Il y a quelques temps, les ndagalas du lac Tanganyika étaient chers mais disponibles au marché de Gitega. Aujourd’hui, ils n’existent plus ou presque dans ce marché. Les commerçants broient du noir et les acheteurs commencent à regretter le temps où ils les qualifiaient péjorativement de viande des pauvres et accessibles presque pour tout le monde.
Au marché central de Gitega, il n y’a pas longtemps, les vendeurs avaient des paniers et des sacs remplis de ndagalas séchés. Ils ne trouvaient pas beaucoup de clients à cause du prix qui était exorbitant. Aujourd’hui, la situation a changé. On ne trouve même pas ceux qui sont chers. Tout le monde s’interroge sur ce qui se passe. Le constat du mercredi 19 juin 2024 par exemple est que sur une dizaine de vendeurs de ndagalas, un seul a eu la chance d’avoir 4kg pour toute la ville après des semaines de pénurie totale.
Il affirme que son fournisseur de Bujumbura lui a vendu le kilogramme à 100 000 FBu. Et là aussi, la qualité est à douter. Il s’agit d’une variété de ndagalas qui ne se vendait pas à Gitega durant les jours meilleurs. Dans cette capitale politique du Burundi, on était habitué à acheter cher mais on avait l’embarras de choix devant toute une gamme de variétés proposées.
« On nous racontait que les ndagalas du lac Tanganyika sont très prisés partout et que des commerçants véreux les vendaient en contrebande vers les pays limitrophes. Je crois alors qu’ils ont acheté même notre lac », plaisante la prénommée Spés-Caritas, une femme de ménage. Elle trouve que la situation n’est pas normale. Elle se demande pourquoi il n’y a plus de ndagalas à Gitega.
Elle indique en outre que certains pourraient invoquer la question de la pénurie prolongée des carburants. Elle estime que ce serait un raccourci dans la mesure où les commerçants font toujours des navettes entre Gitega et Bujumbura. Ils se rendent aussi régulièrement à Makamba, Bujumbura et Makamba étant réputés comme principaux lieux d’approvisionnement en produits du lac Tanganyika.
« Certes, le prix de transport a été multiplié par 3 voire 5 mais la circulation est toujours intense. Pourquoi cette pénurie des ndagalas alors que ce sont les mêmes transporteurs qui les amenaient jusqu’à Gitega », continue-t-elle à s’interroger.
Une première
Spés-Caritas n’est pas la seule personne à Gitega qui se demande où est passé cette « viande des pauvres ». Le prénommé Gaspard souffre de la goutte au niveau des pieds. Partant, il ne consomme plus la viande de bœuf ni celle de chèvre. Aujourd’hui, il souffre de cette pénurie plus que les autres. Quand nous l’avons rencontré au marché central de Gitega, il était en train de demander aux commerçants comment il pouvait s’en procurer même à un très grand prix.
« Je ne demande pas les prix mais plutôt si on peut en avoir. Donnez- moi le contact seulement d’une personne à qui je peux m’adresser meme s’il me vend un kilo à 150 000 francs, il n’y a pas de problème », disait-il. Il fait savoir que c’est pour la première fois depuis sa naissance qu’il ne trouve pas de ndagalas au marché dans la ville de Gitega.
Même son de cloche chez le prénommé Donatien qui souligne qu’il est impensable de ne pas avoir les produits de chez nous tandis que dans les autres pays limitrophes du lac Tanganyika, ils mangent à satiété le mukeke, le ndagala, le capitaine et bien d’autres poissons du lac Tanganyika.
De la tricherie
Les commerçants eux aussi affirment qu’ils sont déconcertés. A la place de cette denrée alimentaire qui remplace valablement la viande, certains commencent à profiter de cette pénurie en proposant d’autres sortes de poissons venus d’ailleurs tout en faisant croire aux gens que ce sont des ndagalas du lac Tanganyika. Le prénommé Willy raconte qu’il a acheté un kilo de ndagalas à Bujumbura quand il attendait un bus sur le parking dit Cotebu. Mais malheureusement, il a plus tard remarqué qu’on lui avait menti une fois arriver à la maison. Il a été trompé par la ressemblance mais en réalité ce n’étaient pas ceux du lac Tanganyika.
« C’était amer. Personne chez moi n’a réussi à avaler un seul poisson. On m’a dit que ces jours-ci, beaucoup de gens de l’intérieur du pays connaissent les mêmes mésaventures que moi. Les vendeurs ne disent jamais que le poisson qu’ils vendent aujourd’hui n’est pas du lac Tanganyika. Mais, si j’avais été prudent, je l’aurais remarqué car les prix sont tellement bas », explique-t-il. A Gitega, les vendeurs des produits du lac Tanganyika ne machent pas leurs mots. Ils affirment haut et fort qu’ils sont victimes de la contrebande et de l’inflation de la monnaie burundaise. Ils soulignent qu’ils ne peuvent pas rivaliser avec ceux qui achètent en dollars ou en shilling tanzaniens.
« Tant que notre monnaie sera inférieure aux monnaies des pays de la région sans doute que nous n’aurons rien à vendre. Quand nous essayons de négocier, nos fournisseurs nous indiquent que tout a été pris par ceux qui payent bien », témoigne le prénommé Mossi, un commerçant de Gitega. Il informe que le gros des stocks de poissons provenait de Kigoma. Et de faire remarquer qu’aujourd’hui, les Tanzaniens ne viennent plus au Burundi. Ils préfèrent vendre ailleurs qu’au Burundi.
Le prénommé Mandevu abonde dans le même sens. Selon lui en effet, le climat des affaires au Burundi est aujourd’hui difficile. Il fait savoir en outre que même le peu de ndagalas qui parvient à arriver à Gitega est vite raflé.
« Si tu arrives tard au marché, on te dit que quelqu’un a tout pris. On te propose alors de revenir un autre jour ou de payer une avance. Malheureusement, même si tu acceptes de lui laisser cette avance, le lendemain il te dit que les prix ont monté. Et si tu ne peux pas te ranger sur ces nouveaux prix on te propose de laisser tomber », témoigne Mandevu.
En attendant, la population nourrit l’espoir de substituer le ndagala et le mukeke par des poissons élevés dans des bassins artificiels. Mais là encore, personne ne les voit sur le marché.
Ndagala,Mikeke manquent dans le marché de gitega,comme d’habitude quelqu’un a exporter frauduleusement au voisin du Nord comme le carburant,pour distraire la population il faut alimenter les mensoges