Affaire de la journaliste Floriane Irangabiye, précarité des conditions de détention, révision du code de procédure civile et le code de l’organisation et de la compétence judiciaires sont parmi les événements saillants de l’année 2023.
Arrêtée le 30 août 2022 par des agents du Service national de renseignements, Floriane Irangabiye a été écrouée, dans un premier temps, dans la prison centrale de Mpimba à Bujumbura. Elle sera transférée dans la prison de Muyinga dans la nuit du 3 octobre 2022.
Accusée de « porter atteinte à l’intégrité du territoire national », selon les termes de l’article 611 du Code pénal, cette journaliste de la radio en ligne « Igicaniro » initiée par l’association « Fraternité » regroupant des Burundais vivant en exil, essentiellement au Rwanda, a comparu vendredi 16 décembre à la prison de Muyinga.
Dans une audience qui s’est déroulée à huis clos, le Tribunal de Grande Instance de Mukaza, siégeant en itinérance dans la prison de Muyinga, l’a condamnée à 10 ans de prison ferme avec une amende de 1 million de BIF.
Dans un procès en appel du 30 mars 2023, la Cour d’appel de Mukaza en itinérance dans la prison de Muyinga, a maintenu la même peine à l’endroit de Floriane Irangabiye.
Sa défense a toujours plaidé pour sa libération disant que les motivations du parquet sont « erronées et supposées ».
Amnesty International a organisé mercredi 20 décembre une manifestation pacifique devant l’ambassade du Burundi en Belgique pour demander la libération de la journaliste Floriane Irangabiye, soutenant que les accusations portées contre elle n’ont jamais été prouvées.
Cette manifestation a vu la participation de plusieurs journalistes et défenseurs des droits humains burundais en exil en Belgique.
Des innovations saluées
Le nouveau code de l’organisation et de la compétence judiciaires comprend, entre autres innovations, l’instauration d’un juge unique pour certaines matières, l’affectation des officiers du ministère public dans les tribunaux de résidence, un diplôme universitaire requis pour les magistrats du tribunal de résidence.
L’instauration de l’institution du juge unique, a expliqué Domine Banyankimbona, est requise pour les dossiers d’ordre pénal, les conflits fonciers et l’insolvabilité des dettes. Cependant, a-t-elle précisé, pour les conflits fonciers, ce sont d’abord les médiateurs collinaires qui s’en chargeront en premier lieu.
Par ailleurs, a-t-elle ajouté, cette institution du juge unique est également appelée à statuer pour les cas de contraventions, c’est-à-dire les peines allant d’un à trois ans et les délits dont les peines ne dépassent pas 5 ans de servitude pénale. Mais pour les crimes, a-t-elle nuancé, le siège sera toujours composé de trois juges.
Mme Banyankimbona a annoncé l’affectation des officiers du ministère public auprès des tribunaux de résidence. Une mesure, selon les défenseurs des droits humains, qui permettra de contrôler le travail des OPJ et rendre un jugement équitable pour les dossiers pénaux au niveau de ces juridictions de base.
En outre, a-t-elle fait savoir, le niveau universitaire est requis pour les juges des tribunaux de résidence. Et de préciser que les détenteurs des diplômes A2 seront remplacés au fil du temps, quand ils passeront de vie à trépas ou à leur départ en pension.
Du côté du code de procédure civile, parmi les innovations proposées, figurent la mise en place du juge de mise en état qui aura pour mission de veiller au déroulement loyal de la procédure, spécialement, à la ponctualité de l’échange des conclusions et de la communication des pièces.
En plus, il y a la réduction des délais de procédure, l’autorisation de la vente à l’amiable avant la vente forcée, la clarification de la procédure d’exécution et l’instauration de l’opinion dissidente.
Selon Jean Marie Nshimirimana, président de l’a Solidarité avec les prisonniers et leurs familles SPF/Ntabariza, l’affectation des officiers du ministère public au niveau des tribunaux de résidence va rapprocher la justice aux justiciables.
Par ailleurs, apprécie ce défenseur des droits des prisonniers, le juge unique aura l’opportunité d’étudier le dossier en toute indépendance et quiétude et pourra rendre un jugement bien mûri sans aucune influence.
Précarité des conditions de détention
Au cours de l’année 2023, les établissements pénitentiaires sont restés surpeuplés. Selon Jean Marie Nshimirimana, le nombre de détenus se chiffre à plus de 12 mille personnes alors que la capacité d’accueil des prisons est moins de 5 mille prisonniers.
D’où les conditions d’hygiène laissent à désirer. L’alimentation reste insuffisante. Bref, le respect des droits des détenus est loin d’être effectif.
Par ailleurs, déplore-t-il, il y a des prisonniers qui restent écroués alors qu’ils ont déjà purgé leurs peines ou bénéficié de la libération provisoire.
D’autres y restent parce qu’ils ont été incapables de payer de lourdes amendes qui leur ont été infligées. Tout cela gonfle les effectifs dans les prisons.
Ce défenseur des droits des prisonniers propose de désengorger les prisonniers. Pour ce, il faut d’abord restaurer la justice de proximité qui était assurée autrefois par les notables collinaires.
En outre, s’indigne-t-il, il est inconcevable que quelqu’un soit incarcéré pour cause de dette civile. Et de suggérer qu’il faut instaurer des sanctions à l’endroit des OPJ et des magistrats responsables des emprisonnements abusifs.