Référendum constitutionnel, feuille de route de Kayanza, dialogue d’Arusha et l’annonce du président de ne pas se présenter aux élections, les évènements qui ont marqué l’année écoulée.
Le référendum constitutionnel, coûte que coûte
Le référendum a eu lieu 17 mai, malgré les contestations centrées essentiellement sur le timing. Beaucoup indiquent que ce n’est pas le moment. Le dialogue inter-burundais est en panne et plusieurs milliers de burundais sont en exil.
Bujumbura campe sur ses positions et lance la machine en mouvement. Une campagne explicative de la nouvelle Constitution et une inscription au rôle d’électeurs sont émaillées de plusieurs irrégularités. Au final, 5.008.742 électeurs sont attendus.
Le 17 mai 2018, en général, le scrutin se déroule bien, hormis des irrégularités relevées dans plusieurs provinces. Une surprise, la population matinale répond massivement au rendez-vous.
Un référendum qui a eu lieu néanmoins dans un contexte d’absence de mission internationale d’observation et une campagne référendaire mouvementée. Quasiment tous les partis politiques de l’intérieur du pays demandent à leurs partisans d’aller voter « ego » ou « oya » à la révision constitutionnelle. Hormis la coalition Amizero y’Abarundi et le parti Frodebu qui demandent aux Burundais de voter non à la révision constitutionnelle, les autres appellent à voter oui.
Lundi 21 mai 2018, la Commission nationale indépendante (Ceni), annonce les résultats provisoires du référendum constitutionnel. Sans surprise, elle proclame la victoire du « ego » sur le « oya ». Le oui est crédité de 73, 26%, le non récolte 19, 34%, tandis que les voix nulles sont estimées à 4,11%, et les abstentions à 3, 28%.
Le président de la Ceni, Pierre Claver Ndayicariye, indique, en outre, que 4 768 142 Burundais ont répondu à l’appel, soit un taux de participation de 96,24%.
Des résultats qui seront contestés jeudi 24 mai par la coalition Amizero y’Abarundi auprès de la Cour constitutionnelle. Elle a constitué un énorme dossier parlant de plusieurs irrégularités qui ont émaillée le processus référendaire. La coalition demande à cette cour de statuer sur son invalidité.
Mais les contestations de l’opposition et de la majorité de la communauté internationale, opposées au changement de la Constitution, n’y changeront rien. La Constitution finira par être modifiée.
– La limitation à deux quinquennats les mandats présidentiels disparaît. Place au septennat renouvelable une fois.
– La deuxième vice-présidence saute. Le premier ministre, chef du gouvernement, issu de la mouvance présidentielle fait son apparition.
– La révision de la Constitution ne nécessitera plus le vote des 4/5 des députés, mais plutôt des 3/5.
– Pas d’extradition pour tout citoyen burundais vivant sur son sol. Il échappe ainsi à la justice internationale.
– La coalition des indépendants est interdite
– Un Burundais à double nationalité est interdit d’occuper de hautes fonctions de l’Etat, notamment la présidence.
– « Nous, peuple burundais : Conscients de nos responsabilités devant Dieu…», ainsi débute le préambule de la nouvelle Constitution. De même que la prestation de serment commence en ces termes : « Devant Dieu le Tout-Puissant ». Certains y voient la perte de la laïcité.
– Article 4 de la Constitution stipule que le statut et le rétablissement de la monarchie doivent faire l’objet du référendum.
Feuille de route de Kayanza, loin de faire l’unanimité
‘Musumba Hôtel’ a abrité, le 3 août, la signature d’une « feuille de route » pour les élections de 2020.
22 partis politiques sur les 33 agréés ont répondu à l’invitation du gouvernement. Mais la question que tout observateur de la politique s’est posé est l’impact, l’importance et la représentativité de toutes ces formations. Pour rappel, lors des présidentielles de 2015, l’Uprona a eu 2,4 % des suffrages obtenus, le FNL de Jacques Bigirimana 1,01%, la COPA de Jean de Dieu Mutabazi 0,16%. Hormis le parti de l’Aigle, les autres partis sur place pèsent peu sur la balance.
Du secrétaire général du parti Uprona, Olivier Nkengurutse, au président du parti FNL, Jacques Bigirimana, en passant par des politiques à l’image d’Alice Nzomukunda, Jean de Dieu Mutabazi ou encore Kefa Nibizi, aucune divergence notable sur les grandes questions de l’heure.
Une petite voix s’est élevée pour contester et refuser de signer. C’est celle de Phenias Nigaba, porte-parole du Sahwanya Frodebu. Il a déploré que ce document ait été discrètement préparé à l’avance. « On ne sait pas par qui, et les acteurs politiques ont été exclus. Comment voulez-vous que mon parti cautionne ça ? » .
En refusant de signer « la feuille de route », le Frodebu rejoignait la position des ténors de l’opposition interne qui ne se sont pas rendu à Kayanza. Le parti MRC et la coalition Amizero y’Abarundi avaient dénoncé dans un communiqué de presse « un forcing ne visant qu’à court-circuiter le dialogue externe mené par la facilitation et la médiation de la sous-région. »
Le Cnared a dénoncé une fuite en avant et une feuille de route non consensuelle. Interrogé, l’ancien président Ntibantunganya est pessimiste : « L’histoire du Burundi m’a appris que lorsqu’on veut régler une crise, il faut absolument s’assurer que tous les protagonistes sont associés.»
Pourtant les facilitateurs tanzaniens s’activaient pour convoquer un prochain round des pourparlers. Le problème : à l’agenda de Benjamin Mkapa figurait justement une feuille de route pour les élections de 2020. A Kayanza, Bujumbura semble avoir pris de vitesse Arusha pour que la feuille de route soit déjà actée avant le dialogue.