Certaines familles rapatriées de la colline Mugara en commune Rumonge de la province du même nom ainsi que celles du centre urbain de Nyanza-lac de la province de Makamba demandent à la CVR qui a pris le relais de la CNTB d’entamer des séances de médiation en rapport avec les « autres biens ».
Certaines familles des rapatriés regrettent que la Commission nationale des terres et autres bien, CNTB, ait terminé son mandat sans avoir commencé à mener des médiations en rapport avec les « autres biens » dont surtout les véhicules volés lors des événements douloureux de 1972. Elles évoquent aussi des maisons spoliées, des comptes en banque dont on ne voit pas les traces, des bateaux, du matériel de musique et d’autres matériels volés.
B.N, un rapatrié rencontré sur la colline Mugara en commune Rumonge fait savoir qu’au cours des événements de 1972, un haut gradé de l’armée burundaise a pris par force une voiture de son père de marque « Ford Amstrong ». BN veut alors savoir la destination du véhicule de son père.
N. A, une femme de la localité nous informe qu’un camion de marque Volvo N 86 a été volé pendant la période trouble de 1972 et souhaite savoir ceux qui ont volé ce camion.
Une autre personne de la ville de Nyanza-lac, en province de Makamba, témoigne que son père avait de l’argent sur son compte à la BCB mais qu’elle n’a trouvé aucune trace de ce compte.
Certains camions de marque Volvo et Fiat ainsi que des camionnettes de marque « Chevrolet » seraient encore en circulation, c’est-à-dire 42 ans après, a-t-on appris des sources sur la colline de Mugara en commune Rumonge, une colline où résidaient de grands commerçants.
Toutes ces personnes demandent à la Commission Vérité et Réconciliation, CVR, qui a pris le relais de la CNTB dans la mission de médiation des conflits fonciers et autres biens de se pencher sur les plaintes relatives aux autres biens.
Elles attendent impatiemment le début du travail de la CVR pour voir comment la commission va s’y prendre afin qu’on puisse aboutir à une réconciliation pérenne.
Des avis contradictoires
Les résidents des commune Rumonge et Nyanza-lac que nous avons approchés n’apprécient pas l’annonce comme quoi les décisions de la CVR ne seront pas susceptibles de recours. Elles demandent qu’une possibilité de recours soit reconnue conformément à la Constitution de la République du Burundi.
Ils saluent par contre l’idée que certaines décisions de la CNTB seront cassées. Et de demander que la CVR clarifie les circonstances qui motiveront qu’une décision soit cassée.
Ces résidents déplorent qu’il y ait des décisions prises par la CNTB qui prêtent à confusion. Ils donnent l’exemple des propriétés foncières qui ont été rendues aux anciens propriétaires sans que leurs dimensions soient déterminées, sans qu’elles aient été bien délimitées et sans que les témoins aient eu l’opportunité d’être entendus alors qu’ils étaient présents.
Contrairement à l’avis de certains résidents, les rapatriés saluent le fait que les décisions de la CVR ne seront pas susceptibles de recours. Ils estiment que certains résidents acquéreurs en profiteraient pour exercer des manœuvres dilatoires afin de ne pas remettre les biens mal acquis à leurs propriétaires. Ce qui pourrait aussi favoriser la corruption sous plusieurs formes. Les rapatriés mettraient ainsi beaucoup de temps avant d’être rétablis dans leurs droits.
Ces rapatriés demandent également à la CVR de mener des enquêtes beaucoup plus fouillées avant de décider de casser une décision rendue par la CNTB car cela aussi retarderait le rétablissement dans leurs droits.
Pour le moment, de grands conflits communautaires entre rapatriés et résidents s’observent dans les communes Rumonge et Nyanza-lac où les deux groupes vivent quotidiennement sous tension.
Les rapatriés et les résidents de ces deux communes demandent à la CVR d’accorder une attention particulière aux conflits fonciers et aux autres biens. Surtout que certains politiciens pourront tirer sur cette corde sensible pour galvaniser leur électorat, les communes Rumonge et Nyanza-lac comptant un grand électorat.
Signalons que la CNTB n’a pas clôturé tous les dossiers qu’elle avait sur sa table au cours de son mandat. Ceux qui restent seront traités par la CVR. Ces dossiers pendants représentent environ 80% de tous les dossiers enregistrés dans les seules provinces de Makamba et Rumonge.