Longtemps dénigrés par beaucoup, les termites ailés volent la vedette à la viande et au poisson aujourd’hui dans la ville de Gitega et ses environs. Son prix au marché monte et les vendeurs se frottent les mains.
Dans un contexte de flambée des prix des denrées alimentaires à Gitega, où la viande et le poisson deviennent inaccessibles pour de nombreux ménages, les termites ailés, riches en protéines, émergent aujourd’hui comme une alternative alimentaire. Pour un homme ou une femme citadins, il n’est plus gênant de tenir un sachet transparent remplis de termites ailés dans la rue.
A la place où on les vend au marché communément appelé Mukabasazi, des clients se bousculent et parfois il faut jouer des coudes pour être servis. Les foules qui étaient observées devant les stands de viande ont changé de direction. Depuis le prix des termites ailés s’est envolé. Un gobelet d’un demi-kilogramme, utilisé comme unité de mesure, est aujourd’hui vendu à 6 000 FBu alors qu’il était autour de 2 000 à 3 000 FBu au cours des années antérieures.
« Je ne dirais pas qu’il y avait d’interdit qui m’empêchait de manger les termites ailés mais je ne voyais pas l’intérêt de les acheter alors que je pouvais manger des ndagalas ou de la viande », a confié Viateur Manirakiza de Bwoga.
Il trouve que ce phénomène témoigne d’un changement notable dans les habitudes de consommation. Il affirme en outre que même ses enfants n’osaient pas lui demander de leur en acheter car ce n’était pas dans les habitudes du milieu. Lui et d’autres personnes interrogées disent que les termites ailés ne font plus honte. Jadis réservés à certaines catégories sociales de personnes surtout rurales, aujourd’hui, les citadins se décomplexent et commencent à vanter leurs nombreuses vertus nutritives.
« Inutile de chercher de la viande ou du poisson quand on en a chez soi. C’est comme manger de la viande et une omelette dans un même repas. Ils remplacent valablement la viande et un enfant qui en consomme souvent ne peut pas souffrir de la malnutrition », avance le prénommé Maurice, un chauffeur de camion à Gitega. Bien que leur popularité croisse, certains groupes sociaux hésitent encore à inclure les termites ailés dans leur alimentation en raison de tabous culturels. D’autres estiment que c’est une question de temps et qu’ils finiront par en prendre.
« Tôt ou tard, beaucoup changeront de mentalités et les mangeront comme n’importe quel autre aliment. Il y’a des années, personne n’avait imaginé que les champignons seront vulgarisés et vendus dans les alimentations », a reconnu Inès Habarugira de Shatanya. D’après cette mère de famille, cette transition alimentaire témoigne de la résilience de la population burundaise face aux défis économiques.
Une opportunité économique
Historiquement, les termites ailés étaient souvent associés à l’alimentation des populations rurales et jugés d’aliment des pauvres. Cependant, la montée des prix de la viande et du poisson force les citadins à reconsidérer ces alternatives.
C’est ainsi que cette espèce d’insecte commence à être prisée dans les marchés. Ce qui reflète un changement de mentalité progressif. Ironie du sort, l’augmentation de la demande pour les termites ailés à Gitega a fait grimper leur prix, réduisant ainsi leur accessibilité pour les plus pauvres, bien qu’ils soient toujours moins coûteux que la viande ou le poisson. De plus, leur collecte est limitée aux régions où les conditions climatiques favorisent leur prolifération.
Certains vendeurs font savoir que ces insectes nutritifs offrent aussi une opportunité économique. Leur collecte et leur vente créent des revenus supplémentaires pour les ménages. Cependant, leur caractère saisonnier et leur disponibilité géographique limitée limitent leur rôle dans la lutte contre la flambée des prix des produits alimentaires.
Des micronutriments essentiels
D’après Jimmy Nduwarugira qui indique avoir des notions suffisantes dans la nutrition, les termites ailés sont une source impressionnante de protéines, allant de 45 à 75 %, selon l’espèce. Ils contiennent également des micronutriments essentiels tels que le fer, le zinc et les acides gras oméga-3 et oméga-6, qui peuvent combler des déficits nutritionnels critiques, notamment chez les enfants.
Il reconnait qu’aujourd’hui où les protéines animales restent un défi, la consommation des termites ailés est perçue comme une solution efficace pour améliorer la sécurité alimentaire.
« S’ils étaient toujours disponibles, les médecins les prescriraient aux malnutris. Mais malheureusement, ils sont saisonniers et éphémères », a-t-il déploré.
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