La CVR compte débuter avec l’étape d’analyse des dépositions et de documentation qui devrait aboutir à la qualification des crimes commis. Pour le professeur Laurent Nzosaba, cette commission n’en a pas la compétence. L’universitaire belge, Stef Vandengiste nuance.
«Désormais, c’est le moment d’analyse, de qualification des crimes et d’établissement des responsabilités», a indiqué, ce mercredi 23 mai, Mgr Jean-Louis Nahimana, président de la Commission Vérité et Réconciliation. C’était lors d’une conférence organisée à Bujumbura sur l’établissement des responsabilités des crimes.
D’après ce prélat, la loi qui régit sa commission l’autorise de qualifier les crimes : « Nous le ferons en collaboration avec les autres organes à savoir le gouvernement, le parlement et l’Organisation des Nations Unies». C’est à ces derniers que la CVR doit remettre le rapport final.
Pour Laurent Nzosaba, doyen de la Faculté de Droit de l’Université du Burundi, la CVR n’en est pas techniquement capable. C’est son constat à la suite d’une étude commanditée par la CVR sur les critères de reconnaissance des crimes des violations graves : «Cette commission n’a pas la compétence de qualifier les crimes. Encore moins ceux de droit international».
Cet universitaire fait savoir que la qualification des infractions revient naturellement aux officiers du ministère public : «Le travail de la CVR ne peut se limiter qu’au dégagement des faits». Il invoque l’Accord d’Arusha et le droit international : «Ils ne lui permettent pas de qualifier des crimes de violations graves notamment les crimes de génocide, les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité». Et aussitôt de recommander que le travail de la CVR soit suivi de celui d’un Tribunal pénal spécial.
«Un volet judiciaire est une nécessité»
«Quelle serait l’importance d’un rapport muet sur les crimes de guerre, crimes de génocide et crimes contre l’humanité ?», s’interroge Stef Vandengiste, constitutionnaliste belge et spécialiste du Burundi. Pour lui, la CVR devrait être à même d’établir les responsabilités des auteurs des crimes : «Au moins de manière provisoire». Sinon, explique-t-il, le tribunal pénal spécial manquerait la matière sur laquelle elle statuerait.
Cet universitaire belge invoque le mémorandum du parti Cndd-Fdd de 2007 sur la CVR et ledit tribunal pour éclairage : «C’est sur les conclusions de la CVR qu’on décidera de l’opportunité ou non de la mise sur pied d’un Tribunal pénal spécial».
Près de 70 mille dépositions ont été enregistrées par la CVR depuis avril 2017 jusqu’à la clôture. Environ 4ooo fosses communes ont été également découvertes.