Dans les quartiers de la ville de Gitega, plus question des garages aux abords de la rue. L’administration à la base a donné un ultimatum de dégager les routes et avenues qui abritaient jadis les garages. Les mécaniciens concernés disent que les temps vont être durs pour eux et pour leurs familles.
A Nyamugari, les garages improvisés aux abords des routes et avenues vivent ses derniers jours. Alors que Nyamugari était depuis longtemps considéré comme le garage à ciel ouvert de toute la ville de Gitega, l’administration a déjà averti.
Dans quelques jours, les mécaniciens et leurs aides de ce quartier doivent travailler dans des places closes et connues afin d’éviter l’encombrement dans les rues dû aux véhicules et aux carcasses y garés. Pour beaucoup, cette mesure vient ajouter le drame aux drames. Et comme explication, cette situation va renforcer le chômage et la pauvreté dans la plupart des ménages des quartiers populaires. Surtout que cette activité est le principal gagne-pain des habitants qui ont choisi ce métier pour ne pas sombrer dans la drogue et le banditisme.
« Ils nous obligent de travailler dans des garages connus mais nous ne sommes pas nés de la dernière pluie. Nous savons ce qu’ils trament. Bientôt, nous serons sous le contrôle de quelqu’un », fustige Abdallah (son nom a été modifié pour garder son anonymat). D’après lui, dans tout le quartier, les personnes qui peuvent se construire des garages automobiles dignes de ce nom sont comptées sur le bout des doigts.
« La population de ce quartier n’a pas de diplôme et elle n’est embauchée nulle part ailleurs sauf dans ces garages qui les forment et leur permettent de vivre à la sueur de leur front. Si demain ils se retrouvent sans travail, personne ne pourra prédire ce que le quartier sera », s’inquiète le prénommé Alphonse. Il fait savoir que ce métier fait vivre beaucoup de ménages. De père en fils, les mécaniciens se forment et se transmettent leurs savoir-faire, les premiers bénéficiaires étant des jeunes qui n’ont pas connu le banc de l’école ou ceux qui ne sont pas arrivés très loin dans leurs études.
Le quartier Nyamugari communément appelé quartier swahili est ainsi devenu maître dans des activités de maintenance (entretien, réparation) des véhicules automobiles. Sans argent ni parenté dans la ville de Gitega, de jeunes garçons venus des autres provinces du pays apprenaient gratuitement la mécanique automobile et se frayaient rapidement le chemin dans le métier de chauffeur.
« Les garages au vrai sens du mot sont chers. Trouver de l’argent pour cotiser dans le payement des taxes et des loyers ne sera pas à la portée de tout le monde afin d’embrasser le métier de mécanicien. La plupart d’entre nous vont retourner à la campagne », souligne et s’inquiète le prénommé Fabien, un aide-mécanicien à la 2e avenue originaire de Ruyigi.
Quant aux automobilistes, ils craignent déjà la hausse des tarifs de réparation des véhicules puisqu’ils n’auront plus d’autres choix que de se diriger vers des garages longtemps réputés chers en même temps que les réparations y prennent beaucoup de temps.
Quand le malheur des uns fait le bonheur des autres
Depuis l’annonce de combattre les garages improvisés aux abords des rues du quartier Nyamugari, ce ne sont pas tous les mécaniciens automobiles qui se sont sentis affectés. Ceux qui travaillent déjà dans des places closes sont en effet aux anges. Elles disent que les garages à ciel ouvert leur faisaient de la concurrence déloyale. Et pour preuve, les garages à ciel ouvert ne payaient pas les taxes de l’OBR ni ne louaient les places où ils travaillaient.
« Ils viennent le matin avec seulement quelques outils de travail et rentrent le soir les poches pleines. Ils n’hésitent pas même à rabattre les prix pour nous voler les clients », a fait remarquer avec un air satisfait un mécanicien prénommé Juma.
Et d’ajouter qu’ils avaient souhaité que cette situation change depuis plusieurs années. Ils avancent qu’ils doivent débourser plus de 150 000 FBu en faveur de l’OBR en plus du loyer mensuel pour travailler alors que les autres mécaniciens qui travaillent à ciel ouvert ne payent rien. Aujourd’hui, ils n’ont qu’une idée en tête. Que ces mécaniciens qui travaillent dans le noir les rejoignent pour travailler ensemble pour revigorer leur métier qui commençait à perdre de sa saveur.
« Tout le monde se fait passer pour mécanicien alors qu’il n’a pas d’adresse fixe. C’est parmi ces personnes-là qu’on trouve des gens qui volent les pièces des véhicules des clients. Ce qui ternit l’image du métier puisqu’on globalise et on nous traite de tous les noms. Tu pourras entendre ici et là que les mécaniciens sont des voleurs ou des escrocs », dénonce le mécanicien nommé Hakizimana.
Même les vendeurs des pièces de rechange jubilent. Ils espèrent en effet qu’il y’aura une plus-value car ces mécaniciens de la rue utilisaient souvent des pièces d’occasion au lieu de les acheter dans des magasins de pièces de rechange connus.
Mais non, il ne faut pas les chasser de la rue, il faut plutôt les regrouper dans une coopérative d’artisans mécaniciens, leur octroyer des crédits de quelques millions exactement comme on le fait pour les Sangwe et autres, qui pour certains remboursent difficilement.
Vous vous rendez compte, ils ont déjà la technique et l’expérience en mécanique auto, ils n’ont besoin que d’un petit coup de pouce pour exercer le métier légalement et payer les impôts comme tout le monde.
Il faut chercher des solutions qui arrangent tout le monde et éviter de tomber dans la facilité qui consiste à « chasser » et acculer les victimes dans des situations dangereuses.