Plus de 60 mille réfugiés Burundais doivent être rapatriés de la Tanzanie du 1er avril au 9 novembre. Bujumbura affirme être prêt à les accueillir. Ceux qui sont déjà rentrés sont sceptiques.
<doc3227|left>Maître Clotilde Niragira, ministre de la Solidarité est claire : « Le gouvernement du Burundi est prêt à accueillir tous les réfugiés qui vont rentrer dans leur pays natal, quel que soient les conditions. » Ces propos ont été tenus lors de son discours de clôture de la réunion de la commission tripartite (Burundi-Tanzanie et HCR) qui s’est tenue du 20 au 22 février à l’hôtel Source du Nil.
Entres autres conclusions, cette 16ème réunion a consacré le retour de 5000 réfugiés chaque mois à partir d’avril jusqu’en novembre, un mois avant la fermeture définitive du camp des réfugies de Mtabila en Tanzanie. En tout, ce sont plus de 67 mille réfugiés qui seront rapatriés dont 38 891 vivant dans les camps de Mtabila et Nyarugusu, 6715 sur les anciens sites d’installation et 22227 dans les villages de la région de Kigoma.
La plupart veulent rentrer au Burundi
Selon la même commission, parmi les 35 mille réfugiés interrogés, la plupart ont exprimé leur volonté de rentrer. Ainsi 337086 personnes reparties en 922 ménages ont indiqué qu’ils n’ont plus besoin de protection internationale et veulent retourner au Burundi. Tandis que 2045 individus ont exprimé un besoin continu de protection internationale. « Ceux-là resteront au camp Mtabila où ils seront installés dans une zone séparée. Des solutions durables seront identifiées en leur faveur », souligne une source proche du HCR. En plus de ces deux groupes, 2625 individus repartis en 622 ménages ne se sont pas exprimés ni sur la volonté de rentrer ou de rester en Tanzanie. La commission a promis de continuer à les écouter et recommencer les interviews s’il le faut.
Le scepticisme
Malgré ces bonnes résolutions, des Burundais déjà rapatriés sont sceptiques quant à ce rapatriement prochain. Ceux qui vivent sur le site de Nyakazi en commune Kibago de la province Makamba n’y vont pas par quatre chemins. Pour eux, c’est la poudre aux yeux que de dire qu’ils n’ont rien à craindre et qu’ils peuvent rentrer : « on nous a servi la même sauce et nous y avons cru. Maintenant nous souffrons », confie sous anonymat un rapatrié rencontré sur le site Nyakazi en commune Kibago.
Très en colère, Evariste Niyintunze, l’un des chefs du site indique : « Nous n’avons ni vivres et nos familles ne sont pas soignées faute de centre de santé. » Selon lui, la dernière distribution des vivres remonte au mois de mai 2011 quand le ministère de la solidarité a donné à chaque ménage 25 kg de farine et 50 kg de haricots.
Pourtant, affirme-t-il, le gouvernement par le biais de madame Immaculée Nahayo, alors ministre de la Solidarité leur avait promis des maisons, des écoles pour leurs enfants et un centre de santé dès leur retour au Burundi. « c’était lors d’une descente de sensibilisation de masse dans différents camps de réfugiés en Tanzanie avant notre rapatriement. » Et de se demander si le gouvernement du Burundi saura honorer ses engagements envers 67 mille rapatriés s’il ne l’a pas fait pour 1000 personnes qui vivent sur le site Nyakazi.
Promesses non tenues
Fenias Gisagara habitant le site va plus loin. Ce père de six enfants indique que la plupart des maisons sont sur le point de s’écrouler. Pour lui, il est visible que rien n’avait été préparé pour les accueillir : « Si c’est ça qu’ils auront comme maison, ça sera grave. »
Pire encore indique ce sexagénaire, le gouvernement vient de distribuer des terres à cultiver d’une superficie de 50 mètres sur 100 à chaque ménage, trois ans après leur retour. Mais là aussi, confie-t-il, plus de 44 familles attendent toujours. De plus, ajoute-t-il, ceux qui ont eu des terres n’ont pas de semences. D’où son scepticisme quant à la réussite du rapatriement annoncé.
Pour un cadre du ministère de la Solidarité, il n’y a pas lieu d’avoir des craintes puisque le gouvernement du Burundi a accueilli plus de 500 mille Burundais rentrés d’exil dont près de 490 mille venus de la Tanzanie depuis 2002 : « Tout n’a pas été parfait mais nous avons su faire face. »