Lundi 10 mars 2025

Société

Région Centre/Gitega : Quand balayer les rues rend autonomes des femmes vulnérables

Région Centre/Gitega : Quand balayer les rues rend autonomes des femmes vulnérables
Un petit groupe femmes nettoyeuses de rue au centre-ville de Gitega

Autrefois confinées à la maison sans moyen d’accéder à un emploi rémunéré, certaines femmes étaient de véritables vulnérables sur leurs collines à Gitega. Beaucoup faisaient la manche pour vivre. En balayant des rues de la ville de Gitega, le petit salaire qu’elles obtiennent leur permet d’avoir une plus-value.

Dans certains ménages, des femmes vulnérables qui ne vivaient que grâce à la charité, un léger mieux s’observe. Cela a été permis par le projet de Travaux publics à Haute intensité de main d’œuvre qui les a intégrées dans leur programme pour améliorer de manière durable leur situation.

En balayant les rues du centre-ville de la capitale politique, ces femmes ont trouvé un emploi rémunéré qui leur permet de vivre sans recourir à la mendicité. Cette activité, bien que modeste, a enclenché une dynamique vertueuse. Elles investissent en effet les 45 000 FBu qu’elles gagnent par mois et vivent comme les autres.

Selon beaucoup d’entre elles, le temps où elles passaient la nuit sans avoir de quoi mettre sous la dent est derrière elles. La plupart élèvent aujourd’hui des porcs, des chèvres et des lapins. Elles cultivent et récoltent comme tous leurs voisins de la colline.

« J’ai 8 porcs, 3 chèvres et j’exerce un petit commerce dans le quartier. A vrai dire, je ne dirai pas que je vis beaucoup mieux mais je suis capable de manger deux fois par jour », affirme Sabine Nzeyimana de Yoba dans la commune Gitega. D’après cette dame d’une soixantaine d’année, elle était tellement pauvre qu’elle n’imaginait même pas de pouvoir un jour élever un cobaye.

Ces femmes qui travaillent trois fois par semaine trouvent le temps nécessaire pour s’occuper des autres activités domestiques et celles génératrices de revenu. Elles indiquent aujourd’hui avoir pris en main leur destin. Grâce à cet emploi leur attribué selon leur degré de précarité, elles renouent ainsi avec la dignité, l’indépendance économique et l’espoir d’un avenir meilleur.

« Dès le deuxième mois de paye, j’ai acheté un lapin qui a donné huit lapereaux. J’ai aussi loué un champ pour cultiver. Je ne m’inquiète plus quand arrive le temps d’acheter des engrais. Je ne suis plus cette femme qui passait tout son temps à cultiver les champs des autres et qui était payée en nature », nous a confié Marie Louise Habonimana de Higiro. Avec ses 150 collègues choisies par colline et par leurs voisins suivant leur degré de vulnérabilité, la tendance s’inverse.

« Les enfants étudient, je peux m’acheter un pagne sans attendre que les voisines me cèdent leurs habits usés. Quand je frappais à la porte de quelqu’un, toute de suite il s’empressait de dire qu’il n’a rien à me donner comme si l’objectif de ma visite était de mendier », témoigne avec fierté Claudette Nahimana. « Ce n’est que le début. Aujourd’hui, je sais que je peux y arriver », ajoute-elle.

Difficile de jeter des déchets dans un endroit propre

Bottes aux pieds et avec un tablier bleu, ces nettoyeuses balayent les rues et débouchent les caniveaux chaque matin mais pendant trois jours de la semaine. Le travail terminé vers 10h du matin, elles retournent sur leurs collines pour s’occuper d’autres travaux. La pelle et le balai sont leurs seules armes pour repousser la pauvreté qui était devenue endémique chez elles.

Au-delà de l’indépendance économique, ces initiatives ont également amorcé un changement profond des mentalités au sein de la communauté. Ce qui leur permet de gagner leur pain avec un emploi que beaucoup ne souhaitent pas faire.

Les citadins admirent le changement qui s’opère au centre-ville de Gitega. Maintenant les rues sont plus ou moins propres. Certaines mentalités commencent également à changer. Les citadins et les passants qui jetaient des bouteilles d’eau vides et des détritus n’importe où commencent à se poser des questions avant de jeter des déchets par terre. Même ceux qui le font encore, ils attendent que quelqu’un qui est derrière eux les dépasse par peur d’être réprimandés.

« Si cette initiative continue, peut-être que nos concitoyens feront la propreté leur devoir. Il est difficile de jeter les déchets dans un endroit propre. Mais, si les immondices jonchent les rues et ses abords, le contrevenant ne s’estime pas responsable », indique Claver Njejimana, un habitant du quartier Musinzira. Même son de cloche chez Emmanuel Nduwayezu qui reconnait que quelque chose a changé chez certains. Il fait savoir qu’il fallait engager des gens chaque mois pour déboucher les caniveaux qui sont devant sa parcelle à cause des déchets qui obstruaient le ruissèlement des eaux de pluie.

« Cette initiative est louable pourvu que ça dure. J’ai peur que demain, une fois ce projet terminé, la commune Gitega ne soit capable de payer ces femmes pour garder les rues propres » Et à Jean Marie Gahungu d’ajouter : « Si tous ces mendiants de la ville qui n’ont pas un handicap physique étaient impliqués dans ces petits emplois rémunérés, sans doute que la société y gagnerait quelque chose. »

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