Lundi 03 mars 2025

Économie

Region Centre/Gitega : Du nouveau : des feuilles de manioc et de haricot vendues au kilo

Region Centre/Gitega : Du nouveau : des feuilles de manioc et de haricot vendues au kilo
Un kilo de feuilles de manioc pilées coûte 1 400 FBu

Il y’a quelque temps, les feuilles de manioc et de haricot étaient perçues comme des produits alimentaires de moindre valeur à Gitega. Dans la campagne, elles étaient souvent données gratuitement et en ville, elles étaient vendues à bas prix. Aujourd’hui, les choses ont changé. Elles sont vendues à la pesée. Ce qui provoque une montée considérable de leurs prix.

Appelées jadis aliments des pauvres et souvent négligées en milieu rural, les feuilles de manioc et de haricot ont aujourd’hui pris de l’importance. A l’instar des autres denrées alimentaires dont le prix a explosé, la balance s’improvise en effet dans la vente de ces feuilles. Ce qui provoque une très forte augmentation de leurs prix.

Les feuilles de haricot sont en effet négociables à 2 500 FBu par kilo et celles de manioc, après avoir été pilées, sont autour de 1 400 FBu. Avant, un sac de feuilles de manioc et de haricot d’environ 20 kg s’achetait à 200 voire 100 FBu

Des avis partagés

Face à cette nouvelle pratique, les avis des uns et des autres sont partagés. Certains affirment en effet que vendre ces feuilles à la pesée va améliorer les conditions de vie des cultivateurs. En cueillant ces feuilles dans son champ pour les vendre en ville, un paysan peut acheter ainsi facilement le riz ou d’autres denrées alimentaires qui manquent à la maison. Ces feuilles auront alors la même place que le haricot, le maïs, le manioc, etc.

« Nous n’aurions jamais imaginé que ces feuilles puissent nous rapporter autant d’argent. Aujourd’hui, nous pouvons mieux subvenir aux besoins de nos familles », raconte Jean Bukuru, un cultivateur de Kiriba à Giheta. Selon lui, cette nouvelle pratique profite avant tout aux producteurs ainsi qu’aux revendeurs qui voient leurs revenus augmenter. Pour les feuilles de haricot, d’après ce cultivateur, le seul inconvénient c’est qu’elles ne sont pas toujours disponibles. Elles sont saisonnières et à courte durée.

« Si les feuilles de manioc n’étaient pas saisonnières, elles auraient remplacé aisément certaines cultures qui se vendent à des prix élevés », souligne Capitoline Hakizimana de Birohe en zone rurale de Gitega.

Au moment où les cultivateurs et les vendeurs se frottent les mains, beaucoup dans la campagne et en ville de Gitega soulignent par contre que cette pratique risque d’encourager les gens à cueillir aveuglement les feuilles à cause de l’appât du gain sans tenir compte des conséquences sur les pousses de haricot.

D’autres estiment que même si ce commerce constitue une aubaine pour les producteurs, il pèse lourdement sur les consommateurs les plus vulnérables dans la ville de Gitega.

« Ça change vite. Une femme du village pouvait demander de cueillir les feuilles de haricot ou de manioc dans le champ de sa voisine. Mais, aujourd’hui, cette générosité est hypothéquée par le goût de l’argent, Au lieu de s’entraider comme c’était notre coutume, beaucoup lorgneront sur l’argent qu’ils peuvent tirer sur 5 ou 10 kg de feuilles », déplore Spés-Caritas Kanyange.

Elle déplore en outre que cet argent peut aussi attirer les voleurs dans les champs qui peuvent mettre les feuilles de manioc et de haricot sur leur tableau de chasse.

« Aujourd’hui où beaucoup de ménages vivent sous le seuil de la pauvreté, je crains que nos champs puissent être visités par des voleurs qui cherchent de l’argent facile », estime-t-elle. Les consommateurs, notamment ceux à faibles revenus, sont les premières victimes de la flambée des prix. Avec des salaires stagnants et un coût de la vie en hausse, l’accès à ces denrées essentielles devient de plus en plus difficile.

« Avant, les feuilles de manioc étaient l’aliment principal pendant le week-end grâce à leur faible prix. Maintenant, avec ces prix, je dois réduire les portions », se plaint la prénommée Aline, une mère de famille. Beaucoup témoignent que cette mutation creuse davantage l’écart entre les classes sociales.

Les plus fortunés s’adaptent facilement, tandis que les plus vulnérables en souffrent et se retrouvent de plus en plus dans une insécurité alimentaire. Face à cette inflation, certaines familles modifient leur régime alimentaire. Elles cherchent des alternatives moins onéreuses en abandonnant certains aliments traditionnels.

« Quand le premier commerçant a eu l’idée d’acheter les récoltes vivrières par kilo en attirant les cultivateurs, les autres l’ont imité pour casser la concurrence. Et voilà, presque tous les produits se vendent aujourd’hui à la pesée », souligne Déo Sibomana un commerçant au marché central de Gitega.

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