Le Lycée de l’Espoir de Nyangungu se trouve en commune Mutaho de la province de Gitega. Avec ses 615 élèves à majorité Batwa, il n’a ni eau potable ni électricité depuis qu’il existe. Les parents, les élèves et les autorités scolaires réclament les mêmes conditions de travail que les autres établissements scolaires de Mutaho.
Situé non loin du chef-lieu de la commune Mutaho et au milieu de la communauté Batwa de Nyangungu, le Lycée de l’Espoir de Nyangungu existe comme lycée depuis 2005. Il a été précédé par une section maternelle en 1995 et par une section Primaire quelques années plus tard. Ce lycée est le seul établissement scolaire qui accueille beaucoup plus d’enfants Batwa.
En 1995, l’objectif était d’accueillir les enfants vulnérables, essentiellement les enfants Batwa, qui n’avaient nulle part où aller. Il a alors commencé avec la Section maternelle pour donner goût de l’école aux enfants dont les familles ignoraient jusque-là l’utilité d’une école. Selon les propos des uns et des autres, la population de Mutaho n’imaginait pas comment les enfants Batwa allaient étudier alors qu’ils manquaient tout.
« C’était comme un rêve. Un petit enfant mutwa sur le banc de la maternelle ? A vrai dire même les Batutsi et les Bahutu n’avaient pas déjà songé à ce projet. Plusieurs d’entre nous étaient sceptiques mais voilà aujourd’hui où nous en sommes », s’en félicite Rock Butoyi qui accompagnait sa fille pour la remise des diplômes de fin des études post-fondamentales.
Selon ce membre du Comité de gestion de l’école, la communauté Batwa de Nyangungu est confrontée à des conditions de vie précaires.
A cause de la pauvreté extrême, de nombreux parents Batwa ne pouvaient pas payer ni les frais de scolarité ni l’uniforme pour leurs enfants. Ce qui entravait l’accès à l’éducation de leurs enfants.
Bien plus, les discriminations sociales et ethniques persistaient, limitant ainsi les opportunités en matière d’éducation pour leurs enfants. Cette marginalisation entraînait un cercle vicieux de pauvreté et d’exclusion sociale. Ce qui compromettait le développement global de la communauté.
« Personne ne pouvait parier que nous arriverons là où nous sommes aujourd’hui. Heureusement nous avons gagné notre pari malgré des difficultés énormes rencontrées » souligne-t-il. Malheureusement, M. Butoyi souligne que leur travail risque d’être vain dans la mesure où cet établissement scolaire de 615 élèves ne dispose pas d’eau ni d’électricité jusqu’aujourd’hui.
Malgré les efforts de l’Union chrétienne pour l’Education et le Développement des déshéritées (UCEDD) pour soutenir la scolarisation des enfants, de nombreux défis persistent et hypothèquent le succès à long terme de cette entreprise.
« L’électricité et l’eau sont indispensables pour bien étudier. Si nous avions un internat, nos soucis pourraient peut-être diminuer car beaucoup d’entre nous abandonnent l’école à cause de la pauvreté qui sévit dans leurs familles », indique Félicité Ntirampeba de l’année terminale en Sciences sociales et humaines.
Un goût d’inachevé
Que ce soient les élèves ou les parents, tous convergent pour dire que le travail déjà commencé a un goût d’inachevé. Le Lycée d’Espoir de Nyangungu est en effet considéré par beaucoup, à tort, comme une école privée. Or, une école privée classique génère ses propres revenus en faisant payer la scolarité aux enfants. Ce qui n’est pas le cas pour le Lycée d’Espoir de Nyangungu.
« Depuis la maternelle jusqu’au post-fondamental, je n’ai rien payé comme frais scolaires. Si c’était le cas, Dieu seul sait où je serais aujourd’hui. Nous sommes des enfants du pays comme les Bahutu et les Batutsi. Les questions d’eau ou d’électricité ne devraient pas avoir lieu. On ne peut pas demander de s’occuper de tout à celui qui a eu pitié de nous alors qu’il n’y tire pas des avantages financiers », clame Gloriose Niyoyankunze lauréate de ce lycée.
Elle est diplômée en Sciences sociales et humaines. Elle reconnaît que le manque d’accès à l’éducation prive les enfants Batwa d’un de leurs droits fondamentaux et compromet leur avenir. Sans éducation, ces enfants deviennent plus exposés à la pauvreté, au chômage. Ce qui signifie que leurs horizons sont formés en termes de perspectives d’emploi. Ils ne peuvent pas non plus contribuer positivement au développement de la société.
« A long terme, l’éducation des enfants Batwa est non seulement une question de justice sociale, mais aussi une nécessité pour garantir un avenir durable pour toute la société », a-t-elle ajouté. Même son de cloche chez Thomas Bucumi, parent d’élève à Nyangungu. Il est en effet d’avis que la marginalisation et l’exclusion des enfants Batwa de l’éducation ont depuis longtemps entraîné des répercussions néfastes sur l’ensemble de la société.
En privant une partie de sa population de l’accès à l’éducation, la société perd des talents et des potentialités réelles ou possibles.
Sous un autre angle, l’injustice sociale alimente des tensions et des conflits. Ce qui peut compromettre la stabilité sociale et politique.
Le directeur du Lycée d’Espoir de Nyangungu, Valentin Nyanduruko, fait savoir qu’il y’a encore à faire. Certes l’UCEDD a réalisé un grand pas. Mais, le gouvernement doit également jouer un rôle actif dans la création d’un environnement favorable à l’éducation pour tous.
Il estime qu’investir dans l’éducation des enfants Batwa n’est pas seulement un impératif moral mais aussi un investissement pour l’avenir de toute la société. Tout cela favorise l’inclusion sociale et le développement durable.
« Nous avions un projet d’une école à régime d’internet mais avec la situation actuelle, on ne peut pas s’aventurer à le faire. Déjà, sans eau propre ni électricité, la situation est difficile », estime le directeur Nyanduruko. Il fait savoir qu’ils ont déjà frappé sur presque toutes les portes pour demander de l’appui afin de résoudre ce problème. Malheureusement, la réponse tarde à venir.
Nous avons cherché à avoir des éclaircissements sur ce problème que connaît le Lycée de l’Espoir de Nyangungu auprès de la Direction communale de l’Enseignement à Mutaho. Ils nous ont orienté vers l’administrateur communal. Malheureusement, ce dernier est resté injoignable.