côté Nzabampema??? Quoi qu’il en soit il y a encore des questions:
– Comment un combat peut durer toute une journée (de 07H00 à 17 h00) entre les armées deux pays qui coopèrent étroitement et dont les relations sont bonnes sans que leurs états-majors, leurs ministères de défenses, leurs ministères de relations extérieurs, leurs ambassades ne communiquent pour gérer cette incompréhension???
– S’ils ont intervenu, comment les combats ont-ils continué durant toute la journée???
– Si l’armée congolaise affirme avoir été agressée, pourquoi n’a-t-elle pas poursuit les agresseurs jusqu’à la frontière??? Par contre vos sources affirment avoir forcé les civiles pour porter les blessés!!! Comment-ont-ils eu le temps de récupérer les blessés alors qu’ils étaient poursuivis par les FARDC??
– Où comment les rebelles Nzabampema et comment ont-ils échappés ces bombardements des FARDC?
Je ne veux pas nier parce que je n’étais pas sur terrain mais je pense qu’il y a une certaine exagération!
Muze mwinjire mu Rwanda la il y a aussi des combattants qui menacent le pouvoir DD !! Mutaona ca mtema kuni! !
@Bundes
Il existe des gens qui se passionnent à étaler leur ignorance; c’est votre cas ici!
Cette info rappelle l’incident de Rukaramu. Les personnes enlevées seraient-elles revenues ? Et on minimize la rébellion. Faut-il attendre que la guerre fasse plus rage pour négocier ?
« Objectif : attaquer la base arrière des combattants de Nzabampema. »
Si ceci est vrai, l’information proviendrait de ceux qui ont attaqué. Donc parmi eux quelqu’un a vendu la mèche.
Sinon je prendrais ceci comme de la spéculation ou de l’insinuation; surtout pas comme une information avérée (vérifiable et vérifiée).
Ikinyoma kirafise umwanya kimara
Comme on dit, on ne cache pas la fumée quand la maison est en train de brûler: si c’est vrai que des éléments de l’armée burundaise ont livré le combat pendant une journée entière, comme se fait-il que l’État-Major des FND n’ait pas envoyé de renforts, ne serait-ce que pour exfiltrer le groupe qui était en difficulté ? La photo de la carte d’identité du militaire tué portait un nom je suppose: alors, qu’on nous le révèle! Ainsi on pourra dire si oui ou nom ce militaire fait partie des déserteurs.
Je trouve qu’il y a encore de nombreuses zones d’ombre. Un sujet qui mérite un suivi messieurs les journalistes auteurs de cet article. Pour le reste, félicitations pour votre courage d’enquêter sur un sujet aussi sensible!