Jeudi 19 décembre 2024

Société

Rares et chères, les boissons de la Brarudi attisent les convoitises

Rares et chères, les boissons de la Brarudi attisent les convoitises
Plusieurs témoignages affirment que c’est la faute à l’insuffisance des produits de la Brarudi

Depuis plusieurs mois, une pénurie prolongée des produits de la Brarudi s’observe. Face à cette situation, certains commerçants choisissent d’augmenter les prix, arguant qu’ils achètent ces produits à un coût plus élevé. Mais d’autres en profitent pour fixer des prix exorbitants alors qu’ils sont approvisionnés par la Brarudi. Cette situation a récemment poussé les autorités à prendre des mesures strictes, notamment la fermeture de certains bars.

L’une des propriétaires d’un bar situé dans la zone Maramvya, parmi les établissements fermés, explique que les dépôts ne distribuent parfois qu’une seule fois par mois. « Pour ne pas fermer, il faut se débrouiller pour chercher ces produits chez d’autres fournisseurs. Puisque les dépôts distribuent rarement et qu’on s’approvisionne par bouteille, impossible de vendre une bouteille à 2500 FBU sans tenir compte du carburant pour aller s’en approvisionner », explique ce tenancier.

Lors d’une réunion organisée par l’administrateur, souligne-t-il, il a été décidé que ceux qui souhaitent s’approvisionner dans les entrepôts doivent disposer d’un endroit exclusivement réservé aux boissons de la Brarudi. « Ceci moyennant le paiement d’un montant à l’Office burundais des recettes, avec la présentation du récépissé à un délégué local ».

M. T., propriétaire d’une boutique, a réussi à s’approvisionner. Il a eu un casier d’Amstel, quelques limonades et quelques bouteilles de bière Royal et un casier de la grande Primus auprès d’un petit dépôt. « On ne peut pas augmenter les prix des produits qu’on ne trouve pas », a-t-il lâché sur un ton taquin.

Un autre commerçant, qui combine la vente des produits BRARUDI avec d’autres articles, est désabusé par la situation : « C’est comme si on ne vend plus les boissons de la BRARUDI à cause de leur rareté. On nous donne qu’un ou deux casiers, ce qui ne nous rapporte presque rien. Parfois, quand les boissons sont disponibles au dépôt, on y va pour s’approvisionner, mais toujours en petite quantité, car on nous réserve les boissons alcoolisées pour les bars. Malheureusement, même les bars ne sont pas satisfaits car ils ne reçoivent des boissons qu’une fois par semaine ».

Une situation compliquée pour les vendeurs

Les vendeurs se plaignent de pertes financières dues à cette pénurie. Certains envisagent d’augmenter les prix, mais la peur des sanctions déjà appliquées à leurs collègues les freine.
« On ne peut pas augmenter les prix. Si on se fait attraper, le bar est fermé, ou bien, ce sont d’autres sanctions qui tombent et c’est par exemple tout le stock restant qui est distribué gratuitement », déplore un gérant d’un bar dans le quartier Mirango.

Certains tenanciers accusent les délégués de la Brarudi de privilégier leurs amis ou proches dans la distribution des boissons. « Le favoritisme aggrave la situation. Les vendeurs, surtout les boutiquiers, ne s’approvisionnent pas facilement dans les mini-dépôts.

Tout se fait par affinités : certains reçoivent des produits alors que d’autres non », explique un vendeur.

Les consommateurs ne conçoivent pas tous cette situation de la même manière. Certains comprennent cette hausse des prix, tandis que d’autres la jugent excessive.

L.I., résidant à Mirango et rencontré à un kiosque de Kamenge, explique : « Les boutiquiers s’approvisionnent très difficilement. Ils vendent ces produits au détail et cherchent à tirer un bénéfice. Ceux qui ont la chance de s’approvisionner dans les mini-dépôts doivent ajouter une certaine marge bénéficiaire afin de couvrir leurs frais ».

Un de ses camarades critique cette hausse : « Oui, c’est vrai qu’ils s’approvisionnent bouteille par bouteille, mais ils exagèrent. Ajouter 1000 ou 1500 FBU par bouteille est incompréhensible. Ils veulent des bénéfices excessifs ».

Un gérant de Mega SSD à Maramvya accuse les boutiquiers de profiter de la situation : « Le camion vient trois fois par semaine maintenant, alors qu’auparavant il passait tous les jours. Certains mini-dépôts reçoivent trois casiers, mais ils en vendent un seul et cachent les autres pour les revendre à un prix élevé avant la prochaine distribution ».

Face à cette pénurie, certains commerçants, font de la spéculation et profitent de cette situation. L’un d’eux, opérant dans la zone Kanyosha au sud de Bujumbura, confie : « Personnellement, je ne souhaite pas que la situation revienne à la normale, car je réalise plus de bénéfices qu’avant. Avec deux casiers Amstel, je peux gagner plus de 48 000 FBU en vendant chaque bouteille à 5500 FBU au lieu de 3500 FBU, le prix normal ».

Des fermetures en série

Malgré le calvaire des commerçants et ces spéculations, les autorités ont réagi. Le lundi 16 décembre, plusieurs bars ont été fermés, notamment dans la commune de Mutimbuzi où 27 établissements ont été touchés.

Parmi ceux-ci, 6 bars ont été fermés dans la zone de Maramvya, tandis que 6 autres l’ont été dans la zone de Gatumba ainsi que les 18 dans la zone de Rubirizi.

Cette mesure fait suite aux exhortations du gouverneur de la province de Bujumbura, Désiré Nsengiyumva, qui a demandé aux administrateurs communaux de prendre des décisions nécessaires pour punir les vendeurs qui augmentent les prix des produits de la Brarudi, des directives que l’administrateur communal de Mutimbuzi, Siméon Butoyi, a rapidement exécuté.

Suite à la flambée injustifiée des prix de certains produits essentiels, l’Inspection générale de la Police nationale a également donné des instructions fermes aux commissaires régionaux.
L’ordre a été donné de veiller à « faire respecter les prix officiels des produits, tout en mobilisant les forces de police dans ce sens. Comme c’est précisé dans une correspondance officielle datée du 17 décembre 2024 ».

L’Inspection pointe du doigt « certains commerçants et transporteurs » accusés de chercher « un enrichissement illicite sous le dos de la population ». Une situation qui a provoqué une grogne notable dans plusieurs régions, exacerbant les difficultés économiques déjà présentes.

Le ministre de la Justice, Mme Domine Banyankimbona a également fermement condamné les pratiques spéculatives de certains commerçants sur les produits Brarudi, en particulier lorsque ces agissements se déroulent sous le regard des autorités administratives et des forces de l’ordre.

Elle a insisté sur le fait que les administrateurs ont le devoir de mettre un terme à ces pratiques illégales et de prendre les mesures nécessaires pour les sanctionner. « C’est notre travail », a-t-elle martelé.

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